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BREFS ET AUTRES
amusettes
2 mai 2020

PASSAGE DE LA MEDUSE

PASSAGE DE LA MEDUSE

1. « Sombre. Mais l'espace plus vaste.
Moins de gens. Le sentier dans l'obscurité
mène-t-il vers une solitude plus vraie ? »
(Jean-Paul de Dadelsen, « Dépassé. Provisoirement »)

2. Elle se demandait si l'enquête du mélancolique inspecteur progressait. Elle aussi avait entendu parler de ces formes ressemblant à des visages humains cruellement décharnés. Mais après tout, ce n'est pas lui qui avait ouvert le gaz.

3. Je ne m'écoute pas s'ouvrir mon espace intérieur. Je n'ai pas d'espace intérieur. Parmi toutes ces viscères, ces organes, toute cette biologie transitoire, comment voulez-vous que j'installe un espace intérieur ? Et puis qu'est ce que j'y mettrais ?

4.« Dieu créa l'homme à son image,
      
à l'image de Dieu il le créa,
      
homme et femme il les créa. »
     
(Genèse 1.27)

C'est là le sens de l'infini car l'humain étant plutôt gratiné dans le genre n'importe quoi, s'il est à l'image de Dieu, c'est que l'est pas fini l'Eternel, mais il y travaille infiniment.

Jean-Paul de Dadelsen en était arrivé à la conclusion que c'est l'homme qui n'existe pas. Au sens où l'humain serait toujours à conquérir, où l'humain est l'être en quête de l'humain, on peut dire, en effet, que nous n'existons pas encore.

5. « Et dans l'arbre qui dort sans rêves »
(Jean-Paul de Dadelsen, « Un chant de Salomon »)

C'est vrai qu'il ne me semble pas dans la nature des arbres de rêver. Par contre, je ne vois pas pourquoi « la brise » y chuchoterait « le nom de la patrie spirituelle ». Non, elle fait comme tout le monde, la brise, elle reste chez elle à se faire cuire des œufs.

6. « L'ange apparut comme je languissais à la nuit sur le toit »
       
(Jean-Paul de Dadelsen)
C'est sûr qu'à force des confins là, va y avoir crise de lune dans les cafetières, qu'ça va languir pis gémir sur les toits qu'la nuée, va y neiger de l'ange ou d'la flying saucer...

7. « Dieu nous traverse / Comme la mer une méduse »
      
(Jean-Paul de Dadelsen, « Bach en automne »)
J'vois ça assez torpille d'la révélation, l'épiphanie fusante, mais c'est plutôt comme une pulsation qu'il nous renseigne Dadelsen, « d'un même mouvement qui tour à tour se gonfle / Et se creuse ».
Baladeuse lenteur, la méduse, noble et sentimentale comme la valse qu'c'est pas la vraie alors, qu'c'est que le fantôme de la méduse qui me plane dans la songeuse.

8. « Les religieuses à grosses joues
       
rouges, à gros mollets, à gros
       
derrière le dimanche descendent chez
       
l'oncle vigneron manger la tarte aux prunes. »
       
(Jean-Paul de Dadelsen, « Femmes de la plaine »)

Voilà du poétique, qu'il me plaît : du concret, un brin grotesque, burlesque même, farcesque. Le bref, le croquis et foin des trombones Amour, Eternité, Infini, Résilience et tout l'hermétique toutim.

9. « Le docteur a prescrit un tonique pour le cœur
       
pour faire durer l'agonisante jusqu'à l'arrivée d'une fille distraite
       
d'un fils longtemps aimé de loin. »
       
(Jean-Paul de Dadelsen, « Mort de la femme du percepteur »)

On dirait le résumé d'une page de Simenon, une de ces rapides notes explicatives par lesquelles le grand Georges savait si bien nous mettre dans l'ambiance des quotidiennetés où il promenait son commissaire à pipe.

10. « ce qui l'intéresse, c'est ce bout de chanson transfiguré et l'espace autour » (Jean-Paul de Dadelsen, « La fin du jour »)

C'est dans un passage sur le vieux Ludwig qu'on peut comprendre que c'est Beethoven « à fredonner pour lui seul » de la mélodie que plus tard il va vous la transcender, la chanson, en vous en fiche épatance et frisson, qu'ça va vous remplir d'un coup l'espace du tout seul.

