Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
BREFS ET AUTRES
26 septembre 2022

L'AIR ME TRAVERSE COMME S'IL ETAIT CHEZ LUI

L'AIR ME TRAVERSE COMME S'IL ETAIT CHEZ LUI

 

« - La Juliette, ça rappelle l'Henriette,

Charmante station du chemin de fer

Au cœur d'un mont comme au fond d'un verger

Où mille diables bleus dansent dans l'air ! »

(Rimbaud, « Plates-bandes d'amarante... »)

1.

La catafiole, ça m'apprendra à m'mêler d'ma fiole !

Juliette, retourne voir ton Roméo, tu vois pas qu'tu m'indisposes ?

Ça me carapuste et me tarabuste et me claquebuste, la catafiole,

Rappelle la sgronge, la catafiole, et puis

L'Henriette (faut dire, ça fait longtemps que je n'ai pas mangé de rillettes).

2.

Charmante, qu'elle fut, au début, après s'grognassa féroce !

Station après station, moi j'alloingeais de plus en plus.

Du retour, il ne me restait que les sélabas. Dans le

Chemin, rameutant, je sifflai mes fugaces.

De toutes mes ombres, il n'en manqua pas une. Le

Fer me palpitait et le rocher me cabochait. J'm'entêtos.

3.

Au temps j'ai tant donné de mains vides que le

Cœur me scragne (le clown a bouffé l'aragne).

D'un coup de fusil je déduisis l'imposture de l'éternité. Le

Mont vomissait ses solitudes (les chevaux morts jonchaient).

Comme je me souviens... comme je me souviens... Aurais-je retrouvé ma tête ?

Au temps j'ai tant donné de phrases creuses que le

Fond, qui n'est pas plus pur que le clair de la lune,

D'un frosque me flouche (le bateau s'a noyé dans sa flache). Quant au

Verger, je n'y retrouve pas mes os. Ce n'est donc pas là que je suis mort.

4.

Où sont-ils donc, mes osses ?

Mille loups les auraient-ils emportés ? Les

Diables en ont-ils faits des concerts de flûtes ? Les

Bleus du ciel me tachent (du fait de ma translucidité spectrale)

Dansent-ils, mes osses, la gigue des anges

Dans quelque quolibet où l'on boit sec en jouant de l'accordéléphanton ?

L'air me traverse comme s'il était chez lui.

Patrice Houzeau

Malo, le 26 septembre 2022.

Publicité
Publicité
25 septembre 2022

CONSIDERATIONS SUR LA FUITE ET AUTRES BRICOLES

CONSIDERATIONS SUR LA FUITE ET AUTRES BRICOLES

1.

La fuite de bon nombre de Russes après l'annonce poutinienne d'une mobilisation partielle prouve qu'une large partie de l'opinion russe sait parfaitement que la guerre en Ukraine est une boucherie dont Poutine est seul responsable.

Il est possible que bon nombre de Russes qui tentent aujourd'hui de fuir la Russie et la mobilisation poutinienne, applaudissaient il y a peu leur dictateur et souhaitaient fort patriotiquement la fin d'une Ukraine indépendante et la mort de Zelensky.

Possible que bon nombre de Russes étaient d'accord pour que le voisin aille se faire trouer la peau en Ukraine ;maintenant qu'ils sont eux-mêmes concernés, voilà qu'ils trouvent beaucoup moins de talent à leur dictateur et rêvent de la paix qu'on trouve en Occident.

Faut-il accueillir en Occident les Russes qui fuient la dictature poutinienne et sa « mobilisation partielle » ? Afin d'éviter les serpents du FSB et les indésirables, sans doute faudra-t-il agir au cas par cas.

Le coup de poker cynique qui consisterait à fermer les frontières de l'Occident aux objecteurs de conscience russes dans l'espoir de provoquer un choc en Russie et la chute de Poutine, serait une erreur, la dictature poutinienne étant efficace dans la répression.

Les Russes qui fuient la dictature poutinienne et la « mobilisation partielle » ne sont sans doute qu'une partie de l'iceberg. Il y a aussi ceux qui ne peuvent pas partir et qui, peut-être, commencent à penser que Poutine, faudrait s'en débarrasser.

2.

25 Septembre 2022. Entendu cette annonce d'une émission sur France Culture : « L'embarras de la gauche après la révélation d'un certain nombre de violences sexistes : tâtonnements ou tartufferie ? »

3.

« Quand le peuple d'Athènes, par exemple, nommait ou cassait ses chefs, décernait des honneurs à l'un, imposait des peines à l'autre, et par des multitudes de décrets particuliers exerçait indistinctement tous les actes du gouvernement, le peuple alors n'avait plus de volonté générale proprement dite ; il n'agissait plus comme souverain mais comme magistrat. »

(Rousseau, « Du Contrat social »)

Cette phrase de Rousseau illustre ce que serait la sixième République rêvée par la « France Insoumise » de Mélenchon : un peuple magistrat et dont la volonté générale serait en fait confisquée par un pouvoir habile et manipulateur qui pèserait sur le législateur.

4.

De la démocratie formelle. Certains y verront la Macronie, en particulier dans le pénible épisode du confinement de mars 2020, d'autres y verront la façon autoritaire de Poutine dirigeant la Russie. Encore que la France soit une démocratie (avec un peuple « magistrat » en effet) cependant que l'on peut émettre des doutes sur la façon dont se déroulent les campagnes électorales poutiniennes.

5.

« Ce n'est point par les lois que l'Etat subsiste, c'est par le pouvoir législatif. »

(Rousseau, « Du Contrat social »)

D'où l'importance du débat démocratique qui, discutant les lois, les fait évoluer cependant qu'un Etat autoritaire ne modifie les lois qu'en fonction des intérêts de son autorité, faisant ainsi du droit de légiférer un droit du plus fort garanti par sa police politique.

6.

