EN LICE LA FARCE PIS TOUTE POURRITE
EN LICE LA FARCE PIS TOUTE POURRITE
1.
« Pouvons-nous étouffer le vieux, le long Remords,
Qui vit, s'agite et se tortille,
Et se nourrit de nous comme le ver des morts,
Comme du chêne la chenille ?
Pouvons-nous étouffer l'implacable Remords ?
(Baudelaire, « L'irréparable »)
Pour étouffer ce « vieux » et « long Remords », le mieux, c'est de :
- Essayer de ne plus y penser en multipliant les occupations ?
- Le noyer dans la picole ?
- Apprendre des poèmes par cœur ?
- Se plonger dans la prière et s'agiter la transcendance ?
- Collectionner petits mickeys et albums des Pieds Nickelés ?
- Se distraire en rédigeant un mémoire sur la sotte réforme Blanquer ?
- Devenir maître des marionnettes dans un manga ?
- L'envoyer se faire cuire un œuf dans l'Absolu ?
- Se dire qu'on a encore de la chance, qu'on aurait pu finir par être aussi boursouflé, pompeux et incompétent qu'un député, voire un ministre, voire un ministre de l'Education nationale du type à pondre de sottes réformes apprenantes ?
2.
« Le Diable a tout éteint aux carreaux de l'Auberge ! »
(Baudelaire, « L'irréparable »)
Si le Diable a tout éteint aux carreaux de l'Auberge, c'est :
- que le Diable ne se plaît que dans les ténèbres, sinon il ferait du show-biz, ou de la politique.
- Par souci d'économie.
- que l'Auberge s'appelait « L'Espérance », et ça l'énervait fort, ça, le cornu colérique, c'est pour ça.
3.
Pensez-vous que cette vie qu'on vit :
- N'a pas de sens ?
- Peut être très agréable, question de chance ?
- Est stupide et violente ?
- Est stupide, violente et injuste ?
- Est stupide, violente, injuste et pue du ?
- Risible et cruelle comme un dictateur russe ?
- Vouée à l'échec ?
- Ne s'use que si l'on s'en sert ?
- Qu'il faut bien l'agiter avant de s'en servir ?
- Qu'on en a qu'une, alors faut faire attention, défois qu'il y en aurait, des zôtres et des gens là, des petits chefs et cheffesses qui voudraient vous la pourrir,pis vous la bouffer, avec toutes leurs dents là ?
- Est une mauvaise blague, toute pourrite farce, du Céline même pas écrit, du Kafka même pas pensé ?
- Est trop courte pour se poser des questions à la France Inter genre « ce matin, nous allons nous demander si » (je t'en ficherai moi des « nous allons nous demander si », passe-nous un bon vieux rock n' roll plutôt, eh banane à blablas !)
4.
« C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent ! »
(Baudelaire, « Au lecteur »)
Que vous inspire cette exclamation baudelairienne ?
- Que le Diable ne se contente pas d'éteindre les carreaux des auberges, mais itou qu'il nous prend pour des marionnettes ?
- Que le Diable fait de la politique ?
- Que le Diable est au gouvernement ?
- Que lorsqu'on soupe à la table du Diable, il faut se munir d'une très longue louche ?
- Que le Diable est l'autre nom du Maître des marionnettes humaines ?
- Que le monde est un spectacle diabolique ?
- Qu'il ne faut dès lors pas s'étonner, si, comme l'écrit Baudelaire :
« Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent. »
Qu'on s'en rend même pas compte qu'on est foutus.
5.
« Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices, »
(Baudelaire, « Au lecteur »)
Ces accumulations de noms d'féroces et d'adjectifs lovecraftiens ont-elles pour but de :
- Fasciner le lecteur ?
- Se faire gondoler le lecteur ?
- Chatouiller, grattouiller, mâchouiller, patouiller, époustoufler le lecteur ?
- Tenter de rendre compte de l'effet produit par certaines pièces de hard rock très grondant façon Black Sabbath, Led Zeppelin, Iron Maiden, ACDC ?
- Ecœurer le lecteur, lequel d'habitude ne lit pas ce genre de sottises, lui préférant les pronostics des courses de dadas ?
- Ne servir à rien d'autre qu'à faire son intéressant en alignant des noms de bestioles désagréables ?
- Apprendre au lecteur curieux, par une note de bas de page que ne manquera pas de placer l'universitaire consciencieux, que le mot « lice » désigne une « chienne reproductrice, femelle du chien de chasse », même que le latin populaire « lycisca » désignait « une chienne engendrée par l'accouplement d'un loup et d'une chienne » ?
- Servir de prélude à l’avènement des autres dieux du monde qu'on voit pas mais dont H.P. Lovecraft contera plus tard les intrusions et autres jaillissements monstrueux, glapissants, hurlants, grognants, rampants ?
- Ça c'est sûr que si tu glisses dessus, tu te casses une guibolle, si c'est pas les deux.
Patrice Houzeau
Malo, le 11 septembre 2023.