11. Bon, allez, à mes copies : Sainte Syntaxe, Sainte Orthographe, Saint Style, pardonnez leur leurs offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui commencent quand même à nous les casser.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 2 mai 2020.

 

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2 mai 2020

AUTOUR DU IER MAI 2020

AUTOUR DU 1ER MAI 2020

1. En 2020, on avait l'impression que certaines maisons de retraite n'étaient plus que mouroirs et charniers. On parla aussi d'enfants atteints par le syndrome de Kawasaki. Le premier ministre n'était guère rassurant. On s'apprêtait à ne pas vraiment déconfiner, à juste voir se desserrer le cordon.

2. En 2020, il n'y eut pas de défilé du 1er mai. Certains se firent cuire des œufs ; d'autres dirent qu'ils allaient frapper sur des casseroles.

3. En 2020, non sans un soupçon d'ironie, les journalistes parlaient de « premiers de tranchée » pour évoquer toutes ces personnes dont l'utilité sociale apparut d'autant plus évidente qu'elles étaient parfois méprisées avant que la pandémie rappelle à certains politiques ce que c'était que de vivre et de mourir dans la France du plus grand nombre.
L'expression de « premiers de corvée » fut aussi employée. L'expression s'appliqua aussi à Edouard Philippe (« premier de corvées ») dont il m'apparaissait de plus en plus clairement que sans lui, la présidence Macron ne pourrait plus tenir très longtemps.

4. Entendu sur France Info à propos de l'abandon programmé des réformes en cours : « C'est la République en Marche arrière ».

5. Le 1er mai 2020, Marine Le Pen alla déposer une gerbe de fleurs au pied de la statue de Jeanne d'Arc. Jean-Marie Le Pen renouvela son appel : « Sainte Jeanne, au secours » mais cela n'avait pas le même sens qu'en 2017.

6. Le 1er mai 2020, il y eut dit-on une petite tentative de manifestation parisienne vite dispersée par la police. Des amendes furent données; il y eut des promesses de revanche.

7. En mai 2020, on disait qu'à Mayotte, certaines personnes n'avaient rien à manger et que l'épidémie y prenait de l'ampleur, laissant peu de lits disponibles dans les hôpitaux. France, 6ème puissance mondiale.

8. Le 1er mai 2020, le président Macron affirma regretter les 1ers mai « joyeux et chamailleurs » de jadis. J'ai pensé qu'il était tellement dans la distanciation sociale et le paternalisme qu'il ne se rendait pas compte qu'il prêtait à rire. « Chamailleurs », les Black Blocs de 2018 ? « chamailleurs », les débordements d'Alexandre Benala ? « chamailleurs », les Gilets Jaunes ? J'ai pensé que notre président nous prenait pour des jambons ou alors, c'est qu'intellectuellement, il était plus limité qu'il le croit.

9. En avril et mai 2020, on disait que le président Macron voulait un gouvernement d'union nationale. Ce qui signifiait que le gouvernement d'Edouard Philippe n'allait plus tenir très longtemps. Je ne crus pas à ce gouvernement d'union cependant qu'une dissolution de l'Assemblée me sembla inévitable.

10. Le 1er mai, les syndicats rappelèrent que les gens nécessaires et en première ligne dans la crise actuelle ne gagnaient parfois pas plus que le SMIC. J'ai pensé aux salaires des ingénieurs financiers et à ceux des DRH embauchés pour « dégraisser » les effectifs.

11. J'ai pensé que pendant des années, on avait dépensé tant d'argent pour des réformes de l'éducation nationale qui n'avaient abouti qu'à une défiance généralisée envers l'institution scolaire qu'il aurait mieux valu investir plus et mieux dans le secteur de la santé.

12. Nul n'annonçait ce 1er mai 2020 un report de l'épreuve orale du bac de français à septembre, voire plus tard dans l'année. J'ai pensé que c'était par pur orgueil ministériel, pure esbroufe administrative, d'autant que le baccalauréat ne ressemblait déjà plus à grand chose, miné qu'il était par un contrôle continu, qui, par définition, ouvre la porte à bien des abus.

13. J'ai pensé que la crise sanitaire du Covid-19 nous faisait passer d'une société d'abondance à une société de nécessités.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 1er mai 2020

 

 

 

1 mai 2020

DONC ZUT SE PREPARA EN METTANT SON ARMURE

DONC ZUT SE PREPARA EN METTANT SON ARMURE

1. Non, Monsieur Houzeau, je ne crois pas que The Great Pangolin Cult, ou The Big Covidian and his Pangolins ou même The Pangolins tout court soient en ce moment des noms appropriés pour un groupe de pop/rock.