« On a de tous temps beaucoup disputé sur la meilleure forme de gouvernement, sans considérer que chacune d'elles est la meilleure en certains cas, et la pire en d'autres. »

(Rousseau, « Du Contrat social »)

On a bien raison de se révolter disait l'autre. On

A en tout cas toujours des raisons pour.

De cela on en manquerait, qu'on les inventerait.

Tous les prétextes sont bons pour manifester son humanité querelleuse. Les

Temps sont difficiles, toujours.

Beaucoup en font profession et agitent tort bocaux et cornichons. Le règlement est

Disputé ! Pourquoi ? Parce que c'est le règlement.

Sur tout l'âne donne son avis et brait s'il n'est pas satisfait.

La gouvernance, c'est défois la foire aux ânes, les diplômés de l'ENA (l'Ecole Nationale des Ânes), la

Meilleure école dans le genre ascenseur des opportunistes. On

Forme les cadres

De la Nation. Ça coûte bonbon et on a quoi défois ?

Gouvernement... gouvernement.. plein d'gens qu'on se demande quoi.

Sans déconner, c'est quoi ces histoires défois qu'on s'dit. A

Considérer le tout, Zut elle se sentirait assez abstentionniste, tendance misanthrope.

Que chacun reste chez soi, sans emmerder son voisin.

Chacune des gouvernances récentes, à quelques poils près, ressemblait à la précédente,

D'elles on finit par dire, ah oui, Machin était un peu moins que Truc, lequel était plus - hein tout de même - que Bidule. Quant à Scoubidou, il

Est assez, ah ça oui, on peut le dire !

La Marianne, elle en avale des couleuvres, dis ! La

Meilleure, la vipère à revers, celle qui fait réélire malgré que l'on soit si peu aimé.

En tout cas, c'est pas pire qu'avec les visionnaires du Monde heureux des Camarades, des Frères et Sœurs et autres communautarismes.

Certains le voudraient, dis, l'avènement de la démocratie réelle, ils disent, tous égaux et taxons les riches ! Bin tiens, et puis quoi ? Tous

Cas sociaux ? tous à la même mangeoire, au même abreuvoir, au même bavoir, au même mouroir ?

Et puis Zut (comme dit Zut) !

La prochaine fois non plus, je ne voterai pas. Le

Pire est de toute façon assuré : on est trop nombreux, 8 milliards !

En guerre, qu'il y en aura des pays, because la rareté naturelle ! Zut ! A

D'autres féeries je réserve mes autres fois.

Patrice Houzeau

Malo, le 25 septembre 2022.

25 septembre 2022

PARLER CLOWN COMME FANTOCHE EN CABOCHE

PARLER CLOWN COMME FANTOCHE EN CABOCHE

1.

« - Nous, dist Picrochole, n'aurons que trop mangeailles. Sommes nous icy pour manger ou pour batailler 

- Pour batailler, vrayement, dist Tourcquedillon ; mais de la pance vient la dance, et où faim regne, force exule. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXII)

Cependant que comme le dit Toucquedillon, « de la pance vient la dance » et que « où faim regne, force exule », ce qui veut dire que « où la faim règne, la force est bannie » (du latin « exulare »), je ne puis dire que j'avions trop mangeailles et de peu me conforte.

2.

« Les fouaces destroussées, comparurent davant Picrochole les ducs de Menuail, comte Spadassin et capitaine Merdaille »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII)

Qui destrousse fouaces se fait graisse et tombe en disgrace, et comme Picrochole, devra guerre mener pour éviter d'estre disgracié et recourra à ducs de peu et capitaine Merdaille, autant que Poutine envoya de Russie de soldats honteux pour s'aller se faire trouer en Ukraine.

3.

« (…) Le pauvre Monsieur du Pape meurt desjà de peur.

- Par ma foy (dist Picrochole), je ne lui baiseray jà sa pantofle. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII)

Cependant que l'usage fut de baiser la pantoufle du Pape quand on le visitoit, il ne faut pas mirager que le monde est à vos pieds et que suffit dire : « Peuples, vous êtes miens » pour que peuples vous soient, qu'ainsi Poutine se berlua qu'Ukraine allait le couvrir de lauriers.

4.

« - Non (dirent ilz) encores, attendez un peu. Ne soyez jamais tant soubdain à vos entreprinses. Sçavez vous que disoit Octavian Auguste ? Festina lente. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII)

Lisant que Suétone écrivoit que Octavian Auguste avoit en devise « Hâte-toi lentement », j'eûmes faim d'une fougasse à tomates et lardons, ce qui me représenta que le temps s'était mis à se hâter trop lentement pour mon appétit.

5.

« - Par la vertu (dirent ilz) non pas d'un petit poisson, un preux, un conquerent, un pretendent et aspirant à l'empire univers ne peut tousjours avoir ses aizes. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII)

Qu'un « preux, un conquerent, un pretendent et aspirant à l'empire univers ne peut tousjours avoir ses aizes », voilà ce que sait bien Poutine qui, pour ce, s'apprête à faire hécatombe de ses Russes en Ukraine et menace d'apocalypser le monde par voie nucléaire.

6.

« J'ay grand peur que toute ceste entreprinse sera semblable à la farce du pot au laict, duquel un cordouannier se faisoit riche par resverie ; puis, le pot cassé, n'eut de quoy disner. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII [Echephron])

Ainsi de Poutine, rêvant de restaurer l'Empire russe tel que Soviétiques l'avoient fait (pour le malheur des peuples), fut réduit à honte et massacre, et chien acculé, gronda fort qu'il avoit assez de testes nucléaires pour en finir avec le monde qui ne vouloit point de lui.

7.

« Dont dist Echephron :

« Et, si par cas jamais n'en retournez, car le voyage est long et pereilleux, n'est ce mieulx que dès maintenant nous repousons, sans nous mettre en ces hazars ? »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIII)

Je laisse aux hanteurs de tempêtes et passionnés des chimères lointaines les ailes pour le voyage, car au risque qu'en périple périlleux je laisse ma plume et ma peau, je préfère rester en repos, avec les livres et les mots qui y sont et qui me distraient du monde tordu.

