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BREFS ET AUTRES
pop culture
11 novembre 2022

ON CONTINUE DANS L'INCONGRU

ON CONTINUE DANS L'INCONGRU

1.

Le mot « cheval » me fait penser

Au mot « western » que des films

De cow-boys et d'indiens ça fait

Longtemps que je n'en ai pas vus

Le mot « cheval » me fait penser

A Jolly Jumper le cheval à Lucky

Luke même que Jolly ça veut dire

Joyeux enjoué c'est de l'anglais

Et Jumper ça vient de to jump un

Verbe anglais lui aussi qui veut

Dire sauter bondir & en allemand

Wurst veut dire saucisse & quand

On dit Das ist mir Wurst ça veut

Dire que ça m'est égal et que je

N'en ai rien à faire Je sais que

Ça n'a aucun rapport avec le mot

Cheval et Jolly Jumper quoiqu'en

Français quand on dit oui oui je

Vais en parler à mon cheval cela

Veut dire qu'on n'en à rien à oh

rien rien de rien rien de rien à

Galoper de s'que l'autre raconte

Et que Jolly Jumper dans l'album

Jesse James de Morris & Goscinny

Jolly Jumper à la planche 2 fait

Son intéressant le Jolly Jumper.

2.

100 ans de BD un ouvrage collectif publié

En 1996 par les Editions Atlas dirigé par

Pascal Pillegand l'ouvrage pas Atlas il y

A pas mal d'images par exemple page 61 la

Reproduction d'une planche de Sirius même

Qu'elle vient de la série L'Epervier Bleu

On voit le héros dire à un autre qui dans

Sa combinaison d'astronaute dit qu'ça lui

Aurait plu de pouvoir se mirer le héros i

Dit « Tu es à croquer, comme toujours » &

En fait au premier plan c'est le visage à

Christine (elle est blonde) qu'on voit et

Comme elle est mignonne on pige que c'est

Elle qui est à croquer pas l'autre poilu.

3.

L'un des grands défis des humains c'est

de lutter contre le froid celui qui est

en dehors et celui qui règne en dedans.

4.

On continue dans l'étrange avec Mortimer

Celui de l'album Le Dernier Pharaon page

61 le voilà face à une pyramide inversée

Genre que dessous le Palais de Justice à

Bruxelles l'Egypte antique et la tête en

Bas s'il vous plaît serait tombée là que

Tout baigne dans une lumière verte et le

Mortimer a les pieds dans l'eau & paraît

Qu'il y aurait une « mer souterraine » i

Dit Henri à la page 62 Une méganeura des

Temps anciens puisque ça date quand même

Du Carbonifère soit plus de 300 millions

D'années s'te libellule géante là étonne

Mortimer que si cela avait été un député

Volant voire un politique sincère il eût

Eté moins époustouflé le Mortimer pis la

Méganeura a s'fa bouffa par un surgi des

Flots à long cou un basilosaurus j'crois

Bien ça se passe page 63 Les auteurs des

Epatances superbes dont je viens de vous

Causer sont Schuiten Van Dormael Gunzig.

5.

J'entends sur France Inter un blues

Chanté par Janis Joplin On y entend

Itou une machine à écrire & si j'ai

Bien pigé c'est la compagne à Jorma

Kaukonen Margareta qui en tape d'la

Machine à écrire qu'ça sonne bien &

Nous sommes le 9 novembre 2022 tout

Ça Janis Joplin Kaukonen évidemment

C'est du temps passé à y penser des

Fois ça mélancolise fiche le blues.

6.

Le chapitre 5 du Dracula de Georges Bess

Met en scène les « Concubines du comte »

Que les planches présentent flottantes &

Volantes & ondulantes & vénéneuses & des

Roses ponctuent leur apparition comme si

Le parfum des roses servait à dissimuler

Les planches 60 et 61 montrent un Harker

Alité en proie à une étrange torpeur Les

Femmes qui entourent Jonathan dessiné au

Centre de la double page peut-être qu'il

Croit les rêver tandis qu'il les compare

A des « bêtes sauvages » et le dessin de

Georges Bess en montre le vampirisme qui

Les anime ongles griffes dents longues &

Pointues et leur dimension érotique liée

A la nudité de certaines ainsi qu'à leur

Nature de bête de proie tout ça plein de

Lignes de stries & d'ombres tourmentées.

Patrice Houzeau

Malo, le 9 novembre 2022.

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9 novembre 2022

C'EST QUE L'AVENTURE ELLE N'ATTEND PAS

C'EST QUE L'AVENTURE ELLE N'ATTEND PAS

1.

J'aime bien l'air décidé qu'elle a Yoko

Tsuno aux planches 6 & 7 de la bédé que

Je lis et qui porte le titre en lettres

Façon gothique de « L'Orgue du Diable »

Même qu'elle est signée Roger Leloup et

Elle est si décidée qu'hop-là parce que

La jeune Ingrid (elle est blonde & joue

De l'orgue y a même un disque) a manqué

Se noyer dans le Rhin because qu'un gus

En imper chapeau lunettes noires l'a un

Peu poussée & qu'allant vite en chameau

(L'existe pas s't'expression mais voyez

Elle m'amuse) Yoko elle se met ses yeux

Les plus perçants vifs noirs même qu'un

Doigt elle pointe itou pour en balancer

Une de vérité bien claquante comme quoi

Evidemment si on a tenté d'l'assassiner

La belle Ingrid (elle est blonde & joue

De l'orgue y a même un disque) c'est au

Cas où l'Ingrid (elle est blonde & joue

De l'orgue y a même un disque) pigerait

Que son daron à Ingrid pas à Yoko a été

Assassiné Donc tout le monde débarque à

Saint-Goar sauf Astérix Obélix & autres

Irréductibles Gaulois qui d'toute façon

N'étaient pas à bord Quant à Saint Goar

En allemand Sankt Goar c'est réellement

Au bord du Rhin et c'est réellement pas

Loin du rocher de la Lorelei Vic lui ne

Débarque pas car la décisive Yoko lui a

Demandé de continuer jusqu'à Boppard et

Boppard existe aussi puisque je vous le

Dis zavez qu'à aller voir sur Wikipédia

A peine arrivées dans la ville que Yoko

& Ingrid s'mettent à courir et que Yoko

Dit qu'il n'y a pas une minute à perdre

C'est que l'aventure elle n'attend pas.