2. Quand je vis Zut se préparer à aller faire des courses en enfilant son haubert et se coiffant de son heaume, je compris que la situation était grave.

3. Entendu sur France Inter un humoriste dire qu'en termes d'utilité sociale, l'ironiste de profession passait tout de suite après la farine. Certes, mais se passer de dérision, c'est laisser le champ libre aux prédicateurs et aux maréchaux de l'esprit de sérieux ainsi qu'aux bonnes âmes du politiquement correct.

4. Le confineman cé une bone chose car comme sa mon beau-pere il ne va plu au bistro dépanser les sous du chomaje a ma mere mais cé une mauvaise chose ossi le confineman car depuis mon beau-pere i regarde ma grante sœur d'un air tou bizar.

5. Non, monsieur Houzeau, ce n'est pas parce que l'on a pu un temps parler de prix négatif du baril de pétrole que les automobiles vont être montées à l'envers.

6. Depuis que j'piétine pis tourne en rond dans mon confinement, je sais que bientôt je dirai toujours la vérité.

7. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : Pangolin fâché ne fait pas virus de tout crachat – Le mur, tremblant de ce qu'il avait entendu, s'enfuit à toutes jambes – Cette année, les puces du marché iront se gratter – conjuguerons-nous le verbe covider au futur -.

8. Moi je croi quon peu mourir de la covide passque si tu te fera attrapai par un vijil du magasin s'il a la maladie i peut te doner la maladie meme sans le fere expres défois et depuis quon est confinai on peu plus fere ses courses come avan.

9. Les gens font parfois des choses dont on ne les aurait jamais crus capables. L'invisible qui tue rend visible les talents de certains. Mais moi, rien à faire, je n'arrive toujours pas à passer les murailles.

10. Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. Si tu ne m'ouvres pas la porte, je ne pourrai pas rentrer mais si tu ouvres ta porte, tu pourras me la claquer au nez.

11. Pourquoi diable voulais-je tant vous voir ? me demanda-t-elle. Je lui répondis que j'avais bien tenté de lire dans ses pensées mais que l'attifée fantasque aux yeux fous pis à couteau brandi qui m'avait alors jailli dans les yeux m'avait assez décontenancé.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 1er mai 2020.

1 mai 2020

EN CHATOUILLANT LE PANGOLIN

EN CHATOUILLANT LE PANGOLIN

1. Si tu chatouilles le pangolin, ne t'étonnes pas de cracher tes poumons. (Maxime d'origine incontrôlée)

2. Il ne s'agit pas de prendre de la tarte aux pommes quand on préfère la tarte aux abricots. Ce sont des choses qui ne se sont jamais faites dans cette maison et depuis qu'elle est revenue sur terre, nous sommes particulièrement vigilants à la bonne tenue du service à dessert.

3.Il faut toujours faire de son mieux quand bien même on serait plein de quand bien même qu'on aurait du quand bien même qui nous coulerait comme larmes, comme bave comme quand on a très faim.

4. Elle aperçut de l'autre côté de la rue quelqu'un de sa connaissance. Mince se dit-elle et moi qui m'suis rendue invisible parce que personne ne me voyait plus. Elle se concentra mais ne réussit à apparaître qu'en partie. Tiens, la chatte du Cheshire se dit la sœur d'Alice.

5. Elle appela : « A table ! » et tous moururent. Ah ces champignons.

6. C'est dans les derniers instants de son existence qu'il se rappela cette phrase que sa mère lui disait parfois : « Il faudrait quand même que tu apprennes à vivre. »

7. Souvent l'on manque de confiance en soi. Faut dire que l'on se ment beaucoup à soi-même. Lui-même finit donc par se méfier de vos sautes d'humeur, de votre impulsivité. Parfois, il en vient à sortir de vous et l'on dit alors que vous êtes hors de vous.

8. Vous étiez devant moi et c'était bien là ce que vous disiez. Ainsi Zut s'adressait-elle à son image revenue dans le miroir. Celle-ci ne nia pas et pria Zut d'excuser ce petit moment d'absence. C'est bon pour cette fois, répondit Zut, mais n'y retournez pas.