8.

« Gymnaste et son compaignon tant chevaucherent qu'ilz rencontrerent les ennemys tous espars et mal en ordre, pillans et desrobans tout ce qu'ilz povoient »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIV)

A tant chevaucher, on rencontre les ennemis, et qui rencontre ennemi doit craindre pour sa vie, aussi se doit-il d'avoir sur lui de quoi tenir à distance et occire, voilà ce que Zut se disait en allant au marché acheter fruits, légumes, fromage frais et saucisses.

Ce que Rabelais écrit des ennemis de Gargantua trouve un écho dans la description des armées poutiniennes au début de la sale guerre de Poutine en Ukraine, alors que, partis pour vaincre en trois jours et manquant de tout, ils se firent, dit-on, pillards et meurtriers.

9.

« Pour tant, Monsieur le diable, descendez que je aye le roussin, et, si bien il ne me porte, vous, Maistre diable, me porterez, car j'ayme fort qu'un diable tel m'emporte. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXXIV [Tripet à Gymnaste])

Pour amour de ma propre peau, Seignour, j'ai grant peour,

Tant s'ébrèche le temps qu'y passe le vent comme tant on dit quand on dit

Monsieur Moi-même, ne soyez point si dégoulinant comme crème

Le diable sait que vous savez qu'il n’existe pas plus que vouivre mais que

Diable c'est tout de même avec une enchanteresse que

Descendez de là dit le fou à la Lune

Que je vous voie sur toutes les faces

Je parle clown dans ma tête autant qu'y sonne l'épatant Köhntarkösz, qui est un album du groupe Magma de 1974, que je

Aye toujours le goût des musiques électriques et que

Le vent qui passe dans le vivant assez m'époustoufle D'un

Roussin trottant sur une vignette je me fais un galop de Bucéphale

Et j'ai tant de fantoches dans la caboche qu'ils s'emmêlent leurs ficelles

Si je veux ici faire court, ici je cours ! Allons, cours !

Bien dit, Bibi,

Il but une bière

Ne prit qu'un demi car

Me manque le temps d'en prendre un autre (d'ailleurs, il ne pleut plus) La

Porte est ouverte et la pluie a cessé

Vous sortez (moi aussi car je suis mon ombre)

Maistre passé,vous l'avez oublié, le

Diable est dans l'oubli Que

Me dites-vous là ? Ce Monsieur est mort !

Porterez-vous encore ce long manteau noir cet hiver ?

Car il est bien usé maintenant, ce long manteau noir

J'ayme ce long manteau noir et le porte tout de même

Fort bien mais c'est toujours trop long Suffit

Qu'un couteau vienne et que

Diable passant s'en empare et

Tel qu'en ma pomme enfin, l'éternité

M'emporte oh pas bien loin, au cimetière d'à-côté.

 

Patrice Houzeau

Malo, le 25 septembre 2022.

24 septembre 2022

POUTINE ALIMENTE-T-IL LE FEU QUI VA LE CONSUMER

POUTINE ALIMENTE-T-IL LE FEU QUI VA LE CONSUMER ?

 1.

Je ne sais pas ce que c'est exactement que cette histoire de « devoirs faits numériques » après 18 heures, mais si c'est pour faire des heures sup' non payées à la maison, c'est fermement non.

Et même si les heures sont payées, ce sera quand même non. Si nous commençons à accepter du télé-travail en dehors des heures ouvrables des établissements, nous ouvrons une porte qu'il sera ensuite difficile de refermer.

2.

Je ne sais pas si vous partagez mon sentiment, mais depuis quelques temps, j'ai l'impression que nous avons deux ministres de l’Éducation : Pap Ndiaye et le président Macron lui-même qui a l'air d'avoir des idées bien arrêtées sur le sujet... #ApprenanceAndCo.

3.

Apparemment, ça continue de mourir façon mouches autour de Poutine. Le dernier en date : Anatoly Gerashenko, l'ancien patron de l'institut de l'aviation de Moscou a fait ce 21 septembre 2022 une « chute mortelle ». Mon Dieu ! La Russie serait-elle dangereuse ?

4.

En fin de compte, avec sa sale guerre en Ukraine, Poutine passera dans les pages pour un antipathique, un tout piteux pantin plein aux as, corrompu et pourri jusqu'à la pulpe.

5.

Twitter. Un graffiti sur un mur de Saint-Pétersbourg : « Au début, tu étais indifférent à la politique et maintenant, tu es de la chair à canon. » Visiblement, tous les Russes ne sont pas dupes des mensonges de Poutine, pénible Ubu.

6.

Il se pourrait que la « mobilisation partielle » de Poutine soit plus générale que prévue. Certains pensent qu'elle dépasserait les 300 000 affichés. Soit Poutine veut faire plier l'Ukraine sous le nombre, soit il veut s'assurer que ses acquis territoriaux seront défendus.

Si Poutine a dans l'idée de submerger l'armée ukrainienne sous un déluge de feu et de multiples vagues d'assaut, alors ce sera un tel bain de sang que la réaction occidentale risque d'être très forte. Si Poutine veut assurer l'occupation des territoires conquis à l'est et dans le sud, cela signifiera que la guerre risque bien de durer longtemps encore, la Triade se refusant à reconnaître la légitimité des annexions en cours.

7.

Si je comprends bien, beaucoup des plus ou moins volontaires mobilisés russes de septembre 2022 seront envoyé d'ici très peu de temps en Ukraine. Il apparaît qu'ils seront donc fort peu formés. On imagine l'hécatombe si Poutine les envoie en première ligne.

Il est donc possible que ces plus ou moins volontaires russes soient surtout envoyés pour faire nombre dans les territoires occupés, et les défendre en cas d'offensive ukrainienne. Poutine prépare-t-il des négociations en position de force, étant donnée la crise énergétique à venir, les prix grimpant et les opinions occidentales se déchirant entre défense de nos démocraties et extrémismes pro-Poutine de gauche comme de droite ?