2.

XIII à la planche 14 de « Treize contre

Un » il sème un poursuivant ce qui fait

Qu'on peut dire que XIII il est malin &

C'est au dernier étage d'une tour qu'on

Dirait bien qu'y a plus personne dedans

Toute pourrite qu'elle est la tour même

Qu'ainsi XIII peut y rencontrer le gars

Sans qu'on le dérange & le voir le gars

Qu'il veut rencontrer et y discuter non

Des OVNIS ou de l’œuvre de Niezsche non

De la guitare de l'histoire du jazz non

Des règles du jeu de go ou de dames non

De la pistache des vaches des poils non

Des moustaches ni nanas ni ananas & non

Plus de Napoléon qu'ils causèrent là au

Dernier étage de la désaffectée Puis la

Planche 16 voit débouler la Major Jones

Dans un ranch dans le Wyoming pis qu'ça

A à voir avec Kim que Kim une fille que

XIII veut retrouver qu'elle est Kim que

Je ne vous dirai pas pourquoi vu que je

Sais pas Planche 17 on voit XIII il est

A une fenêtre de la toute pourrite tour

Que la case est pleine de briques et ça

C'est tout XIII ça entouré d'briques et

Les briques ça fait des murs et XIII il

Est au milieu de tout un tas de murs et

Tous ces murs forment un labyrinthe que

XIII il y cherche qui il est exactement

XIII défois qu'il serait tout autre que

XIII mais je crois pas qu'il soit Corto

Maltese XIII vu qu'c'est pas Hugo Pratt

Qui a fait tous les XIII vu qu'les XIII

Ce sont William Vance & Jean Van Hamme.

Patrice Houzeau

Malo, le 9 novembre 2022.

9 novembre 2022

J'AIMAIS BIEN ÇA ALORS J'AIME BIEN ÇA ENCORE

J'AIMAIS BIEN ÇA ALORS J'AIME BIEN ÇA ENCORE

1.

La première planche de « L’Orgue du Diable »

De Roger Leloup est nocturne & rhénane C’est

Le bleu qui domine Il y a un château et deux

« Ombres » dit le texte qui s’affrontent Y a

Même un mort on pense dans la planche 2 Il a

Tout de même dégringolé d’la falaise le gars

Après avoir été frappé par un tir et AAAAH !

Qu’il a crié le gars avant de chuter mais au

Bas de la planche 2 c’est plus lumineux & on

Retrouve Yoko Tsuno Pol et Vic sur un bateau

En reportage Pol a remarqué une jolie blonde

Ils ne la connaissent pas mais la remarquent

Elle pleure Soudain… Je ne vous dirai pas ce

Qui se passe A la planche 4 Yoko nage j’aime

Bien la précision du trait qu’on trouve dans

Les aventures de Yoko Tsuno des années 70 Je

Me rappelle comme ça m’épatait môme ce trait

Dynamique précis soigné minutieux qui ne les

Gavait pourtant pas nos yeux Yoko Tsuno vrai

J’aimais bien ça alors j’aime bien ça encore

Tant pis tant mieux si ça vous semble futile

Puisque voyez-vous votre avis je m’en fiche.

 

2.
Il pleut on est dimanche en novembre il pleut

Il pleut et c’est normal il pleut Novembre On

Attend que Poutine la perde sa sale guerre Il

Pleut dimanche novembre il pleut Je lis qu’il

Paraît que Macron serait fin prêt au cas où y

Aurait dissolution de l’Assemblée Nationale Y

A personne sur la digue Normal il pleut pis y

A comme une drôle d’atmosphère on dit qu’elle

Progresse partout en Europe l’extrême-droite.

 

3.
A la planche 41 tout paraît accuser Oki c’est

Dans l’album réalisé par Juszezak & Godard Si

La nuit du meurtre on a vu une fille avec une

Jupe rouge et la même coiffure que Oki s’peut

Qu’ça soye Oki tout d’même même que Oki s’met

A douter même qu’elle dit « C’est que c’était

sans doute moi, alors » hein dis qu’ça s’peut

Qu’ça soye Oki tout d’même hein mais c’est un

Peu plus compliqué que ça que je ne vais rien

En dire de la suite zavez qu’à lire l’album &

Sachez quand même que c’est machiavélique Une

Fichue saloperie ce piège avec de l’éros & du

Thanatos et du fric en jeu et des trahisons &

Même que la vérité sort des images du rapport

Que l’on fait entre les images & bon ça finit

Bien sur l’évocation de la cuisine japonaise.

4.

Planche 10 de « Treize contre un » de Vance

Et Van Hamme la belle major Jones une crise

De jalousie qu’elle fait vu que XIII il lui

Demande son aide pour retrouver Kim que moi

Je ne sais pas qui c’est mais XIII et Major

Jones c'est pas facile à caser que la Major

Jones au milieu dans une case elle la Major

Jones qu'elle est et interrogative la Major

Jones à propos de Kim même que Kim la Major

Jones & XIII qui est Kim là XIII & la Major

Jones savent Visiblement ça contrarie Major

Jones du coup verre renversé même que Major

Jones quitte la planche de dos Après XIII i

S’en va discuter avec des huiles pour avoir

Des renseignements La planche 13 est muette

Quasi on voit XIII déambuler en ville c’est

Là qu’on voit les mots TATTOO puis THE WALL

STREET JOURNAL une fille un chien un sac et

Une fille avec un journal un couple avec un

Môme le gars porte l’enfant sur ses épaules

J'aime bien parce qu'il y a des détails que

Je peux regarder dedans défois on dit qu'le

Diable est dans les détails mais là je vois

Pas de diable il y a la rue des gens il y a

Des voitures il semble que XIII soit suivi.

5.

