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BREFS ET AUTRES
17 septembre 2022

TAGADA TAGADA TSOIN TSOIN DONT MOURIR EST LE REFRAIN

TAGADA TSOIN TSOIN DONT MOURIR EST LE REFRAIN

1.

Me souviens d'avoir tenté de regarder « Mort à Venise » et d'avoir eu l'envie d'ouvrir le poste de télé, d'en sortir les petits mannequins là et d'les secouer en leur soufflant dans les bronches : « Non, mais c'est pas bientôt fini, toutes ces tergiversations neurasthéniques, hein ? »

2.

« Chiche que celle-là s'appelle Camille ! »  disait parfois Belle aux heures de récréation. « Et celle-ci Colette. Chiche que cette petite brune sera régente et cette grande rousse chanteuse réaliste ! »

(Stanislas-André Steeman, « Quai des Orfèvres »)

Défois qu'on les regarde pousser, les agitées petiotes, les bellottes et les moins gracieuses, qu'on se dit laquelle sera assez sotte pour s'faire embobiner par un veule poilu, laquelle fera carrière et la chantera juste, son ariette.

3.

« Vivre est une chanson dont mourir est le refrain. »

(Victor Hugo à propos de l’œuvre de Rabelais in « William Shakespeare »)

C'est qu'on en fait des choses et des sottises dans sa vie (à condition de ne pas passer trop vite), féroces amours et amitiés rosses, pertes et profits, égarements plus ou moins passagers, menteries, zizanies, coucheries, beuveries, tabagies, ah la chanson de la dolce vita, dis, qu'on se chante en zigzagant entre les cactus.

(Épiques, les cactus, ça va de soi).

Pis entre tous ces heurs et malheurs, la Mort se rappelle régulièrement à nos pommes : décès de proches, d'amis, et tous les massacres auxquels les médias nous ont abonnés comme autant de preuves que, décidément, Dieu s'en fout.

4.

« Quiconque a lu Rabelais a devant les yeux à jamais cette confrontation sévère, le masque de la Théocratie regardé fixement par le masque de la Comédie. »

(Victor Hugo à propos de l’œuvre de Rabelais in « William Shakespeare »)

Rabelais... vis comica... blasphème salutaire... pas tombé encore, « le masque de la Comédie », pas mordu la poussière tombée des habits des prosélytes des dieux à colères ... Quant au masque de la Théocratie, on le croirait collé aux faces barbues ou pas barbues des tartuffes.

Je pense assez que l'on ne peut être lecteur admiratif de Rabelais (j'en suis) sans être pour Charlie : combattre par le Verbe (lequel fut au Commencement) théocratie et bigoterie, c'est rappeler que chaque humain est avant tout son propre libre-arbitre.

5.

« L'irascible Picrochole est le type du mauvais roi : ambitieux, brutal, belliqueux, crédule, il obéit sans réfléchir aux suggestions des mauvais conseillers et se croit déjà maître du monde. »

Ce portrait du Picrochole de Rabelais par Pierre Michel me semble correspondre tout à fait à celui du petit seigneur et méchant homme Vladimir Poutine le Massacreur, qui, tout autant que le fut Picrochole, finira par être vaincu.

6.

Ce que nous cherchons dans la littérature, la musique, la peinture : l'inscription du visage dans la durée.

7.

« La pelouse entourant l'habitation fuyait comme un tapis enchanté vers d'invisibles bornes. »

(Stanislas-André Steeman, « Quai des Orfèvres »)

Une pelouse, ça pelouse pis pousse pis s'tond pis sèche jaunit pis s'mouille et repousse. Des bestioles y passent la nuit. Défois ce sont des voleurs, ou des assassins. La Lune y pose ses chiffres.

8.

« Un maillet traînait sur le sol, au pied d'un gong chinois. »

(Stanislas-André Steeman, « Quai des Orfèvres »)

Ça, quand on laisse traîner les maillets au pied des gong chinois, y a des risques que la main de l'invisible s'en saisisse et vous estourbisse.

9.

« Et, pour vous donner à entendre de moy qui parle, »

(Rabelais, « Gargantua », chapitre premier)

Quel est ce moi qui parle dans les mots ? Quelque fantasme sans doute.

Quelque fantôme dont nous tissons notre réalité.

Le reste n'est que chiffres et statistiques.

10.

« L'anguille y est et en cest estau musse,

Là trouverez (si de pres regardons)

Une grande tare au fond de son aumusse. »

(Rabelais, « Gargantua », chapitre II)

Qui vit jamais anguille, aiguille, guenille, gigue et gidouille, guigne, guitare porteuse de tiare et de chaperon fourré se dissimuler dans quelque étal ? Autant chercher le pape dans le pas d'une mule.

11.

« provision de saulcisses, non de Bouloigne (car il [Grandgousier] craignoit ly boucon de Lombard) ».

(Rabelais, « Gargantua », chapitre III)

« boucon » viendrait de l'italien « boccone » (morceau, bouchée) et « ly boucon de Lombard » désignerait un « morceau empoisonné », ce qui rappelle la chanson traditionnelle « Dame lombarde » et son serpent vert attrapé pour empoisonner le vin.

12.

« Mais la grande diablerie à quatre personnaiges estoit bien en ce que possible n'estoit longuement les reserver, car elles feussent pourries. »

(Rabelais, « Gargantua », chapitre IV)

Comme ils faisaient le diable à quatre, ils fondèrent un groupe de rock.

Étant de même chair que chacune des saucisses perspicaces porteuses de tripes et d'une âme plus ou moins vague et fluctuante, ils vieillirent tant qu'avant que d'aller pourrir où tout s'détricote, se séparèrent.

Patrice Houzeau

Malo, le 16 septembre 2022.

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