8.

Avec sa « mobilisation partielle », Poutine rêve-t-il d'une grande contre-offensive façon Armée rouge face aux forces de l'Allemagne nazie ? Ou n'est-ce pas plutôt l'aveu de l'échec de son armée « professionnelle » mise à mal par la résistance ukrainienne et l'armement occidental ?

Je pense plutôt que Poutine se prépare à annexer l'est et une partie du sud de l 'Ukraine et a besoin de soldats pour occuper ces territoires et mater toute résistance intérieure. Qu'arrivera-t-il dans ces territoires aux Ukrainiens fidèles à Kiev ? Le pire est-il à craindre ?

9.

Si le rouble se raffermit face à l'euro, les indices boursiers russes ont plongé ce vendredi 23 septembre 2022. Volatilité liée aux incertitudes quant au sort de l'économie russe et au coût de la sale guerre de Poutine en Ukraine ?

10.

Une utilisation du nucléaire stratégique par Poutine déclencherait une riposte simultanée de l'Occident. Poutine le sait. L'emploi du nucléaire tactique en Ukraine causerait un tel choc dans l'opinion publique mondiale que Poutine signerait probablement sa propre perte.

11.

Si, dans sa sale guerre en Ukraine, Poutine rêve d'une contre-offensive victorieuse à coups de centaines de milliers de réservistes plus ou moins volontaires, alors c'est qu'il est assez bête pour alimenter lui-même les flammes qui vont le consumer.

Patrice Houzeau

Malo, le 24 septembre 2022.

24 septembre 2022

MASQUE ET DEMASQUE

MASQUE ET DEMASQUE

1.

Si la Lune se déchaussait, c'est qu'elle pourrait mettre chaussures, chaussons et chaussettes. Si la Lune se déchaussait, c'est qu'elle aurait des pieds.

2.

« Même des fantômes des eaux, errants,

Entrent vaguer aux sphères de l'alcôve. »

(Rimbaud, « Jeune ménage »)

Les fantômes sont-ils faits de ce souffle froid qui parcourt couloirs et corridors et se fondent aux courants d'air du château ? Ou sont-ils faits de ces flammes qui, la nuit, firent de la vieille demeure un tas de secrets à jamais perdus ?

3.

« Puis, c'est la nappe, sans reflets, sans source, grise :

un vieux, dragueur, dans sa barque immobile, peine. »

(Rimbaud, « Mémoire »)

Puis-je dire que palpite la nappe sans que l'on puisse penser que sous cette nappe se trouvât quelque cœur battant, arraché et caché sous cette nappe par on ne sait quel maléfice ?

4.

« Les calculs de côté, l'inévitable descente du ciel, et la visite des souvenirs et la séance des rythmes occupent la demeure, la tête et le monde de l'esprit. »

(Rimbaud, « Jeunesse, I, Dimanche »)

Je me demande si ce que le soucieux et assez insolent persifleur, pis aussi halluciné polychrome des voyelles, le môme Arthur là, ce qu'il appelle « l'inévitable descente du ciel », ne serait-ce pas la messe, des fois ?

5.

« Sur les versants des moissons de fleurs grandes comme nos armes et nos coupes, mugissent. Des cortèges de Mabs en robes rousses, opalines, montent des ravines. »

(Rimbaud, « Villes », II)

Je bilbobeule les « Mabs en robes rousses » du poème rimbaldien. Ah ça je vous assure que je les bilbobeule, les Mabs, que je les batifole, les bigle-beugle, à en balbutier les affabules, que je les boirenbeinture, et tout ça au son du bugle, le soir, au fond des bois.

6.

« Mais fondre où fond ce nuage sans guide,

- Oh ! favorisé de ce qui est frais !

Expirer en ces violettes humides

Dont les aurores chargent ces forêts ? »

(Rimbaud, « Conclusion »)

A force de fondre, se disait Zut en reprisant ses chaussettes et songeant cocasseries, coquecigrues, sottises, à force de fondre, on finit par ne plus faire qu'une flaque d'ombre, qu'une feinte d'être, qu'un reflet fugace à une fenêtre.

7.

J'entends le mot « angéologie » et je songe à la neige des anges, aussi à Anne, qui par jeu, me jeta de la neige, bien que je ne sois point Clément Marot et qu'il pleuve plus comme vache qui pisse qu'il neige anges et blanches jonquilles.

8.

« Ma faim, Anne, Anne,

Fuis sur ton âne ; »

(Rimbaud, « Fêtes de la faim »)

« Ma faim », fichtre, sommes les êtres de la faim, nous autres... bouffons le monde... ah oui certes, nous bouffonnons... en chansons, siouplaît, « Anne, Anne »... voilà des échos d'âne... tournicoti-tournicoton-bourricoton... et pis dans l'trou qu'nous finissons, là, tout au fond.

9.

« Ce fut d'abord une étude. J'écrivais des silences, des nuits, je notais l’inexprimable. Je fixais des vertiges. »

(Rimbaud, « Alchimie du verbe »)

Pullulant d'études... multiplicateurs de signes... suspicieux des individus, sociologisant la société solidaire, la sixième solitude... ne supportant ni le salut du silence, ni la nuit misanthrope, ils pondent sur l’inexprimable, vêlent des revues, thèsent nos vertiges.

10.

« l'enfant peut regarder votre doigt, plutôt que ce qu'on désigne »

(entendu sur France Culture)

S'affament du réel, les enfants... s'miragent des possibles... ne voient que le doigt... Puis le monde, c'est chimère, sphingerie... tout est dans l’œil, le doigt, la Lune, la croix et le coq, sourire et grimace, masque et démasque.

11.

Il but un doigt de vin, pis deux doigts, pis trois, pis toute une main, pis toutes ses sœurs, et finit à quatre pattes.