Après Mortimer il descend dans une crypte

Pourquoi est-ce que j'écris ça Mortimer i

Ne descend pas dans une crypte je ne sais

Pas pourquoi j'écris ça ça doit venir que

J'aime bien le mot crypte il sonne énigme

Et où il est donc Mortimer dis je ne sais

Pas trop où il est Mortimer pense-t-il le

Mortimer qu'il faut toujours se méfier de

Soi-même que l'on n'est pas toujours très

Bon conseiller de soi-même qu'on se croit

Prince et qu'on n'est que crapaud Et puis

Henri dit : « Et puis, cet endroit a fini

par m'accepter » Etrange cet endroit avec

Des hiéroglyphes à l'envers une statue de

Seth à l'envers qu'elle est itou Seth une

Des plus vieilles divinités de l'ancienne

Egypte elle est Seth et qu'un long museau

Elle a aussi Seth je ne sais pas si c'est

Elle qu'on doit dire pour Seth ou Il donc

Elle ou Il mais non c'est Il un mâle donc

Seth je lis ça sur Wikipédia que Seth est

Harceleur de « belles déesses » Wikipédia

Dit aussi qu'il doit peut-être sa tête au

Bestiau nommé oryctérope que l'oryctérope

C'est un termitivore d'Afrique et donc il

A la tête à l'envers Seth dans la bédé et

Que Schuiten Van Dormael Gunzig ont pensé

Cet album et qu'il ait la tête à l'envers

Seth c'est pas étonnant car Seth c'est le

Dieu de la confusion du désordre et de la

Perturbation ça je l'ai lu sur Wikipédia.

6.

Jonathan Harker au bord de l'abîme il est

Dans le manoir du comte Dracula au propre

Comme au figuré et quand il le voit à une

Fenêtre il le décrit Jonathan « comme une

ombre parmi les ombres » après il le voit

Dévaler la paroi comme un « gecko » j'lis

Ça dans le texte un lézard une araignée &

Jonathan dans les ténèbres tombé comme on

Tombe dans une toile d'araignée qu'il est

Jonathan horrifié tandis que le comte sur

La planche 53 qu'il dévale la muraille si

Bestial si atroce si mâchoire ouverte que

Jonathan il n'en croit pas ses yeux & pis

« dans le vide » qu'il « bondit » Dracula

« les pans de sa cape étendus » genre les

pans de sa cape ça lui fait des ailes les

Chauve-souris l'accompagnent dans son vol

Et ainsi se termine le chapitre 4 dessiné

Par Georges Bess c'est terriblement beau.

Patrice Houzeau

Malo, le 9 novembre 2022.

 

5 novembre 2022

NOTES SUR QUELQUES FANTAISIES VIRTUOSES

NOTES SUR QUELQUES FANTAISIES VIRTUOSES

1.

Dans « 100 ans de BD », ouvrage collectif dirigé par Pascal Pillegand, à propos du Spirit, de Will Eisner, ce relevé du stéréotype de la « vamp » : « Il croise des femmes fatales aux formes généreuses et aux regards carnassiers. » Ce stéréotype de la « femme fatale » contribua à faire passer la bande dessinée pour une activité vulgaire basée sur des stéréotypes. Dans le travail de Will Eisner, cette convention est en fait parodique : le dessinateur utilise les codes du roman noir et du film policier pour en tirer des fantaisies virtuoses.

2.

La fin de l’album « La Frontière de la vie », de Roger Leloup, se finit par un nouveau miracle : la petite Magda qui ne savait plus marcher retrouve l’usage de ses jambes. « Sans le savoir, Yoko, vous l’avez ramenée là où elle fut blessée il y a trente ans… ». Concordance des temps. Yoko en providence du hasard.

3.
La Oki de Juszezak et Godard « s’est introduite dans la maison par une fenêtre du haut » afin de connaître le fin mot de sa quasi-séquestration. Intuitive, elle sait soudain « qu’il y avait « quelque chose » à y trouver… ». Elle ouvre de grands yeux, pousse un cri, lâche les images.

L’enjeu de la recherche : des images, des photos compromettantes. C’est la représentation qui fait preuve, puisqu’elle actualise en réinscrivant dans le présent (par la re-présentation) ce qui s’est passé entre la jeune femme et le vieil homme.

4.

Les premières planches du huitième épisode de la série XIII, de Vance et Van Hamme, sont basées sur l’opposition entre l’univers carcéral où est enfermé un tueur à gages et un dialogue entre Mac Lane et le Président des Etats-Unis. Nécessité de la méfiance institutionalisée d’un côté et mission de confiance de l’autre.

5.

« Le Dernier Pharaon » de Schuiten, Van Dormael et Gunzig, Pages 52 à 54. De fines lignes vertes verticales tissent le décor de certaines cases. De fines lignes orange font de même avec le Palais de Justice. Minimalisme.

Figure du complotisme. La jeune femme s’écroule dans un cri rouge. Mortimer reste seul avec sa mission, les chats qu’il suit, le pigeon relâché, l’escalier qu’il monte rappelant l’escalier de son cauchemar où se tient la divinité verte ; vert aussi le rayonnement mystérieux.

6.

Planches 56-47 du « Dracula », de Georges Bess. Dracula n’aime pas les maisons modernes. Jonathan Harker se rase dans une petite case au centre de la planche 46. Incident du non-reflet dans la glace. Incident de la coupure. Le comte « comme pris d’une folie démoniaque ». Dracula se débarrasse du miroir et commence ainsi à soumettre le jeune homme à sa volonté.

Planches 48-49 : Réflexions de Jonathan Harker et déambulations solitaires dans le dédale du château délabré et, semble-t-il, désert. Planche 48 : Jonathan au centre d’une vignette noire. Seule sa lampe l’éclaire. Le noir et le blanc des planches permet de faire jouer au noir le rôle des ténèbres dont Harker est prisonnier.

Dans son château délabré des confins, Dracula est hors du temps. Il n’est pas à proprement parler diachronique et relève d’une synchronie qui le condamne à répéter éternellement le même acte vampirique tandis qu’il tente vainement, en s’installant à Londres, de s’inscrire dans l’histoire des vivants. Le fait que son château soit délabré témoigne de cette vie en marge des vivants. Dracula n’est pas un passé pérennisé et inscrit dans une tradition, mais un passé qui est condamné à lentement dépérir sans qu’il pérît jamais.

Patrice Houzeau
Malo, le 5 novembre 2022.

5 novembre 2022

DANS LE CERCLE QU'AVAIT DESSINE MA RAISON

DANS LE CERCLE QU’AVAIT DESSINE MA RAISON

En feuilletant « Le Mystère de la Chambre Jaune », de Gaston Leroux.

