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BREFS ET AUTRES
4 août 2023

L'INFINI EST-IL UN OPTIMISME ?

L'INFINI EST-IL UN OPTIMISME ?

1.
« Science avec patience,
Le supplice est sûr. »
(Rimbaud, « L'éternité »)

« Patience dans l'azur ! »
(Valéry, « Palme »)

Et donc : « Patience dans l'azur / Le supplice est sûr ».

2.
A : « - L'infini est une flèche.
B : L'infini n'est pas une flèche.
A : Oui, on peut aussi le dire ainsi. »

Note : le mot « infini » remplace ici le mot « être » du witz original.

3.
Peut-on définir l'infini comme ce qui est toujours plus infini (ou moins fini) que lui-même? Le verbe définir me pose ici problème, mais je ne sais pas pourquoi.
L'infini est-il un « toujours plus » ? Une expansion « à l'infini » ? Une suite de 9 derrière le 0 et sa virgule , suite qui est aussi 1 ? Le réel est-il toujours plus que lui-même ?

4.
L'infini est-il l'ensemble de tout ce qui est (les étants autant que les existants?). Autrement dit, l'infini est-il en grande partie le fruit de notre imagination ?

5.
Si je décide d’exclure de ma définition de l'infini l'ensemble des étants dont l’existence n'est pas prouvée ou indémontrable, est-ce vraiment l'infini que je définis ou seulement le champ des connaissances humaines ? Autrement dit, l'infini ne serait-il jamais qu'une encyclopédie à laquelle l'humain ajoute toujours plus d'informations ?
Qu'une vie d'humain ne permette pas de tout savoir prouve seulement notre incompétence, et non pas l’existence d'un savoir infini à expliciter.
Exclure d'une définition de l'infini l'ensemble de ce qui n'est pas prouvé ou indémontrable ne revient-il pas à fermer la porte et à rester enfermé dans la demeure des certitudes, et si jamais ces certitudes s'écroulaient, que resterait-il de ma maison ?

6.
Je suis un piètre joueur d'échecs parce que je ne connais pas assez les tactiques qu'un bon joueur emploie pour pouvoir remporter la partie. Si je connaissais ces règles, serais-je un meilleur joueur ? Intuitivement, pédagogiquement, on serait tenté de répondre par l'affirmative. J'ai plutôt l'impression que ce n'est absolument pas prouvé et qu'il y a autant de chances que je sois un meilleur joueur que de risques que je ne sois pas un meilleur joueur. D'autres paramètres entrent en jeu, qui tiennent sans doute à ce que nous appelons généralement l'inconscient et donc les déterminismes.
L'ultra-pédagogisme envisagera dès lors de changer les conditions des déterminismes (« changer la société pour changer l'école ») afin que la connaissance ne soit pas parasitée. Dès lors, le projet pédagogique devient politique, singulièrement politique, voire intrusif, voire non-démocratique, et repose sur l'idée qu'il y aurait des conditions sociales et sociétales qui permettraient presque à coup sûr que le bon élève devienne un bon étudiant qui lui-même deviendrait un professionnel efficace et un humain formidable. Mais les changements jugés nécessaires à ces évolutions reposant eux-mêmes sur des déterminismes et des mécanismes inconscients, on voit bien que le serpent se mord la queue, d'où la tentation de faire de la pédagogie une science, c'est-à-dire de tenter de faire abstraction des déterminismes et de poser sottement qu'améliorer la forme de la transmission en permettant une meilleure acquisition du contenu pourrait suffire à la réussite du projet pédagogique réel : « changer la société ».

7.
Extrapolons : est-ce que parce que les humains comprennent de mieux en mieux l'univers dans lequel ils s'agitent qu'ils seront meilleurs et réussiront à régler les problèmes de telle sorte que l'humanité sera, quelque jour, lointain, heureuse, rationnelle et pacifiée ? Les humanistes diront que oui. Je pense au contraire que ce n'est absolument pas prouvé. Que l'humain soit toujours plus savant, c'est une évidence ; qu'il soit plus sage, l'honnêteté nous oblige à reconnaître que non.
Certains diront que l'humain ne peut être plus sage tant que le problème de la rareté naturelle ne sera pas résolu, et que c'est donc une question politique.
D'autres diront que c'est dans le transhumanisme que l'humain trouvera son salut.
Mais il se pourrait aussi que la suffisance des biens et l'amélioration des capacités individuelles (« l'humanité augmentée », revue et corrigée) ne soient que de simples améliorations techniques qui n'empêcheraient en rien ni les conflits ni les bêtises, non pas que telle soit notre nature, mais parce que telle est notre diversité. Disons qu'un monde heureux qui, à condition que le Ciel ne nous tombe pas sur la tête, adviendrait fatalement, comme le résultat logique de nos progrès scientifiques et politiques, n'est absolument pas prouvé.

Patrice Houzeau
Malo, le 4 août 2023.

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