12.

« Je faisais une louche enseigne d'auberge. »

(Rimbaud, « Loin des oiseaux... »)

Si je dis que je prends les mouches à la louche, peut-on soupçonner quelque bol de mouches captives que je porterais à ma bouche tel ce « maniaque zoophage », le Renfield de Dracula ?

13.

« - Un orage vint chasser le ciel. Au soir

L'eau des bois se perdait sur les sables vierges,

Le vent de Dieu jetait des glaçons aux mares ; »

(Rimbaud, « Loin des oiseaux... »)

On ne peut tenter de dompter l'orage sans songer que l'orage ne se met pas en cage. Quant à l'aspironner, vous pouvez toujours aller ronronner et cajoler la jalouse, l'orage à cheveux roux vous chassera de son ciel aussi sûrement qu'au soir suspirionnent sphinges et serpentes.

14.

« Sont-ce des airs populaires, des bouts de concerts seigneuriaux, des restants d'hymnes publics ? »

(Rimbaud, « Les ponts »)

Défois un air populaire s'empare, s'entête à vous sonner spectrale rengaine... ça vous ritournelle et fait des rappels... ou alors, « des bouts de concerts seigneuriaux » en majesté cuivrée... ou encore, des débuts d'hymnes, fanfares fantômes à flottants drapeaux.

15.

« Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. - Et je l'ai trouvée amère – Et je l'ai injuriée. »

(Rimbaud, « Une Saison en enfer »)

Il ne faut jamais jarelugonler la Beauté, laquelle alors (où blanchit la campagne) ne manquera pas de hausser ses belles épaules de divine indifférente. Si vous insistez, elle vous crachera à la jacte-sottise. Alors, vous la trouverez amère et vous l'injurierez cependant qu'elle vous rira au nez, que vous avez vilain, poil aux mains, tandis qu'elle l'a joli, poil au bigoudi.

Patrice Houzeau

Malo, le 24 septembre 2022.

Publicité
Publicité
22 septembre 2022

EN ATTENDANT LES ANNEXIONS POUTINIENNES

EN ATTENDANT LES ANNEXIONS POUTINIENNES

1.

Les trolls pro-Poutine qui disaient naguère que l'armée ukrainienne n'avait pas les moyens de lancer une contre-offensive d'envergure et de reprendre des villes occupées par les Russes, doivent tirer la tête, non.

Quant à Poutine, avec les soupçons, les témoignages et les preuves de crimes de guerre qui se multiplient, il met non seulement la Russie au ban des nations, mais il se met lui-même au ban de l'humanité. A quand un tribunal pénal international ?

2.

France. Septembre 2022, François Bayrou s'est déclaré opposé à un passage en force de la réforme des retraites (par le 49.3, ou encore en l'adossant à la réforme du financement de la sécurité sociale). Bayrou a raison. Le président Macron aurait tort de commencer son second mandat en renouant avec des tendances autoritaires dont a vu les inconséquences pendant le confinement de mars 2020.

3.

Qui contrôle les flancs peut venir à bout du centre. L'armée russe n'a pas profité des avantages acquis dans le Donbass et en direction du centre, n'a pas su refermer la mâchoire et semble contrainte à la défensive. Incompétence ? Trahisons ? Problèmes de logistique ?

4.

En fin de compte, ce qui était si redouté pendant toute la guerre froide et jusqu'au début des années 80, un conflit entre le Monde libre et la Russie, aura eu lieu en 2022 et, comme c'était à penser, tourne au désavantage de Poutine.

5.

J'entends ce 22/09/2022 sur France Inter que l'affaire Patrick Poivre d'Arvor est loin d'être terminée et qu'en raison de la « sérialité » des faits, il se pourrait que toutes les plaintes déposées contre l’ex-très puissant d'la lucarne soient en fin de compte examinées par la justice.

6.

22 septembre 2022. Tandis que bon nombre de Russes tentent d'échapper à l'obligation d'aller se faire trouer la peau en Ukraine, Poutine réitère ses menaces d'attaque nucléaire. N'y aura-t-il pas un seul homme en Russie pour arrêter ce dictateur ivre de son pouvoir ?

7.

22/09/2022. Lavrov déclare qu'il n'a aucune confiance dans la Cour Pénale Internationale. Il a raison de se méfier car, lorsqu'il y sera jugé, il risque bien de prendre cher, la voix de son maître, là...

8.

A chaque fois que j'entends parler Poutine ou l'un de ses sbires (Lavrov, Peskov, Mechkov, Etceterov...) parler de l'Ukraine, les deux mots qui toujours me viennent à l'esprit sont : « Mon cul... ».

9.

Les Russes pardonneront sans doute à Poutine sa sale guerre en Ukraine, si elle est victorieuse. Pas sûr que les Russes pardonnent et une défaite et une détérioration de leur situation économique... Peut-être assistera bientôt à une dépoutinisation de la Russie.

10.

22 septembre 2022 : Suite à la mort suspecte de Mahsa Amini, une jeune iranienne de 22 ans arrêtée par la « police des mœurs » des mollahs, les manifestations se poursuivent contre la théocratie au pouvoir.

11.

En autorisant les référendums pro-russes dans les oblasts de Luhansk, Donetsk, Zaporihzhia, Kherson, Poutine tente de court-circuiter l'Occident par une annexion rapide de ces quatre régions qui, devenant territoires russes seraient dès lors inattaquables.

Poutine pourrait dès lors considérer comme des attaques sur le sol de la Russie toute offensive ukrainienne menée dans l'une de ces quatre régions et pourrait entamer, tout en menaçant du recours à l'arme nucléaire, des négociations qui lui seraient favorables.

Jusqu'où l'Occident est-il prêt à aller dans son soutien à l'Ukraine ? Les sanctions économiques suffiraient-elles à faire chuter la dictature de Poutine, ou en tout cas à l'affaiblir de manière significative ?