1.
« C’est cette réminiscence aiguë de ton cher parfum, dame en noir, qui me fit aller vers celle-ci que voilà tout en blanc, et si pâle, si pâle, et si belle sur le seuil de la « galerie inexplicable » !

(Gaston Leroux, « Le Mystère de la Chambre Jaune » [Rouletabille cité par Sainclair])

Parfum revenant, porteur de passé.

2.
« La « Chambre jaune » était obscure sans doute, mais une petite veilleuse tout de même l’éclairait, ne l’oubliez pas. »

(Gaston Leroux, [Rouletabille])

Si la « Chambre Jaune » était « obscure », on n’en voyait pas la couleur. La « petite veilleuse » dénonce cette obscurité. La phrase introduit la lueur dans les ténèbres. Cette lueur qu’il ne faut pas « oublier » rappelle que le roman fonde l’énigme sur des oppositions dont la résolution permet l’élucidation.

3.
« … tout ceci prouve, selon moi, que l’assassin a voulu déguiser sa véritable personnalité. »
(Gaston Leroux, [Larsan])

Larsan qui « déguise sa véritable personnalité » déclare que « l’assassin a voulu déguiser sa véritable personnalité ». Ironie de la fiction.

4.
« La porte close et les volets fermés comme ils l’étaient, et la fenêtre fermée comme elle l’était, une mouche ne pouvait entrer ni sortir ! » 
(Gaston Leroux, « Le Mystère de la Chambre Jaune », [Sainclair]))

Ainsi est posé l’espace de l’énigme. Reste la question du temps.

5.
« Mlle Stangerson savait que l’assassin devait revenir… elle ne pouvait l’empêcher de revenir… »
(Gaston Leroux, [Rouletabille])

Qui pourrait empêcher un revenant de revenir ? Qui pourrait empêcher un assassin d’assassiner puisque la langue le désigne comme « assassin » et comme « revenant », et puisque, justement, c’est un « assassin » et un « revenant ». Reste à définir ce que sont exactement cet « assassin » et ce « revenant » : c’est là l’objet de la fiction, révéler des vérités sur la fiction.

6.
« Elles tiennent au passé, elles se rattachent à l’histoire, elles continuent quelque chose […]
(Gaston Leroux, [Sainclair])

Le narrateur déclare son amour des vieilles auberges, « de l’époque des diligences » (« Le Mystère de la Chambre Jaune » a été publié en 1907). Je note le réseau lexical de la pérennité : « tenir », « se rattacher », « continuer ».

7.
« elle n’a prévenu personne parce qu’il faut que l’assassin reste inconnu… »
(Gaston Leroux [Rouletabille])

Mathilde Stangerson fait tout pour préserver l’anonymat de son assassin. Elle en fait en quelque sorte son revenant personnel, son intime assassin, son démon. Motif que l’on retrouve dans bon nombre d’intrigues policières : la victime sait et, pour des raisons qui peuvent être diverses (chantage, honte, lien affectif,…) en dit le moins possible à l’enquêteur.

8.
Rouletabille aime parler par énigmes : ainsi, à Sainclair : « Je vais vous dire tout de suite ce que je suis allé faire en Amérique, parce que vous, vous êtes un ami ; je suis allé chercher le nom de la seconde moitié de l’assassin ! »

Notons que Rouletabille semble réserver ses énigmes aux amis. Ce faisant, il entretient l’atmosphère énigmatique de la fiction et donc, l’intérêt du lecteur amateur d’énigmes.

Ce que Rouletabille est allé chercher, c’est un nom. Ce sont des noms que les enquêteurs cherchent, des noms qu’ils peuvent faire coïncider avec des faits. D’une certaine manière, l’enquêteur cherche le nom de l’être responsable d’un étant réalisé.

9.
« Mais enfin, reprit-il [Rouletabille], il est quelquefois criminel de ne point, quand on le peut, raisonner à coup sûr !... »
(Gaston Leroux, [Sainclair])

Par son goût du raisonnement, Rouletabille est l’héritier de Sherlock Holmes et annonce les « petites cellules grises » d’Hercule Poirot. Le roman d’énigme est aussi un éloge de l’usage de la raison, celle qui triomphe, s’opposant au fatalisme, à l’arbitraire brutal du « roman noir ».

Que l’énigme apparaisse soudain comme « inexplicable », et Rouletabille d’évoquer le « déséquilibre de tout, […] la fin de mon moi pensant, pensant avec ma pensée d’homme ! » Ainsi Rouletabille lie l’usage de la raison à la condition humaine. L’humain, s’il ne veut pas subir le « déséquilibre de tout », se doit d’être celui qui cherche à comprendre.

10.
« Moi aussi, je me suis penché sur les « traces sensibles », mais pour leur demander uniquement d’entrer dans le cercle qu’avait dessiné ma raison. »
(Gaston Leroux [Rouletabille])

Autre énigme : celle du « cercle de la raison » sans lequel les faits n’ont guère de sens, sans lequel on risque de tomber dans la « cogitation animale ». Manière de faire système ? Etablissement d’une chaîne logique de causes et de conséquences ?
Cercle d’autant plus énigmatique que « bien des fois, le cercle fut si étroit, si étroit… Mais si étroit était-il, il était immense, « puisqu’il ne contenait que de la vérité » ! » explique Rouletabille.

Ce qui me rappelle ce paradoxe de l’ensemble plus grand que la somme de ses éléments, tendant vers l’infini cependant qu’il est constitué d’un nombre fini d’éléments.

Qu’est-ce aussi que ce « cercle de la raison », sinon le livre, le roman que je lis et où des faits énigmatiques font sens, cependant que dans le monde réel, en dehors du cercle, ils seraient livrés à toutes les indifférences, à toutes les dérisions, à toutes les interprétations, tous les complotismes, toutes les « cogitations animales ».

Patrice Houzeau
Malo, le 5 novembre 2022.

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31 octobre 2022

JE N'EST PAS LUI ET LUI JE NE SAIS PAS QUI C'EST

JE N'EST PAS LUI ET LUI JE NE SAIS PAS QUI C'EST

1.

Planche 28 : une des vignettes que la mémoire retient (elle a d'ailleurs en son temps servi de couverture à un numéro du journal Spirou) : à l'abri du regard derrière un pilier, la vampire, une pleine lune dans la nuit mauve, un chat noir, des croix, l'entrée du caveau, Yoko Tsuno.