9. Y a tous ces infinis qui sans cesse se suivent se poursuivent se croisent et s'entrelacent, et il y a nos travaux et nos jours, c'est juste drame express, écrasement d'la fourmi, cailloux.

10. Il se pépiait chez les oiseaux qu'on voyait de moins en moins de bipèdes dans les rues. Serait-ce de notre faute ? s'interrogeaient quelques moineaux. Un merle les rassura en leur parlant du commerce frauduleux du pangolin. Quant aux albatros, ils se fichaient bien de tous les équipages.

11. A force de tourner autour de l'art contemporain, vous finirez par tomber dedans et c'est en vain que l'on vous cherchera dans tout ce conceptuel du vide du trou du manque du puits sans fond ni forme.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 1er mai 2020.

1 mai 2020

ALORS LA MORT PASSA SUR SON CHEVAL VIRUS

ALORS LA MORT PASSA SUR SON CHEVAL VIRUS

1. Je pense que l'oral de l'épreuve de français du bac 2020, s'il a lieu, ce sera soit en visioconférence, soit masqué, et peut-être même les deux. En tout cas, pour contrôler leur identité, faudra qu'ils se démasquent, les candidats, le temps d'un coup d'œil. Sinon, gare aux fantômes.

2. En 2020, j'ai pensé que la réforme Blanquer ayant déjà fait pas mal de dégâts dans les lycées, il ne fallait pas aggraver l'état du mammouth et faire comme en 1968, le donner, ce bac, encore qu'en 68, les candidats ne risquaient pas leur vie et le diplôme avait une certaine valeur.

3. J'ai pensé que le maintien de l'épreuve de l'oral de français du baccalauréat 2020 relevait plus de l'esbroufe administrative que d'une réelle nécessité pédagogique. Et pourquoi pas le faire passer en terminale, c't'oral (c'est-à-dire l'an prochain lors d'une session extraordinaire) ?

4. Alors ils ont tant dit alors ils ont tant dit
   Tant dit tant dit tant dit que j'en ai du mal aux
  
Oreilles puis au cœur puis au ventre et aux os
  
De ce qu'ils ont tant dit tant dit tant dit tant dit.

5. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : Le patient invisible aurait été aperçu – Fantômas planchera sur un texte hermétique - La chloroquine serait-elle soluble dans l'eau de boudin - Le barbu flegmatique est à la manœuvre – On regrettera le recalé définitif.

6. « la loi qu'il s'agit de m'imposer comme agent, devient, puisque je l'élève au rang de la loi universelle, valable aussi pour moi comme patient, et c'est sous cette condition, comme patient éventuel, que je ne puis consentir absolument à l'injustice et à l'insensibilité. » (Schopenhauer traduit par Auguste Burdeau, « Le Fondement de la morale »).

De fait, nous sommes appelés à être plus patients qu'agents, les élections étant soigneusement préparées pour que les résultats aillent dans le sens qui convient le mieux à la continuité des Etats.

7. C'est parce que nos démocraties ne sont que formelles qu'elles sont vivables. L'imperfection de l'exécutif nous permet de le critiquer et de nous arranger comme nous pouvons des lois et des règlements. Une démocratie parfaite (chose heureusement impossible) ferait de nous les éternels apprenants d'un lycée universel où chacun de nos gestes serait évalué par les garants administratifs de la loi.

8. Je crains cette société du « care » que les impératifs de la crise sanitaire actuelle nous promettent comme étant la seule légitime. Nous ne serions plus alors que les « patients » de la loi de la solidarité obligatoire et notre droit inaliénable (par définition) à l'indifférence serait nié : je crains le jour où l'indifférent, le singulier, le sceptique, le caustique passeront en jugement pour manque flagrant de fraternité.

9. Avec toutes les crises qu'on nous annonce là (économique, migratoire, climatique) en plus d'la crise covidienne là, ça ne m'étonnerait pas qu'on crée bientôt une chaire de collapsologie au Collège de France.

10. Il songeait au scandale du manque de masques ; il prit tranquillement son étui à cigarettes et se mit dans la tête une jeune fille dansant sur un rythme de rumba. Puis sirotant son whisky, il pensa aux lettres anonymes et à celles aussi au bas desquelles figurait une silhouette de pangolin ricanant.