Et si les annexions à venir, non reconnues ni par l'UE, ni par l'OTAN, ni par les États-Unis, ni par la Triade, ni par l'ONU, ne changeaient rien au cours de la guerre, ce coup de poker ne serait-il qu'un échec de plus de la stratégie poutinienne ?

Patrice Houzeau

Malo, le 22 septembre 2022.

22 septembre 2022

ET CE N'EST PAS SI SOT SI

ET CE N'EST PAS SI SOT SI

1.

« et le vieux bon homme Grandgousier, son pere, qui après souper se chauffe les couiles à un beau, clair et grand feu, et, attendent graisler des chastaines, escript au foyer avec un baston bruslé d'un bout dont on escharbotte le feu, faisant à sa femme et famille de beaulx contes du temps jadis. »

(Rabelais, « Gargantua », Chapitre XXVIII)

On notera que dans cette phrase de Rabelais, les mots « Alptraum » (« cauchemar » en allemand), et « saucisse », ainsi que l’expression anglaise « to squeeze someone dry » (« presser quelqu'un comme un citron ») n'apparaissent pas car ce n'est qu'ayant lu beaucoup de Rabelais dans votre journée et ayant mangé beaucoup de choucroute, que la large face du bonhomme Grandgousier peut vous cauchemarder votre nuit, tonitruant par exemple force anglo-saxonneries éructées par d'électriques casseurs de guitares et furieux défonceurs de batteries, attifés en saucisses et le chef couvert de chou fermenté. On notera aussi que ce sont des châtaignes que le père de Gargantua fait griller, et non des saucisses. Quant aux citrons, ils ne se pressent pas d'arriver.

2.

Il y a des gens qui ne sont pas gentils et policés, mais jaloux et suspicieux, à tort jaspinants, jacassants, persifleurs, mauvais joueurs, peu généreux et serre-ses-sous, sauvages et maussades, et des gens gentils et policés, point jaloux du tout et embrouilleurs de salades, qui ne jaspinent ni ne jacassent ni ne persiflent à tort, qui ne sont point mauvais joueurs, et n'étant point sauvages mais souriants, sont joyeux et généreux et ce n'est pas sot s'ils sont mangeant du saucisson, ni vain s'ils boivent du vin.

3.

« Plus juste cause de douleur naistre ne peut entre les humains que si, du lieu dont par droicture esperoient grace et benevolence, ilz recepvent ennuy et dommaige. »

(Gargantua, Chapitre XXXI, « La harangue faicte par Gallet à Picrochole »)

Je profite de cette citation de Rabelais pour rappeler que je ne crois ni au complot du covid ni à celui de je ne sais quelle organisation secrète atlantiste qui aurait pour projet de diriger le monde, cependant que je crois que la technocratie européenne a pour but de dématérialiser le plus possible les rapports humains et d'imposer l'ordinateur pour bien des gestes de notre quotidien, voulant par exemple supprimer la monnaie physique pour la remplacer par l'argent virtuel, et remplacer les guichets par l'informatique, ce qui fait que, pour bien des démarches, nous paierons deux fois : et pour l'électricité et les abonnements, et pour les frais éventuels des nombreux dossiers que la modernité du surnombre exige parce que sinon, elle n'y retrouverait point ses moutons. #TheGreatReset

4.

« Sont ce fatales destinées ou influences des astres qui voulent mettre fin à tes ayzes et repous ? »

(Gargantua, Chapitre XXXI, « La harangue faicte par Gallet à Picrochole »)

On notera que ni les rimes « et noix d'cajou », « et anciens dieux », « aux hiboux, aux joujoux », « pis t'voiler les yeux » n'apparaissent dans cette citation de Rabelais, auquel cas, cela aurait donné :

« Sont ce fatales destinées et noix d'cajou,

Ou influences des astres et anciens dieux

Qui voulent mettre fin aux hiboux, aux joujoux,

A tes ayzes et repous pis t'voiler les yeux. »

Ce qui serait aussi stupide que de vouloir envahir l'Ukraine quand on ne peut être assuré de la loyauté de ses officiers, ni de la réelle volonté des Russes d'aller se faire trouer la peau pour la plus grande gloire de Poutine et de l'oligarchie mafieuse réunis.

5.

« nous delaissant ce pendent pour houltaige les ducs de Tournemoule, de Basdefesses et de Menuail, ensemble le prince de Gratelles et le vicomte de Morpiaille. »

(Gargantua, Chapitre XXXI, « La harangue faicte par Gallet à Picrochole »)

Aristocratie burlesque. C'est par l'énumération des grotesques titres de noblesse des otages que Gargantua, dans l'attente du paiement des dommages de guerre, entend obtenir de Picrochole, que se termine la harangue de Gallet.

On remarquera que dans la liste des otages donnée par Gallet au chapitre Chapitre XXXI du « Gargantua » de Rabelais ne figurent ni ducs de Vilenie-Méluche et Darmanie-la-Sailly, ni baronne Marine de Poutine, ni vicomtesse de Vertesardine, et nul bouffon Eric, étant de peu d'intérêt.

 

Patrice Houzeau

Malo, le 22 septembre 2022.

22 septembre 2022

L'ESPRIT TROUBLÉ DE NOËL

L'ESPRIT TROUBLÉ DE NOËL

(En lisant "Quai des Orfèvres", de Stanislas-André Steeman)

1.

Enigme. Noël Martin, après le crime qu'il croit avoir commis, constate que Belle demeure « pour lui la même vivante énigme que par le passé ». Certains êtres résistent à l’événement. Peut-être aussi que l'énigme « Belle » n'est jamais que dans la tête de Noël Martin. (cf « Quai des Orfèvres », de Steeman)

2.