C'est par la science que Yoko Tsuno et Rudy pensent approcher de la vérité, mais le mystère ne se laisse pas si vite dissiper, et, en fin de compte, il y a bien « violation de sépulture » (cf « La Frontière de la vie », Roger Leloup, pl. 29).

2.

« Le rêve permet à Windsor McCay de donner aux gens et aux choses des dimensions étonnantes, parfois plus vraies que le réel. »

(Pascal Pillegand, « 100 ans de BD », Editions Atlas, 1996, p.16)

Ce qui est « plus vrai que le réel », c'est moins le rêve (qui n'en est que sa représentation subjective), mais la virtuosité du dessinateur qui donne de l'étoffe aux songes. Ce qu'il y a de plus réel dans l'art, c'est l'art de ; le reste n'est que représentation.

3.

« Je serai bientôt aveugle, je le sais, et j'accueillerai ces ténèbres avec reconnaissance, comme une punition infligée par Dieu pour ma lâcheté et mon déshonneur. », écrit à la lueur d'une lampe à huile celui qui a vu agir les meurtriers et qui s'est tu.

(Vance et Van Hamme, XIII, « La Nuit du 3 août », pl. 25)

4.

Du domaine des fantômes et des songes, la synchronie, appelant l'art et la virtuosité. De l'ordre de la raison, de l'enquêteur perspicace, la diachronie. Elle établit la généalogie que masque la synchronie. Mais de ce que je dis, le revenant s'en moque, et Conan Doyle croyait aux tables qui tournent.

On dit que Conan Doyle, le créateur du rationnel, méticuleux, perspicace Sherlock Holmes, fut un fervent spirite et que Lovecraft, dont la prose est littéralement hantée, n'y croyait absolument pas à ses anciens dieux et autres saugrenus à tentacules. Les auteurs ne ressemblent pas à ce qu'ils écrivent. Je n'est pas lui.

5.

Pages 33 et 35, Mortimer se trouve entre féroce chat et chiens féroces.

J'aime bien cette impression de gravure qui imprègne l'atmosphère des planches de l'album « Le Dernier pharaon », de François Schuiten pour le dessin et Laurent Durieux pour les couleurs.

6.

Sur l'édition du journal dont la une affiche la mort de « la belle Romi Romani, célèbre top-modèle italien, tuée par balles », une mouche s'est posée. (Oki, souvenirs d'une jeune fille au pair -1 », de Juszezak et Godard).

A la moitié de l'album, le lecteur distingue un enjeu érotique (Oki quasi séquestrée et abusée), un enjeu énigmatique (que se passe-t-il exactement dans cette maison ?) et peut supposer un enjeu financier, un scénario à la Claude Chabrol.

7.

Jonathan Harker est le missionnaire de la civilisation envoyé au cœur des ténèbres. Il passe d'abord par les superstitions des villageois : « Il me revint à l'esprit que nous étions la veille de la Saint-Georges... Les forces maléfiques, etc. », se dit-il dans la diligence qui l'emmène au col de Borgo.

Planche 26 du « Dracula » de Georges Bess, pleine page noire. Au centre, la figurine blanche de Jonathan Harker s'enfonçant dans la nuit.

Planche 28 : Le fiacre du comte Dracula et sa « course folle » ; case 2, impression de bois gravé.

8.

« Ainsi, à quatre pattes, il s'en fut aux quatre coins de la pièce, reniflant tout, faisant le tour de tout, de tout ce que nous voyions, ce qui était peu de chose, et de tout ce que nous ne voyions pas et qui était, paraît-il, immense. »

(Gaston Leroux, « Le Mystère de la Chambre Jaune » [Sainclair à propos de Rouletabille].

Lire n'est pas lire, c'est regarder passer du sens. Repérer ce que nous ne voyons pas, voilà ce qu'est lire.

9.

« Une manière essentielle dont la vérité s'institue dans l'étant qu'elle a ouvert elle-même, c'est la vérité se mettant elle-même en œuvre. »

(Heidegger traduit par Wolfgang Brockmeier, « L'origine de l’œuvre d'art » in « Chemins qui ne mènent nulle part »)

Ce qui est fait (poème, roman, planche, musique, synchronie) n'est pas seulement une réalisation, c'est la mise en œuvre dans l'étant d'une vérité qui dépasse l’œuvre en la constituant.

10.

« J'ai seul la clé de cette parade sauvage. »

(Rimbaud, « Parade »)

Rimbaud ment et Rimbaud ne ment pas. Scribe, il ment en virtuose, en « drôle très solide », en « Maître jongleur », mais ce « je » et cette « clé » ne lui appartiennent que par leur mise en scène. Le deus ex machina de la langue machine autre chose, tout autre chose.

Patrice Houzeau

Malo, le 30 octobre 2022.

30 octobre 2022

DE L'ENIGME DE LA MAISON DE TROP ET DE RENDELSHAM AUSSI

DE L'ENIGME DE LA MAISON DE TROP ET DE RENDELSHAM AUSSI

1.

« La Frontière de la vie », de Roger Leloup. Planche 22. L'énigme de « la maison de trop », ce qui donne l'occasion de voir Yoko Tsuno se déplacer au cœur d'un Rothenburg miniature.

En quelques planches, plusieurs motifs traditionnels du récit vampirique sont évoqués : un caveau délabré, un cercueil étonnamment entretenu, un interdit , un revenant.

« L'Orgue du Diable » et « La Frontière de la vie » font se rencontrer la japonaise Yoko Tsuno et l'allemande Ingrid Hallberg. Je note ce détail de la natte repliée, roulée, façon macaron, qui me rappelle « Nuit rhénane » d'Apollinaire :

« Et mettez près de moi toutes les filles blondes

Au regard immobile, aux nattes repliées »

2.

« La Nuit du 3 août », de Vance et Van Hamme, planche 21. Celui qui serait « Vous voulez dire que vous seriez... Jason ?... », dit David à celui qui serait Jason et qui ne ressemble pas tellement à Jason parce que le réel, il est tout changé par la chirurgie esthétique et l'amnésie de celui qui serait Jason.

3.

