DE L'AMBIGUITE DU BIGOUDI
DE L'AMBIGUITE DU BIGOUDI
1.
« J'ai les yeux de l'épervier pour le jour, du hibou pour la nuit... et du bouc pour les rêves... »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [l'aveugle])
Cette phrase est-elle :
- poétique ?
- Oculaire ?
- Anthologique ?
- Zoologique ?
- Aussi ambiguë qu'un bigoudi qui se prendrait pour un accordéon ?
2.
« Vous êtes injuste, baronne, et vous le savez ! Je lui aurais tout appris de ma science, s'il m'en avait laissé le temps !...»
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Germain, serviteur d'Ariane de Troïl])
De quelle science s'agit-il ?
- l'art de réussir la carbonnade flamande ?
- L'art de faire passer ses contemporains de vie à trépas grâce à quelque botte fatale ?
- L'art de savoir dessiner des corps en mouvement, (ici les mouvements que font les escrimeurs en leurs assauts) tels que Germain se fendant et obligeant ainsi Ariane à se pencher en arrière ?
- L'art de savoir frapper autre chose que des ombres ?
- L'art d'illustrer le « Ars longa, vita brevis » qui est notre commune mesure ?
3.
« Et si vous vous trompiez ? Si l'épervier renonçait à montrer son bec ?... »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Louis XIII])
Cette interrogation signifie-t-elle que :
- Le complotisme est l'art de dissimuler un complot bien réel au milieu d'une multitude de complots imaginaires ?
- Que l'on ne peut jamais être sûr de rien, qu'on croit que ça va s'arranger, mais que ça ne s'arrange pas toujours, ou pas vraiment, et que de toute façon, quelque problème réglé cède la place à un autre ?
- Que lorsque les bigoudis se prennent pour des accordéons, ça fait mal à la tête ?
4.
« Mon père disait que la sorcellerie est un mot bien commode pour juger toute chose qu'on ne peut expliquer... »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Louis XIII])
Cette réflexion implique-t-elle :
- que le roi ne sait pas ce qu'est la sorcellerie et qu'il serait bien avisé de lire le remarquable « Les Mots, la Mort, les Sorts », de Jeanne Favret-Saada ?
- Que la sorcellerie n’existe pas et qu'il y a bien des choses en ce monde qu'on ne peut expliquer et que l'on n’expliquera jamais (surtout si entre-temps la troisième guerre mondiale et le réchauffement climatique déciment l'espèce humaine) ?
- Que Mélenchon a, le 22 octobre 2023, par un tweet singulièrement violent et odieux sur la présence de Yaël Braun-Pivet en Israël, dissous la NUPES et détruit la gauche française. C'est peut-être là son but, et cela depuis longtemps.
- Que non, les pasionarias de la LFI ne sont pas des sorcières mais des représentantes du peuple français à l'Assemblée nationale et qu'elles perdront sans doute leur mandat aux prochaines législatives ?
- Que je voudrais bien revivre le jour où j'ai découvert « Les Fleurs du mal », de Baudelaire, il y a si longtemps, seigneur, si longtemps...
5.
« Je crois que vous avez déjà trop bu, baronne ! Vous allez finir par vous rendre malade ! »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Germain à Ariane])
Ce constat signifie-t-il
- que l'alcool est dangereux pour la santé ?
- Qu'Ariane de Troïl est alcoolique, ou désespérée, ou désemparée, ou ennuyée ?
- Que du coup qu'elle a trop bu, demain elle va avoir la gueule de bois et ne pourra aller affronter son destin (le redoutable chevalier Condor) ?
- Que, même si elle a trop bu, demain, Ariane de Troïl ira affronter son destin (le redoutable chevalier Condor) et que l'album va se finir dans une grande mélancolie ?
- Qu'il n'y a pas d'amour heureux ?
6.
« Dieu n'a rien à voir dans nos affaires, Germain. »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Ariane])
Cette phrase signifie-t-il que ;
- Dieu n'a rien à voir avec les aléas humains, qu'il est juste le nom que l'on donne au principe de la matière dans laquelle nous nous agitons ?
- Pourquoi voulez-vous que Dieu s'occupe des heurs et malheurs des humains ? N'a-t-il pas autre chose à ne pas penser ?
- Que la baronne Ariane de Troïl est une libertine, une libre-penseuse ? Une anarchiste ?
- Qu'elle est bien jolie, Ariane de Troïl, que si vous ne me croyez pas, zavez qu'à lire la série « Les Sept Vies de l'épervier » de Cothias et Juillard ?
- Qu'il vaut mieux se fier à sa tête qu'à Dieu ?
7.
« … mais le Diable est prisonnier de sa réputation !... »
(Patrick Cothias, André Juillard, « La Marque du Condor » [Le bateleur énigmatique])
Cette remarque qui clôt le tome VII de la série « Les Sept Vies de l'épervier », scénarisée par Patrick Cothias et dessinée par André Juillard signifie-t-elle que :
- Léonard dit Langue-Agile est le Diable ?
- Que le Diable tire les ficelles qui nous agitent ?
- Que le Diable lui-même ne peut faire que ce que l'on attend de lui et qu'en conséquence, le Diable, comme nous tous, n'agit qu'en fonction de l’œil ?
- Que la réputation du Diable n'est plus à faire même s'il prétend, comme le dit « Sympathy for the Devil », la chanson des Stones :
- « Please allow me to introduce myself
I'm a man of wealth and taste » ;
on n'est pas obligé de le croire.
- Quand on parle du loup, on en voit la queue ?
- Qu'elle est bien jolie, Marthe Keller, dans le rôle de la baronne Amélie de Coustines, dans le film « Le Diable par la queue », de Philippe de Broca (1969).
Patrice Houzeau
Malo, le 24 octobre 2023.