A ce moment de ma lecture (le chapitre XVI de « Quai des Orfèvres », de Steeman), je constate l'étrangeté de l'onomastique du roman : Noël Martin (nativité ? Saint Martin, la figure du partage ?), Belle (comme le péché ?), le commissaire Maria, le prénom Judas de la victime, le peintre Klein (le « petit », le pauvre homme, dont la femme, Claire, (la clarté ? la lumière?) est morte « au terme d'une grossesse difficile » )...

3.

« Que n'eût-il donné pour remonter le cours du temps, redevenir le Noël d'alors, libre encore de ses actes ? »

(Stanislas-André Steeman, « Quai des Orfèvres)

Le cours du temps. Noël éprouve ce sentiment commun à tous les êtres qui se sentent coincés, piégés par leur propre acte, cette nostalgie de la liberté perdue, du libre-arbitre gâché, en l'occurrence par un crime dont il s'attend à être accusé.

4.

Ombre. C'est alors que Noël Martin, confondu par le commissaire Maria, et pensant qu'il va être arrêté le lendemain matin, sort de chez lui, qu'un « homme se détacha de l'ombre […] et lui emboîta le pas ». Menace ou surveillance ?

Zut se détacha de l'ombre comme sortant de chez elle.

C'était l'ombre que projetait quelque muraille, n'ayant plus de films de Charlot, le petit homme qui trottine drolatique en costume élimé, ce qui eût pu amuser.

Zut emboîta sans doute mon pas, et je me demande parfois ce que Zut peut bien faire de toutes ces boîtes pleines de pas perdus.

5.

« Des éclats inégaux de gramophone lui parvenaient, étouffés, des profondeurs de l'appartement et il regretta de ne pas s'être annoncé par téléphone. » (Steeman)

Gramophone. Ce sont des « éclats inégaux de gramophone » qui parviennent aux oreilles de Noël Martin alors qu'il se trouve devant la porte de l'appartement de Renée, donnant à penser à Noël que celle à qui il rend visite n'est peut-être pas seule.

Les étouffeurs de gramophone sont dans l'air. Ils portent de longs étouffoirs invisibles.

Ils ont aussi de grands ciseaux à couper les oreilles. Mais ils ne les emploient guère qu'avec les peintres troublés.

Les étouffeurs de gramophone pénètrent jusque dans les « profondeurs » des appartements où ils traquent curieuses baroques, élans du romantisme, zèbres du jazz, et excentriques électriques.

Les girafes ne hululent pas. Sinon, on les appellerait « hiboux ».

6.

Incidents. C'est alors que Renée, sans même finir sa phrase (« Belle sait-elle que...?) demande à Noël Martin si Belle sait qu'il a tué un homme, son amant peut-être, que Noël se rappelle des récents « incidents de leur vie quotidienne, à Belle et à lui. »

On notera que nul éléphant ne vient interrompre la phrase de Renée, laquelle n'est pas en train de fumer la pipe.

D'ailleurs, ce n'est pas parce que vous fumez la pipe que les éléphants vous interrompent.

Ce sont les interrupteurs ad hoc qui suspendent vos phrases. Et comme on dit « un ange passe », ils n'ont nul besoin d'éléphants.

Du reste, la plupart du temps, on n'a pas besoin d'éléphants dans la vie quotidienne qu'on mène à Paris et dans les pages d'un roman de Stanislas-André Steeman.

7.

« De rues transversales jaillissaient à tout instant des ombres aux gestes désordonnés. Il put se jeter de côté pour en éviter une qui s'était soudain dressée devant lui, gigantesque. » (Steeman)

Ombres. Au chapitre XVIII, Noël est en proie aux ombres : l'ombre policière qui le suit, et les ombres dont il pense, dans sa panique, qu'envoyées par une puissance supérieure, elles veulent s'emparer de lui pour le jeter en enfer.

Les rues dont jaillissent les ombres qui veulent s'emparer de Noël sont « transversales » et non pas zébrées, carnavalesques ou philharmoniques.

Nul animal à rayures, nul masque grotesque, nulle compagnie de nobles violons.

Il n'y a que, paniqué par le sentiment de sa propre culpabilité, l'homme seul et ses ombres.

8.

« ces silences qu'elle refermait sur elle comme une porte » (Steeman)

Porte. C'est à une porte qui se referme que Stanislas-André Steeman dans « Quai des Orfèvres » compare les « silences » soudains de Belle en présence de son compagnon Noël Martin, silences qui donnent à penser que Belle serait persuadée de la culpabilité de Noël.

9.

A la fin de « Quai des Orfèvres », de Stanislas-André Steeman, Renée d'Humain, la bien nommée, l'humaine, le cœur, la trouble, vient se tenir au côté de Noël Martin.

Patrice Houzeau

Malo, le 22 septembre 2022.

19 septembre 2022

BONHOMME ALBATROS

BONHOMME ALBATROS

(Librement adapté de « L'albatros », de Baudelaire)

Il s'amusait souvent comme hommes d'équipage et ainsi se multipliait. Comme il était distrait, il perdit plusieurs de ses semblables.

A prendre des albatros et autres oiseaux des mers, quand ce n'était pas la lune pour son doigt et son doigt pour son nez, il perdit tant et tant de temps qu'il fut craché.

Il ne fut pas « indolent compagnon de voyage » mais plutôt explosif comme poudre en baril.

Et s'il était glissant comme un navire, il n'en préférait pas moins rester sur le plancher des vaches qui regardent passer les trains d'écume.

 

Déposé sur les planches, il histrionnait, postillonnait, apostrophait les invisibles.

Ni roi, ni azur, son domaine était maladroit et si honteux qu'il se laissait dévorer par les ombres, lesquelles faisaient la grimace.

Il aimait le son « an » comme dans « leurs grandes ailes blanches », comme dans « vent », comme dans « que le vent tourmente », comme dans « éléphant » et « loup blanc », comme dans « assonance » et « maman... maman... maman », telle la plainte qui jamais ne s'éteint.

S'il portait des avirons, c'était par amour des sports nautiques, mais, éloigné des fleuves et rivières, drolatique de le voir déambuler dans les environs avec ses deux bâtons aux côtés, désœuvré, décoiffé, débarqué.