« La Mort au bout du voyage », de Juszezak et Godard. Le choix du point de vue interne, celui de Oki, la jeune fille au pair, permet de maintenir l'enjeu énigmatique. Que lui arrive-t-il exactement ? Planche 12, la scène du cauchemar se caractérise par une faille, puisque nous comprenons que Oki est sexuellement abusée. La narration sous-entendrait-elle que la narratrice saurait inconsciemment qu'elle a été droguée et violée ?

4.

« Le Dernier pharaon », de Schuiten, Van Dormael, Gunzig. Mortimer tombe du ciel dans la nuit d'un Bruxelles déserté. Rencontre d'un cerf et d'une biche. Mortimer commente : « Evidemment, sans les humains, c'est plus tranquille... ». Je songe à ce qui se serait passé si le confinement de mars 2020 se serait poursuivi indéfiniment, si le dragon Covid s'était à jamais emparé de l'ensemble des espaces publics.

Art visuel, la bande dessinée fait souvent appel à l'imaginaire du rêve. Dans « Le Dernier pharaon », Mortimer fait des cauchemars. Les textes des cartouches rappelle la « naïveté » de la série originelle : « Descendant un escalier infini... », « Un bijou à l'allure millénaire », naïveté démentie par la sophistication graphique. Très belle vignette montrant une divinité féminine à tête de chat descendant un escalier. Elle apparaît immense face à un Mortimer impuissant.

5.

Toujours efficace, la tête de mort occupant la moitié de la planche 23 du « Dracula » de Georges Bess pour signifier que Jonathan Harker a pris la diligence pour une terre vouée à la mort.

6.

C'est entre deux bières que j'ai appris la mort de Jerry Lee Lewis. Mélancolie.

7.

Youtube. Vidéo de la chaîne « Mr Sam Point d'interrogation « On vérifie ? ». Démystification de « l'incident de Rendelsham » (1980), souvent présenté comme un des rares cas « authentiques » d'observation par des militaires d'un d'OVNI ayant atterri.

Mr Sam, toujours très clair et intelligemment sceptique, explique l'affaire par le faisceau du phare d’Orford Ness et présente le témoignage de Jim Penniston comme exagéré, sinon « fantaisiste ».

Pour ma part, je n'en sais rien. Je m'étonne simplement que des militaires, dont un colonel (Charles Halt), qui n'étaient pas sans ignorer la présence du phare d'Orford Ness, aient confondu les lumières d'un phare avec celles d'un Objet Volant.

Ai lu sur Wikipédia que le célèbre Jacques Vallée avait émis l'hypothèse d'une expérience d'ingénierie sociale (manipulation de l'opinion) du même type que la fameuse « vague belge » (1990). Va savoir, Edouard.

8.

Marrant que le dessinateur Mathieu Sapin ait fait de François Hollande un personnage de bédé humoristique. Cela rendrait presque sympathique son référent dans le réel.

Dans le numéro 4411 (26 octobre 2022) de Spirou, « François Hollande » apparaît dans une amusante histoire courte (scénario : Joann Sfar).

Patrice Houzeau

Malo, le 30 octobre 2022. 

29 octobre 2022

LE REEL C'EST DES HISTOIRES

LE REEL C'EST DES HISTOIRES

1.

« Rien de plus fragile que la faculté humaine d'admettre la réalité, d'accepter sans réserves l'impérieuse prérogative du réel ».

(Clément Rosset, « Le Réel et son double »)

La fiction, dont l'humain est si friand, serait-elle si essentielle en ce qu'elle permettrait de tolérer ce que Clément Rosset appelle « l'impérieuse prérogative du réel » ?

Autrement dit, l'humain ne pourrait-il accepter sa condition d'être réel (et donc mortel) qu'en consentant à l'illusion, qu'en se racontant des histoires, qu'en prenant le réel pour ce qu'il n'est pas ?

En ce sens, le discours politique constitue sans doute la plus redoutable des fictions, d'autant qu'il oscille sans cesse entre apparence d'argumentation et illusion d'une vérité révélée.

2.

« Du vin ?... Voyons, capitaine, voyons ! Vous ne parlez pas sérieusement !... Comment de l'eau pourrait-elle se changer en vin ?... Cela est impossible. »

(Hergé, « Les 7 Boules de cristal », pl. 7, [Tintin])

Ironie, délicieuse ironie. D'autant que nous savons que l'eau ne peut par elle-même « se changer en vin ». La métamorphose suppose l'intervention miraculeuse, ou alchimique.

3.

La scène de cauchemar aux planches 11 et 12 de « La Mort au bout du voyage », de Juszezak et Godard, se déroule dans du bleuâtre sur fond noir qui semble faire flotter l'action dans un temps ralenti.

4.

La nuit de Rothenburg dans laquelle Yoko Tsuno court est mauve.

Le visage sous l'énigme nous est inconnu, et son secret ne lui appartient pas.

« Cette nuit, c'était ma dernière visite... Je voudrais tout vous révéler, mais ce secret ne m'appartient pas... Quant à mon visage, il ne vous dirait rien... » dit la vampire à Yoko Tsuno (cf « La Frontière de la vie », de Roger Leloup, pl.18).

5.

« - Ceux-là, dit le Roi, sont les menteurs et les bavards ; j'ai toutes leurs langues dans mes poches : c'est ainsi que je les punis ! »

(« Le Roi de la Lune », Imagerie Pellerin, imagerie d’Épinal n°932)

L'invisible châtierait-il autant que la providence secoure ? C'est en tout cas ce que l'on conte aux enfants et aux naïfs.

6.

Serge Gainsbourg est une énigme : était-il détestable en tant qu'homme et génial en tant qu'artiste ? Etait-il un type bien en proie à « ses démons » ?. Je ne sais et ne peux le savoir.

7.

Ah tiens, j'écoute « Ça plane pour moi » de Plastic Bertrand. C'est tout chiqué, préfabriqué, qu'c'est même pas lui qui chante, mais qu'est-ce que ça fait du bien. Et la reprise en concert par Kim Wilde, Luxembourg, 2009, est pas si mal...

8.

Planche 15 de XIII (« La Nuit du 3 août », Vance et Van Hamme), à la case 6, elle est bien jolie, la major Jones, « quoique », comme dit le bonhomme au revolver, « quand il fait – 25°, c'est peut-être un peu imprudent. »

9.

