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BREFS ET AUTRES
19 août 2023

VERS UN AXE MOSCOU-PEKIN-TEHERAN ?

VERS UN AXE MOSCOU-PEKIN-TEHERAN ?

1.
N'inversons pas causes et effets. Dans la sale guerre de Poutine en Ukraine, ce sont les Ukrainiens qui sont à l'offensive, et les Russes bloqués et enlisés au sud et à l'est. C'est l'économie russe qui est menacée, pas l'économie occidentale. C'est le rouble qui est faible, pas l'euro, ni le dollar.

2.
Si Poutine n'a pas cherché à effrayer Sarkozy lors du G8 de 2007 à Heiligendamm, cela signifierait que Nicolas Hénin a raconté n'importe quoi sur ce G8. Question : pourquoi ? Nicolas Hénin savait-il qu'il mentait et aurait-il été manipulé ? Et dans ce cas, par qui ? Et dans quel but ?
Quant au fait « qu'on ne parle pas ainsi entre chefs d'Etat », je le crois assez volontiers, mais Poutine se comporte-t-il toujours comme un chef d'Etat responsable et respectueux de ses homologues étrangers ? J'ai des doutes.
Rappelons que c'est au G8 de juin 2007 que Poutine aurait (ou pas) cherché à intimider Sarkozy. C'est en novembre 2007, et à Washington (!), que Sarkozy annonce que la France réintégrera le Commandement intégré de l'OTAN. La proximité des dates interroge.

3.
Sarkozy pense que l'Ukraine devrait rester un « pays neutre ». Cela ne semble plus possible, pas après la sale guerre de Poutine. Les masques sont tombés.
D'une manière ou d'une autre, Poutine, ou ses successeurs, tenteront de faire de l'Ukraine un de leurs états satellites. Et donc les Ukrainiens doivent pouvoir compter sur l'OTAN pour les protéger et sur l'UE pour poursuivre leur développement.
De toute façon, ce n'est certainement pas à Sarkozy, qui, en outre, ne passe pas pour l'un des meilleurs dirigeants que nous ayons eus (loin de là), de décider à la place des Ukrainiens ce qui est bon pour l'Ukraine.

4.
Il y a bien sûr les pro-Poutine bourrins qui assènent que le mafieux du Kremlin va sauver le monde et la chrétienté, en finir avec la décadence occidentale, changer l'eau en vin et le plomb en or, et puis il y a les pro-Poutine subtils, ceux qui mettent l'accent sur la négociation, sur les intérêts ukrainiens qui ne sauraient être tout à fait les nôtres, sur la nécessité de cohabiter avec le diable, puisque n'est-ce pas, le diable est une puissance nucléaire, ceux qui désavouent l'opération spéciale, mais qui voient l'Ukraine comme un « trait d'union » nécessairement « neutre » entre la Russie et l'Europe, bref, pas des collabos, pas des résistants non plus, des « réalistes », de faux lucides, des opportunistes, des cyniques, voire des corrompus plus ou moins discrets, plus ou moins honteux, qui refusent d'admettre que maintenant que Poutine a tombé le masque et révélé ses intentions en déclenchant sa sale guerre en Ukraine, il ne s'agit plus de négocier avec Poutine, mais de l'intimider, le dissuader, le faire reculer et accepter que l'Ukraine puisse devenir un membre de l'OTAN et entrer dans l'UE, que cela plaise ou pas à Moscou.

5.
a) Les intérêts des États étant, par définition, différents d'un pays à l'autre, c'est avec ses alliés et ses partenaires qu'un Etat négocie les traités et les alliances nécessaires à la cohabitation et à la bonne entente.

b) Quand l'adversaire, celui dont les intérêts ne sont pas simplement différents mais s'opposent frontalement aux vôtres, déclenche des guerres et menace la paix mondiale, le verbe « négocier » est inadéquat, c'est « parlementer » qui convient, et il s'agit dès lors de dissuader, d'intimider, faire reculer, ruser. Il s'agit donc d'être en position de force. Si vis pacem.

6.
Il faut quand même être soit très naïf (jusqu'à la bêtise) ou très cynique (jusqu'où?) pour affirmer que l'on a, ou eu, quelque « amitié » avec un homme comme Poutine qui n'hésite pas à faire assassiner ses opposants et couvre les massacres de ses troupes en Ukraine.

7.
La sale guerre en Ukraine de Poutine n'est pas une conversation de salon. Un conflit gelé, une Ukraine « neutre », non protégée par l'OTAN, non membre de l'UE, c'est exactement ce que Poutine veut et ce serait l'assurance de la consolidation d'un axe Moscou-Pékin-Téhéran extrêmement dangereux pour l'Occident et les démocraties libérales, sans compter l'accroissement de la défiance et du dégoût que ressentirait alors une large partie de l'opinion publique.

8.
Depuis que Sarkozy a fait savoir tout le bien qu'il pense d'une éventuelle candidature de Darmanin aux présidentielles 2027 (Patrick Vignal semble très content lui aussi), peut-être faudrait-il lui demander, à Darmanin, ce qu'il en pense, tiens, de l'Ukraine...

9.
Une Ukraine « neutre », comme la voudrait Sarkozy, signifierait, de fait, une partition du pays. Poutine ne peut envisager de se retirer du Donbass ; cela signifierait que son « opération spéciale » aurait été inutile. Et, bien sûr, il garderait la Crimée.
Cela rappelle 1940-1942, la France envahie par les nazis et la ligne de démarcation entre zone occupée et « zone libre ». On sait comment cela a fini.

10.
Non, la sale guerre de Poutine en Ukraine n'est pas seulement une « guerre territoriale », un conflit de voisinage, c'est un conflit civilisationnel au cœur même de l'Europe qui oppose deux visions du monde radicalement différentes. L'une est basée sur la démocratie et l'adhésion aux valeurs libérales de l'Occident ; l'autre se fonde sur un régime autoritaire, oligarchique et réactionnaire qui considère que l'Eurasie a vocation à contrôler le continent européen.

11.
Entendu hier la thèse selon laquelle les USA craindraient qu'une défaite de la Russie favorise la Chine. Une telle conception est une erreur stratégique. C'est le contraire. Si l'on accepte de parlementer avec Poutine et si l'on accepte l'idée d'une Ukraine « neutre » et de l’annexion du Donbass à la Russie, cela ancrera la Chine dans l'idée que l'Occident est faible. Dès lors, la Chine ne craindrait plus du tout d'envahir Taiwan, et surtout cela renforcerait un axe Moscou-Pékin-Téhéran extrêmement dangereux pour l'Occident, l'Afrique et la paix du monde.
Je constate avec consternation que dans le souci de ménager des intérêts à très court terme, bon nombre de politiques, de militaires et de diplomates prennent le chemin de la bienveillance, voire de la collaboration avec Poutine, sa mafia, ses réseaux, répétant ainsi les erreurs qui ont conduit à la Seconde Guerre Mondiale. Ils appellent cela « négocier » ; j'appelle cela « céder à un chantage ».

Patrice Houzeau
Malo, le 19 août 2023.

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