11. Alors la Mort passa sur son cheval Virus.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 1er mai 2020.

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30 avril 2020

GENRE L'ETRE DU TEMPS

GENRE L'ETRE DU TEMPS

1. Démystification du lyrique chez Laforgue : si le soir est « doux », c'est qu'il y a « vieillard lubrique » et le si baudelairien chat, s'il est comme dans les vers de l'amateur de spleen, comparé à un « sphinx », ce qu'il contemple, le matou, « de sa prunelle fantastique », c'est une « lune chlorotique ».

« Ils prennent en songeant les nobles attitudes
  
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes ;
  
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin ; »
  
(Baudelaire, « Les Chats »)

« Voici venir le soir doux au vieillard lubrique,
  
Mon chat Mürr, accroupi comme un sphinx héraldique,
  
Contemple inquiet de sa prunelle fantastique
  
Monter à l'horizon la lune chlorotique. »
  
(Jules Laforgue, « La première nuit »)

2. Forcé que « Sous un ciel pluvieux noyé de brumes sales », - on dirait s'tout noyé là, un ciel à la Turner -, elle soit « grisâtre », la méditation, même que le narrateur se sent « perdu dans l'horizon lointain », dans «' L'Espace sans borne » et le Temps qui « n'aura jamais... jamais de fin. »

« Je reste là, perdu dans l'horizon lointain
  
Et songe que l'Espace est sans borne, sans borne,
  
Et que le Temps n'aura jamais... jamais de fin. »
  
(Jules Laforgue, « Méditation grisâtre »)

3. J'aime bien quand il y a de l'écho défois dans la poésie, genre l'infini te répond que t'es bien seul, mon gars, dans l'« Espace sans borne, sans borne » pis le Temps à « jamais... jamais de fin », un Temps abstrait, genre l'être du Temps à « plus d'heures », pis l'Espace, pareil, « plus d'humains » pour le traverser.

« Partout le grand ciel gris, le brouillard et la mer,
  
Rien que l'affolement des vents balayant l'air,
  
Plus d'heures, plus d'humains,... »
  
(Jules Laforgue, « Méditation grisâtre »)

4. La poésie, c'est du rythme, d'la percussion dans sa caboche, qu'ici les consonnes renforcent les accents – timbales j'vous dis - :

« Le vent / jusqu'au matin / n' a pas (/) décoléré /
  
Oh ! Ces quin - / - tes de toux / d'un chaos / bien posthume, »
  
(Jules Laforgue, « Complainte des grands pins dans une villa abandonnée »)

5. Défois, très mortifère l'agitation des vivants, qu'on sait qu'en 2020, on doit tout arrêter, cause covid, que le « trop plein », la « fureur », le bouillon de culture des sueurs et des muqueuses ça vous fait « chaque jour » du consternant dans les hôpitaux.

« Mais Paris n'entend rien. Dans sa fureur muette,
                 
Morne alambic toujours trop plein
  
Qui travaille et qui bout et chaque jour rejette
                 
Les choses mortes de son sein. »
  
(Jules Laforgue, « Guitare »)

Patrice Houzeau
Les Confins, le 30 avril 2020.

30 avril 2020

NOUS FERA-T-IL VIRER CHEVRE CE VIRUS DIS

NOUS FERA-T-IL VIRER CHEVRE CE VIRUS DIS ?

1. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : Ne vivez plus, vous survivrez – Respectez les gestes barrières : fuyez à toutes jambes. - On demande un professeur de civilisation précovidienne. - Le retard du train des réformes est pour l'instant indéterminé -

2. J'ai pensé que Zut était tellement vipérine que le jour où l'on découvrira ce qu'elle n'a pas publié, les gens viendront à son enterrement lapider son cercueil.

3. Alors Dieu créa le monde. Puis il l'oublia. Quelques éternités passèrent et puis Dieu se souvint de nous. « Ah ouais quand même... » dit-il en se massant le menton.

4. C'est curieux comme l'on peut se tromper : Macron, je l'aurais bien vu vendeur chez Devred, moi. En plus, il parle anglais, ça peut être utile, à Dunkerque, ou à Calais.

5. Avec sa toux de fumeur, son nez d'allergique, ses dents qui se font fait la malle depuis des lustres, son haleine de buveur de bistouilles et sa tumeur à la mâchoire, en ce moment, quand il sortait, il avait l'impression d'être quasiment quasimodo.