 

Il ne fit aucun voyage avec des ailes, ne vota ni gauche, ni veule.

S'il fut beau, ce fut avec comique, et s'il fut laid, ce fut avec panache.

On le voyait parfois, le brûle-gueule au bec et si on lui faisait remarquer qu'il laissait sortir sa chemise de son pantalon, il répondait que sa chemise était bien libre de sortir comme elle le voulait, pourvu qu'elle soit rentrée pour le dîner.

Parfois, il se mimait en boitant, et devant fuir quolibets, caillasses et cailloux, il en tirait des morales misanthropes.

 

Ni Poète, ni prince, il regardait défiler au-dessus de sa tête les nuées, se disant : Que d'oies ! Que d'oies !

Il n'eut jamais l'idée de « hanter la tempête », laquelle avait déjà fort à faire avec son crâne et ne pratiqua pas l'art patient du tir à l'arc.

S'étant exilé lui-même, il s'attendait parfois aux huées.

Les gens parfois haussaient les épaules, s'amusaient du sourire, fronçaient le sourcil tandis qu'il s'essayait à marcher avec les ailes d'un géant qu'il s'était imaginé.

 

Patrice Houzeau

Malo, le 19 septembre 2022.

18 septembre 2022

UN CONTREVERS SUIVI DE 5 NOTES SUR LE QUAI DES ORFEVRES DE STEEMAN

UN CONTREVERS SUIVI DE 5 NOTES SUR LE QUAI DES ORFEVRES DE STEEMAN

1.

« Les visiteurs apparaissaient soudain derrière la porte vitrée, comme pourvus d'échasses ou comme tombés du ciel, et il n'y avait plus qu'à les faire entrer en grimaçant un sourire, quelque importune que fût parfois leur venue. »

(Stanislas-André Steeman, « Quai des Orfèvres »)

Les Visiteurs du soir, c'est un film ça non ? Aussi une série avec des extra-terrestres, des « Visiteurs », qui enquiquinent cosmiquement un certain David Vincent, ça non ? Les Visiteurs, c'est pas le film avec Jean Reno et Christian Clavier dans les rôles de Geoffroy de Montmirail et de Jacquouille la fripouille, venus du féodal par les couloirs du temps et semant la pagaille dans notre modernité bidulaire ? Ils

Apparaissaient donc les Visiteurs, moi je ne les ai jamais vus.

Soudain ils sont là m'a-t-on dit, ombres

Derrière la porte, dans un temps suspendu et un noir de panne ;

La porte alors s'ouvre, sans que personne l'ait touchée, la

Porte s'ouvre lentement, mais vous, vous êtes tétanisé, les yeux fixés vers l'inconnu qui s'avance... Si c'est une porte

Vitrée, vous les voyez, les silhouettes étranges, sinon

Comme vous ne pouvez pas voir à travers la porte, alors vous ne les voyez pas, les Zôtres

Pourvus d'une tête à jouer dans une publicité pour adolescents que le kitsch alien épate (ah tiens, j'ai mangé des pâtes aux champignons ce soir), si vert latex et si longilignement hauts qu'vous les diriez

D'échasses montés, grandes tiges,

Ou tout droit

Tombés dans leur soucoupe volante à faire des témoignages époustouflants dans les lucarnes (avec pilote d'avion émérite, gendarme à qui on ne la fait pas, Madame Sainfoin, la bouchère de Vigorgne-en-Pâtis, et l'inéluctable ufologue à tête carrée), tombés donc

Du grand là-haut du

Ciel où les étoiles se frisent les moustaches parce qu'elles sont coquettes.

2.

Robot. « une manière de robot au mécanisme secret » : c'est ainsi que le peintre Klein dépeint le collectionneur Judas Weyl dans « Quai des Orfèvres », de Stanislas-André Steeman, au moment où Klein désire racheter une de ses toiles et que Weyl attend quelques instants avant de décliner l'offre.

3.

Le temps et l'effort. Il n'est pas indifférent que, dans « Quai des Orfèvres », de Stanislas-André Steeman, ce soit le commissaire chargé d'élucider la mort violente de Judas Weyl, qui soit celui qui « connaisse la valeur du temps et de l'effort » et que cela soit exprimé par des « pas mesurés », « les pas lourds, puissants », ébranlant l'escalier, pesant sur le réel, les pas « d'un homme que rien ne presse ». Le commissaire Maria est le représentant de l'Ordre. Il a le temps et la justice pour lui.

4.

Monstrueux. Le fait que, dans « Quai des Orfèvres », de Stanislas-André Steeman, le peintre Noël Martin, pour complaire à Belle, accepte une invitation à une soirée, alors que son confrère, le peintre Klein, se trouve « en cellule, en cellule par sa faute » à lui, Noël Martin, persuadé d'avoir tué Judas Weyl et laissant donc accuser un innocent à sa place.

5.

« Princesses mortes ». C'est à des « princesses mortes » que le peintre Noël Martin, assez mélancoliquement, compare les robes du soir que, alors qu'ils étaient fiancés, Belle lui montrait, lui en promettant l’exclusivité.

6.

Vertu et fidélité. « Tugend ist wenn keiner kommt ; Treue, wenn kein zweiter kommt. » proverbe viennois (selon Stanislas-André Steeman qui, à propos des relations entre Noël et Belle, le cite dans « Quai des Orfèvres ».

Traduction donnée par Steeman : « La vertu, c'est quand nul ne vient ; la fidélité, c'est quand il n'en vient pas un second. »

Patrice Houzeau

Malo, le 18 septembre 2022.

Publicité
Publicité
1 2 3 > >>
BREFS ET AUTRES
  • Blogs de brefs, ça cause humeur du jour, ironie et politique, littérature parfois, un peu de tout en fait en tirant la langue aux grands pompeux et à leurs mots trombones, et puis zut alors!
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité