DU SYNDROME DU CONQUERANT

DU SYNDROME DU CONQUERANT

1.
Les peuples qui serrent les dents finissent toujours par mordre.
Les peuples qui serrent les poings finissent toujours par frapper.
Les peuples qui se taisent finissent toujours par hurler.

2.
Est-il vrai que, comme l'écrit dans « Le Point » du 15 février 2024 Nicolas Baverez, essayiste dit « décliniste », que « depuis la pandémie, l'économie française est à l'arrêt » ? Pouvoir d'achat et consommation en baisse, entreprises toujours trop taxées, hausse du chômage, du nombre de défaillances d'entreprises, qui ne resterait inférieur qu'à celui de la période pré-pandémique qu'en raison du « quoi qu'il en coûte » et des différents « boucliers » mis en place par l'Etat, crises à répétition (immobilier, agriculture,...), soutien financier de l'apprentissage par la puissance publique (sinon, pas sûr que les entreprises seraient si nombreuses à recruter des apprentis...), dialogue social qui tourne souvent au bras-de-fer et où le gouvernement semble de plus en plus mal à l'aise, bref, la situation économique de la France est-elle si mauvaise qu'elle prélude à des élections présidentielles remportées, en fin de compte, par le RN et Marine Le Pen ? A vrai dire, je ne sais pas, tant le discours officiel semble rassurant et si différent de ce que disent bien des commentateurs. Quant à la croissance du pays, si je comprends bien, elle reste assez limitée, et peut-être même en trompe-l’œil.

3.
18 février 2024. J'entends sur France Inter que Poutine vient d'affirmer que « le sort de la guerre en Ukraine était une question de vie ou de mort pour la Russie. » Pure rhétorique à usage interne ou affirmation du caractère existentiel de ce qui est avant tout une guerre d'agression ? Dans le second cas, cela signifie que Poutine ne négociera jamais avec l'Ukraine et l'Occident un retrait de ses troupes. Et donc, que si Poutine met la main sur l'Ukraine, il faudra s'attendre à ce qu'il soit plus tard amené à menacer la Moldavie, les Etats baltes, la Pologne, la Finlande, la Suède et sans doute aucun la coalition de l'OTAN. Cela ne peut que rappeler la fuite en avant de Hitler dans sa volonté de dominer l'Europe. Cela paraît insensé, mais il semble que Poutine soit depuis un certain temps déjà tombé dans l'hybris que donne parfois un trop grand pouvoir et l'illusion qu'il serait l'homme providentiel de la Russie.

4.

Une partie du débat sur le conflit russo-ukrainien repose sur la question : Poutine a-t-il été à l'initiative d'une guerre d'agression ou d'une guerre préventive ? Le plus grand pays du monde (17 millions de km²) était-il réellement menacé par l'Ukraine ? par l'OTAN ? Par les extra-terrestres alliés aux États-uniens? Autrement dit, Poutine a-t-il perdu le sens de la complexité du monde et pour lui tout ne se résumerait-il pas à une lutte manichéenne entre démocraties libérales « décadentes » et sainte Russie eurasiate ?

5.
Dans sa prise de position du 17 février 2024, le président Macron dénonce la guerre de propagande, de désinformation et de cyberattaques que la Russie de Poutine mène contre nous. N'oublions pas l'entrisme et l'influence pro-Poutine à l’œuvre dans certains médias, certains partis, certaines institutions.
6.
20 février 2028. 1 euro = 99, 80 roubles. Certes, le rouble a, depuis quelques mois, cessé de chuter mais reste très faible. Les indices boursiers russes sont tous en baisse ce jour et si l'armée de Poutine progresse un peu, elle est encore loin de mettre à bas le régime de Kiev, la détermination du président Zelensky et la volonté de bon nombre de pays européens à soutenir l'Ukraine étant intactes. En outre, les sanctions économiques, si décriées par la FI et le RN, mettent sérieusement à mal une économie russe qui manque de main d’œuvre et est ralentie par les actions de sabotage de la résistance intérieure et la menace des frappes ukrainiennes.
De plus, l'incertitude quant aux circonstances de la mort d'Alexeï Navalny dessert les intérêts de Poutine ; si la mort de Navalny est due à ses conditions de détention, cela ne peut que confirmer la violence du régime ; si Alexeï Navalny a été exécuté, c'est un aveu de faiblesse et le signe d'une certaine panique au Kremlin.
7.
Alexandre le Grand, Jules César, Attila, Napoléon, Hitler, Poutine se caractériseraient-ils tous et avant tout, par un syndrome du conquérant, qui masquerait en fait des tendances suicidaires profondes ?

Patrice Houzeau
Malo, le 21 février 2024.