Note : Il ne faisait guère de doute que sur la liste des gens à tester du covid, il serait vite désigné volontaire par l'anonymat de la population et l'ensemble des personnels de l'administration bienveillante.

6. Défois Cioran et Céline à sa bouteille qu'on conte et soliloque qu'l''avenir c'est l'humain tout déchet, mongol partout ; la Chine à Brest ; les autres aussi d'ailleurs, partout ! Nos pommes, dans les choux ; foire à grotesques, tellement que ceux qui naguère lisaient le bon français des moralistes verront leur cerveau fuir sur leurs petites pattes neuronales là pis dans la rue comment que j'rentre moi.

7. En l'an 3120, le culte du Grand Pangolin s'était répandu partout et le port du Saint Masque quasi universel. On priait chaque jour l'Immaculée Distanciation et l'usage du prénom étant considéré comme une entorse à la règle du rapprochement de nécessité absolue, tout le monde s'appelait Monsieur, ou Madame.

8. Le politique est celui que l'on critique pour se consoler de savoir qu'à sa place, on ne ferait pas mieux.

9. On avait jadis prédit à Zut qu'elle mourrait du bâton qu'elle avait elle-même taillé pour se faire battre. « Oui, mais comme ce sera de la main tendue que j'aurai tranchée, je ne crains pas grand chose » répondait-elle parfois.

10. Nous fera-t-il virer chèvre, ce virus, dis ? Not' pays s'nommera-t-il bientôt Covidie ? Sommes-nous condamnés à n'vivre que masqués ? Quand serons-nous enfin vraiment déconfinés ?

11. En 3120, il était admis que les vagues successives de la Grande Pandémie avaient été l'élément déclencheur de l'Universelle Résilience. Le libéralisme et la démocratie sociale étaient considérés comme des archaïsmes, voire des hérésies condamnables.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 30 avril 2020.

29 avril 2020

ICI LES CONFINS LES CONFINES PARLENT AUX AUTRES

ICI LES CONFINS LES CONFINES PARLENT AUX AUTRES

1. Pis comment qu'on s'en sort qu'on va finir par donner sa langue au pangolin comme on disait en 2020 avant qu'on se rende compte que mais c'était trop tard.

2. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : Les premiers de cordée sont tombés sur le pangolin – Mascarade en Macronie n'est pas notre projet - Personne ne ment puisqu'on vous le dit – La machine vomit des fantômes – Je répète : La machine vomit des fantômes - Félicie aussi.

3. Bon faut qu'je leur donne du boulot à distance aux apprenants en situation de confinement passque les politiques ça fait des années qu'ils dépensent nos impôts en réformes à se faire jeter les contribuables par la fenêtre et donc : En une vingtaine de lignes, vous expliquerez en quoi l'expérience du confinement a enrichi, ou pas, votre perception de l'autre et a, ou non, changé votre regard sur le monde.

4. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : - Est-ce vraiment la vérité qu'on nous ment – Ma tante dit que c'est la peste mais mon oncle penche plutôt pour le choléra – Tous ceux qui ne portent pas de masques seront démasqués – Je ne prendrai pas de nouilles avec mon pangolin.

5. Est-il vrai que Godzilla va prochainement être remplacé par Pangola ? Faudra que j'demande à Blanquer, lui qui sait tout, j'suis sûr, i saura me renseigner.

6. Ai entendu à la radio que Jean-Michel Blanquer (fonctionnaire modèle) n'excluait pas l'idée d'une réouverture des lycées non pas en juin mais en septembre. Ah tiens il prend les devants. C'est-y pas qu'il commencerait à se rendre compte qu'on lui dit pas tout ?

7. Le matin à la radio y a une espèce de sociologue qui explique à nous autres pauvres crétins qu'nous sommes, le bien fondé des gouvernemances là. Aujourd'hui le prédicologue nous a conté que Macron s'rait tantôt jacobin pis aussi girondin qu'à mon avis l'est plutôt dans l'pétrin.

8. Je ne suis pas tellement choqué que le gouvernement gouvernât à vue ; n'ayant pas vu venir le virus, sont bien obligés de se démerder comme ils peuvent. Les autres génies d'la chose publique d'opposition ne feraient pas mieux. Mais quand même, quelle bande de.

9. Les politiques, ces niais qui comptent sur la bienveillance, la patience, la bonne volonté et la crédulité des Français et qui s'étonnent ensuite de se prendre des gamelles aux élections.

