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BREFS ET AUTRES
27 août 2022

IL NE FAUT JAMAIS SORTIR SANS SON !

IL NE FAUT JAMAIS SORTIR SANS SON !

 

1.

« Elle était déchaussée, elle était décoiffée,

Assise, les pieds nus, parmi les joncs penchants ; »

(Victor Hugo)

La fille, qu'évoque Hugo, elle « était déchaussée, elle était décoiffée ».

Nous savons donc qu'elle avait « les pieds nus » (ce que le poète précise, défois qu'on n'aurait pas compris, défois qu'il aurait évoqué quelque dent).

Nous apprenons en outre que cette personne n'est pas la Cantatrice chauve. Quant aux « joncs penchants », on ne saura jamais ce qu'ils cherchaient.

Une personne qui a les pieds nus et qui n'est pas la Cantatrice chauve peut être n'importe qui. Et ça, quand j'y songe, je m'en moque.

2.

Je lis sur Internet que Poutine vient de signer un décret pour « agrandir l'armée russe ».

Cela prouve une bonne fois pour toutes que Poutine est encore en capacité de signer de son nom, et, de plus, qu'il a encore au moins une main.

Il faut faire taire les rumeurs concernant la santé du Président Poutine.

Il va très bien et il grandit de jour en jour.

Et c'est pour ça qu'il lui faut une armée plus grande, parce qu'à force de grandir, Poutine devient plus grand que le Kremlin, plus grand que Moscou, plus grand que la Russie, plus grand que l'Eurasie, plus grand que le Monde, plus grand que l'Univers.

Poutine est infiniment grand. C'est même pour ça qu'on ne sait plus où le mettre.

Mais on s'active à trouver des solutions, comme dit Jo le bûcheron.

3.

« Mais, d'après ce que tu m'écris, on ne me reproche pas seulement d'être mordant, on me reproche encore d'être impie. »

(Lettre d'Erasme à Dorpius)

Erasme voit bien qu'on lui reproche d'être mordant.

Ah ça, il en avait dans la mâchoire, Erasme, et comme en plus, on disoit en maint endroit qu'il estoit impie comme une voleuse, je ne vous dis pas ce qu'il pouvait bouffer.

4.

« L'été de la longue clarté, il filera dans les ténèbres, par les persiennes de minuit. »

(René Char, « Le martinet »)

Le poète évoque ici « l'été de la longue clarté », qui serait un titre possible pour un film dont je ne sais pas ce qu'il raconterait car je ne suis pas scénariste.

On sait au moins que le personnage « filera dans les ténèbres ». C'est donc tout un mystère, s''t'homme-là.

Et comme ce sera par « les persiennes de minuit » qu'il « filera dans les ténèbres », je pense que le personnage doit être une entité souple des confins cosmiques, du genre à se glisser partout et à serpenter dans le réel comme une saucisse dans la choucroute, quoique l'image de la saucisse qui serpente est assez rare, je vous l'accorde et on s'en moque.

5.

On écrit le substantif « tort » avec un « t », et non avec un « d », sinon on ne dirait pas « et le tort tue », mais « le tordu », qu'on se demanderait de quel tordu qu'on cause, et donc on ne s'en sortirait plus.

6.

« Je ne pouvais moi-même en détourner mes regards et m'empêcher de suivre l'aiguille, qui marchait vers minuit à pas imperceptibles. »

(Théophile Gautier, « La cafetière »)

J'avais beau les sermonner, mes regards ne pouvaient s'en détourner.

Allons, leur dis-je, n'avez-vous point autre chose à reluquer ?

Il est vrai qu'il n'y avait dans la pièce ni jolie fille aux yeux verts, ni habile illusionniste faisant sortir de son chapeau quelque nouvelle réforme de l'éducation nationale fort propre à ébahir le nigaud et à faire sourciller le syndicat.

J'appelais Blanquer mais mon âne ne vint pas.

Comme il était question d'aiguille, je pensais au mot « anguille », laquelle, marchait vers minuit.

Cette aiguille qui était une anguille était en fait un lézard.

Vous voyez bien que vous vous faites berluer, dis-je à mes regards, lesquels, sans même se tourner vers moi, continuaient à fixer le mot qui me manque et qui, inéluctablement, allait vers minuit comme on va à un rendez-vous dont on sait qu'on ne reviendra pas.

7.

« Elle portait un manteau de soie d'araignée passé de mode qui la faisait ressembler à une chenille enroulée dans un cocon qu'elle n'a pas filé elle-même ; elle avait l'air d'y être enveloppée. »

(Philip K. Dick traduit par Alain Dorémieux, « Ubik »)

Il y a déjà dans cette phrase une araignée et une chenille, comment voulez-vous que j'y fasse rentrer un rhinocéros ?, fit Zut à son éditeur.

Je ne vous demande pas d'y faire rentrer un rhinocéros, puisque je n’existe pas, ne lui répondit-il pas.

Que me dites-vous là !, s’exclama Zut qui n'avait pas oublié son point d’exclamation (Il ne faut jamais sortir sans son point d’exclamation, défois, on est surpris).

Mais dans ce cas, ajouta Zut, puisqu'il est question de « manteau de soie » et « de cocon », à défaut de rhinocéros, on pourrait y placer quelque écharpe évanescente dans l'air parfumé d'un soir de villégiature lointaine.

Faites donc, fit l'araignée dévorant sa proie.

Patrice Houzeau

Malo, le 27 août 2022.

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