Mortimer évoquant « une catastrophe de dimension mondiale ». Si quelque apocalypse ne menaçait pas l'humanité, on ne serait pas dans une aventure de Blake et Mortimer.

Ambiance verte. La « catastrophe » évoquée, « serait l'équivalent d'une impulsion électromagnétique de très grande ampleur comme lors des éruptions solaires. » Case striée. Rayonnement. (cf « Le Dernier Pharaon », Schuiten, Van Dormael, Gunzig)

10.

Dans la série « Magma, Mythes et Légendes », qu'on trouve sur You Tube, « Epok 1 », le morceau « Stöha », la guitare y crie qu'on dirait une bête marine, un monstre des profondeurs remonté à la surface et poussant quelque antédiluvienne plainte.

11.

Le « Dracula », de Georges Bess , planches 12-13. Un paysage noir et blanc de pierres et de croix - « la falaise s'est en partie éboulée, entraînant avec elle les tombes » apprend-t-on à la planche 5 - s'étend sur les deux pages de l'album. Le regard y erre.

12.

« Quant au réel, s'il insiste et tient absolument à être perçu, il pourra toujours aller se faire voir ailleurs. »

(Clément Rosset, « Le Réel et son double »)

Le réel ne disparaît pas et se débrouille pour toujours « être perçu », sinon, il s'effondrerait. Le réel est une ruse puisque le réel est une fiction.

Patrice Houzeau

Malo, le 29 octobre 2022.

27 octobre 2022

DIEU EST MORT ET LES HUMAINS S'ENTRE-TUENT

DIEU EST MORT ET LES HUMAINS S'ENTRE-TUENT

1.

« Est-ce que le choc de la pioche sur les rochers avait repris là-bas ? »

(Yves Dermèze, « Souvenance pleurait »)

Rythme. Le « est-ce que » précipite le son « choc » auquel fait rapidement écho la séquence labiale + « diphtongue io » + constrictive « ch ». Mais je ne sais pas si « le choc de la pioche sur les rochers avait repris là-bas ».

2.

« Il me semble de plus en plus que le philosophe, étant nécessairement l'homme de demain ou d'après-demain, s'est de tout temps trouvé en contradiction avec le présent ; il a toujours eu pour ennemi l'idéal du jour. »

(Nietzsche traduit par Geneviève Bianquis, « Par-delà le bien et le mal »)

Plutôt que «  de tout temps », je préfère « tout le temps » car que savons-nous de la totalité des temps ? Si ça se trouve, certains nous ont échappé.

Que le philosophe soit « nécessairement l'homme de demain ou d'après-demain », je ne sais pas ; faudrait en parler à Poutine, au parti communiste chinois et aux mollahs iraniens. Il est aussi que la philosophie occidentale est une des meilleures armes de ce que nous appelons « humanité » en ce qu'elle est menacée par la barbarie.

Quant à « l'idéal du jour », ce fatal « ennemi » du philosophe, c'est que cette fatalité est nécessaire puisque le philosophe ne philosophe jamais de façon aussi aiguë que lorsqu'il s'oppose (pour peu qu'il ne soit pas trop sot). Que certains professeurs de philosophie se rangent du côté de Mélenchon, peu importe (c'est une sottise, et ils le savent), mais ce qui importe, c'est la manière dont ils analysent et commentent cette nécessité pour eux de se rallier à l’extrême-gauche. Ils n'en auront pas pour autant raison, mais leur critique, si elle est réellement philosophique, sera intéressante, et sans doute plus essentielle que l'opinion du premier libéral venu qui, s'il a objectivement raison dans son choix politique, n'est parfois libéral que pour des raisons qui laissent songeur quant à la puissance de la subjectivité et des déterminismes.

3.

J'écoute le groupe Magma et ses chants en kobaïen.

Cette langue n’existe pas ; pourtant elle est chantée.

Cette langue n’existe pas et n'a pas, comme il en est pour la musique instrumentale, d'autre référent qu'elle-même.

Cette langue n’existe pas et a, comme il en est de la musique instrumentale, une expressivité qui la rend parfois amusante, ou agressive, ou étrangement virtuose.

Cette langue n’existe pas car elle semble n'avoir qu'une apparence de syntaxe. C'est l'euphonie et le rythme des séquences syllabiques qui l'emportent sur le « sens ».

Cette langue n’existe pas ; pourtant, elle suggère à notre imaginaire d'occidental ignorant (en l'occurrence, moi) des sonorités slaves, nordiques, saxonnes aussi slaves, nordiques et saxonnes que la slavitude, la nordicité et la germanité affichées par certaines énigmes des nouvelles de Borges.

Je note que dans cette langue qui n’existe pas, se détachent parfois des mots de sens plein (« kameraden », « mekanik destruktiw kommandoh ») mais ce sens qui pourrait faire penser à quelque message menaçant, voire crypto-innommable, est désamorcé, - et même nié -, par l'absence de syntaxe, par la musique pure. Les mots ici n'ont pas d'autre agressivité que celle que leur confèrent les possibilités de la musique. Les mots se font art lyrique, et même art tout court.

J'ajoute que dans certains albums récents de Magma, certains chants ont été composés en français. Et c'est bien dommage, car les textes en sont ridicules, emphatiques et parfois beaucoup trop longs.

Maintenant, à mon avis, l'album « Mekanik Destruktiw Kommandoh » (1973) est un chef d’œuvre du rock progressif.

4.

Sur l'édition de poche de « Par-delà le bien et le mal », de Nietzsche, je contemple le visage de l'actrice Dominique Sanda dans le rôle de Lou Andreas Salomé.

Il y a toujours quelque chose qui échappe dans le visage. Quelque chose du bout de la langue. Pour peu, on croit saisir une généalogie, le visage vieillissant d'une mère, la rudesse d'un visage de paysan d'avant la révolution industrielle, une lignée obscure de travaux et de jours, de fiertés et de nécessités... comme c'est fugace... puis l'on se souvient qu'un visage, c'est d'abord de la chair recouvrant une mâchoire et son crâne.

5.

