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3 juillet 2020

LA POINTE DU JEU

LA POINTE DU JEU

 

  1. « Avec Philippe Nicaud dans le rôle de Rouletabille. Réalisation : Jean-Jacques Vierne ». De la nostalgie tout ça, de la nostalgie plein la bille. Le soleil à travers les volets de ma chambre en 1983. On ne remonte pas ce qui nous démonte. Une main s'abat sur la mouche.

  2. Peut-on dire qu'une langue est un instrument au sens où l'on dit que le piano est un instrument de musique ? En ce sens, les règles d'une langue seraient comme un solfège, et la littérature serait le champ des possibles ouvert par la grammaire.

  3. De même que le solfège précède la musique, que les règles du jeu précèdent la partie, la grammaire précède la littérature. Les règles ne codent qu'elles-mêmes. Les règles ne codent ni pièce de musique, ni partie d'échecs, ni poème. Elles sont la clé de cette parade sauvage.

  4. Ne codant qu'elles-mêmes, les règles de chaque jeu ont leur propre code. Solfège, grammaire, mathématiques, logique, langue des signes, etc..., autant de systèmes de notation des règles de ces jeux qui permettent de composer, de raisonner, de communiquer, de signifier.

  5. De même que le solfège n'est pas la musique, mais le système de notation d'un type particulier de musique, une langue n'est pas le langage mais l'ensemble des usages d'une langue. Dès lors, comment définir la musique, comment définir le langage autrement que comme les êtres d'une suite de sons et de syllabes ?

  6. Il est, comme l'écrit Wittgenstein, dans ses « Investigations philosophiques » (par. 569) que « les calculs dans un système de mesure » pourraient exiger « plus de temps et d'efforts que nous n'en pouvons fournir. » Tous les codes ne se valent pas.

  7. Ce à quoi renvoient les codes sociaux, c'est aux manières d'être humain. Le paradoxe étant que l'abolition de la peine de mort permet à d'épouvantables meurtriers de continuer à vivre cependant que nous vendons des armes qui tuent des innocents chaque jour.

  8. Il y aurait, comme le remarque Wittgenstein (cf « Investigations philosophiques, 564) « dans le jeu des règles essentielles et non essentielles ». Ainsi des codes sociaux qui vont des manières de se moucher aux décrets et lois, de l'échange d'opinions aux conflits sociaux.

  9. « Le jeu, aimerais-je dire, n'a pas seulement ses règles, mais aussi sa pointe. » (Wittgenstein, « Investigations philosophiques », 564). Que puis-je comprendre par ce mot de « pointe » ? Serait-ce l'esprit, l'être du jeu ? Ce qu'il révèle de l'humain : la maîtrise, la virtuosité, le grand style.

  10. L'administration prépare la partie, en éclaire les règles, les redéfinit au besoin, mais c'est toujours la maîtrise qui exécute le coup. Ecrivant ceci, j'ai en tête ces parties d'échecs dont chaque coup, dès le début de la partie, est prévisible jusqu'à l'inédit, le trait de génie, le coup de maître.

  11. Il y a sans doute un point où l'hypertrophie des règlements finit par étouffer la maîtrise. C'est là où la « pointe » s'émousse et où l'institution devient ce mammouth obèse, cette machine à circulaires, de plus en lourde, bavarde, prétentieuse, coûteuse, inefficace.

Patrice Houzeau
Malo, le 3 juillet 2020.

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