« Cet autre être de l'étant est devenu entre-temps – et c'est ce qui caractérise le début de la Métaphysique moderne – la subjectivité. »

(Heidegger traduit par Wolfgang Brokmeier, « Chemins qui ne mènent nulle part »)

Seul celui qui affirme la conscience de son individualité, et donc sa singularité, peut remettre en doute la légitimité de Dieu jusqu'à le déclarer mort. Les peuples en proie aux dictatures sont tenus de croire soit au dieu garanti par la théocratie, soit à l'homme providentiel qui les dirige. La subjectivité et l’exercice aigu de la conscience sont liés à la libéralisation des sociétés. « Dieu est mort », et les humains s’entre-tuent.

Note : Faut-il avoir cru en Dieu pour le déclarer mort ? Je ne sais pas. Il s'agit peut-être du dieu de nos éducations, du dieu au cœur de la civilisation occidentale, auquel beaucoup croient sans croire.

Patrice Houzeau

Malo, le 26 octobre 2022.

27 octobre 2022

LES VAMPIRES DEFOIS ON LES VOIT PAS ARRIVER

LES VAMPIRES DEFOIS ON LES VOIT PAS ARRIVER

 

1.
Les vampires, défois, on les voit pas arriver. Remarquez que si on savait que ce sont des vampires, on les neutraliserait avec de l'ail, un crucifix, une union de la gauche, mais défois i vont plus vite qu'on n'a même pas pensé qu'ils vont vite tchak, vous v'la mordu.

2.

Au moment où je reprends l'album « Le Dernier Pharaon », des aventures de Blake et Mortimer, chais pas s'qui s passe mais y a des rayons i sortent tout droit du Palais de Justice monumental de Bruxelles. Mortimer il a une veste verte et il s'enfuit.

Et rien que pour citer les auteurs de l'album « Le Dernier Pharaon » (Editions Blake & Mortimer, 2019, Bruxelles), faut tout un tweet. Scénario : Jaco Van Dormael, Thomas Gunzig, François Schuiten. Le dessin est de François Schuiten ; les couleurs de Laurent Durieux.

A la page suivante, j'apprends que la ville est condamnée au désert, qu'on voit les gens évacuer, partir, avec des valises, des charrettes, des brouettes, que ces rayons, ça me fait penser à une catastrophe nucléaire avec exode mais dans l'album on parle pas de radioactivité.

3 .
« Ah ! Il faut surtout trouver d'où vient cette onde de l'espace. », qu'elle dit Aspirine à la planche 133 de « Aspirine », de Joann Sfar que moi la phrase m'ondule dans la caboche qu'ça fait Ah ! Il faut Ah!Fauchefauchefauche surtoutrou, surtoutrou trou trouver d'où où où vient, oùhoùhvient cette pourquoi 7 pas 9 pas 3 pas 12 onde de l'espasssse, spasssse, spasssse, spaaaase...

Du reste, Ydgor (c'est un personnage de l'album) sourit car il se dit : « Zut ! L'onde de l'espace, je n'étais pas au courant et je ne sais pas ce que c'est. » Sfar dans la vignette, il l'a mis de profil, le visage d'Aspirine, elle est rousse et on voit sa petite incisive de vampire dépasser quand elle parle. C'est mignon.

4.

A la planche 13 de « La Frontière de la vie », de Roger Leloup, c'est un archéologue, un enquêteur du lointain, qui révèle à Yoko Tsuno, qui vient d'être « jouée » par « la vampire », qu'une des clés du mystère se trouve peut-être sous la « Schrannenplatz ».

5.

Tiens, je viens de constater que dans ma liste de lectures de bédés, j'avais mis deux histoires de « vampire » ; la « Frontière de la vie », de Roger Leloup et « Aspirine », de Joann Sfar. Go, ainsi danse (et je dirai même plus, gans, ainsi do, rémi).

6.

Quand pire est le vent, Vampire ! - Et pourquoi donc qu'il serait pire le vent quand des vampires s'immiscent dedans ?; que c'est pas de son fait si les vampires l'utilisent et le vampent. « Quand pire est le vent... » pfff, zêtes un empirique, vous.

7.

J'ouvre le magnifique « Dracula » (ah tiens...), de Georges Bess (Glénat, 2019). Planche 7 : à gauche, les ruines noires de « l'abbaye » semblant se refléter dans le vide, semblant se répandre, tache d'encre. A droite, « la Dame toute blanche », flottant dans la page. Robe de mariée, rose à la main, yeux saignants. Maîtrise.

8.

Dans « Le Dernier Pharaon », dessiné par Schuiten, Mortimer est en proie à un cauchemar récurrent : Le dieu égyptien à tête de chacal le visite. S'il tente de fuir, le voilà dans le « couloir de la Grande Pyramide. » Y en a, ce sont des vampires qui les visitent ; Mortimer, lui, c'est Anubis qui vient lui rappeler des étrangetés du passé.

Page 23, j'aime bien la silhouette du chien à Mortimer, estompée par la brume « le lendemain matin, sur les quais de la Tamise... ».

9. « Il passait pratiquement toutes ses soirées, tous ses loisirs, à écrire. Rageusement, comme si sa vie en dépendait. Elle en dépendait, en fait, comme pour tous ceux qui croient au pouvoir de la plume et des idées. » (XIII, « La Nuit du 3 août », Vance et Van Hamme, pl.11, [le journal de Zeke Hattaway])

Écrire, une nécessité ? Subjectif. Je le comprends pour Soljenitsyne, ou pour les professionnels qui en vivent (journalistes et romanciers en série) ; pour les autres, les Poèteuh et les Philosophes trombonistes, bah, quelle blague !

Il y a aussi les professeurs (ils rédigent leurs cours et défois ils sauraient rien faire d'autre), les scénaristes et les traducteurs.

10.

Dans l'album « La frontière de la vie », de Roger Leloup, Yoko Tsuno passe pas mal de vignettes à courir. Le dessin lui rend grâce. Dans les pages de l'hebdomadaire Spirou des années 70, Yoko Tsuno était sans doute la plus jolie héroïne, avec la Natacha de Walthéry, bien sûr.

11.

L'album « La Mort au bout du voyage », de Juszezak et Godard. La perte d'un fiancé pousse la jeune Oki à quitter le Japon. Elle est maintenant jeune fille au pair en France. Page 9, la nuit la troubla (« On marchait au-dessus de ma tête à l'étage prétendument condamné... »)

Patrice Houzeau

Malo, le 26 octobre 2022.

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