10. Veuillez écouter quelques ironies personnelles : La réforme est dans la choucroute – Le café-croissant au bar du coin n'est pas pour demain – Le petit Manu énerve le grand Edouard – Ne donnez pas vos sous, vous en aurez besoin – Quand on marche à reculons, on finit par se faire enquiquiner.

11. Alors mon lit m'appela : « Tu viens t'coucher ou quoi ? ». J'écrasai quelques gouvernements dans mon cendrier, finis mon verre d'amère ironie et allai rejoindre mon repose-couenne à caboche.

Patrice Houzeau,
Les Confins, le 29 avril 2020.

 

 

28 avril 2020

JE M'APERÇOIS DU PAS TERRIBLE D'L'AUJOURD'HUI

JE M'APERÇOIS DU PAS TERRIBLE D'L'AUJOURD'HUI

1. Si l'on fait tourner les tables de multiplication, est-ce que les esprits répondants en seront plus nombreux pour autant ?

2. En démocratie, l'esprit des lois est une hantise nécessaire.

3. Je m'aperçois aujourd'hui et je me demande s'il va ressembler à hier.

4. « Les yeux à l'autre bout de la rue, elle continua »
     
(Agatha Christie traduit par Michel Le Houbie)
      
Et du coup, elle se cogna.

5. En avril 2020, on disait que les Français avaient l'impression qu'on leur avait menti. Henri Weber mourut du coronavirus. On disait qu'en ce qui concernait la réouverture des établissements scolaires à partir du 11 mai, « la responsabilité n'était pas anecdotique ».

6. Du souci dans l'affectif, besoins d'argent, qu'on croit plus aux miracles qu'le monde c'est d'l'hostile latent qu'attend juste son moment pour nous attraper à la qu'on l'remâche ça qu'on r'tombe qu'on r'chute dans sa chute puisqu'on chute qu'on s'dit.

7. « Aussi, veut-on savoir si un homme parle d'après ce qu'il sait ou d'après ce qu'il désire ? Il ne faut pas s'en remettre au témoignage de sa conscience à lui : c'est à son intérêt que d'ordinaire il faut regarder. »
(Schopenhauer traduit par Auguste Burdeau, « Le Fondement de la morale »)

L'intérêt fait sincérité.

8. Je suis parfois épaté de l'émerveillement exprimé par ces observateurs plus ou moins professionnels des étoiles et qui tiennent tant à nous faire part de la beauté de la chose. Il m'arrive de douter de leur sincérité. Pour ma part, une ou deux minutes de cette contemplation sidérale me suffisent. Je crois qu'en fait, je m'en fous.

9. C'est une partie de jeu de go, le but étant de donner au covid le moins de territoires possibles cependant que l'on sait qu'il s'infiltre, empoisonne notre temps et nos espaces.

10. Ce n'est pas au virus qu'il faut en vouloir, ce n'est pas au virus qu'il ne faut pas pardonner, c'est aux politiques qui ont abandonné la recherche et le secteur de la santé au profit de réformes ineptes et du cirage des bottes des « premiers de cordée » si utiles en période électorale.

11. Ah ça y est, avec le covid pis la crise, France Inter nous fait le coup d'la « méditation de pleine conscience ». C'est ça, méditez, méditez, mes doux agneaux, ça vous évitera de contester, pis aussi de manifester.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 28 avril 2020.

 

27 avril 2020

SOCIAL L'ANIMAL AH FATALITAS

SOCIAL L'ANIMAL AH FATALITAS

1. « Or pour l'homme, cela seul est réel, qui est objet d'expérience, ou qui pourrait, à ce qu'on suppose, le devenir à l'occasion. » (Schopenhauer traduit par Auguste Burdeau, « Le Fondement de la morale »)
L'humain expérimente l'humain. A l'infini dis c'te travail pis le pire, aussi le meilleur. Sinon, animal ordinaire l'humain, bête apprenante. Et bien sûr, cette acharnée expérimentation transcende et de loin la bienveillance très niaise du pédagogisme à la mode.
Note : A cet égard, le « à l'occasion » de la traduction est délicieux.

2. « La nature reprend ses droits » ; « la vie reprend ses droits » : fichaises : il n'y a pas de droit naturel. Accorder des droits à on ne sait quelle « vie naturelle », c'est reconnaître le droit à la tout aussi naturelle mort de nous annihiler comme elle l'entend. La mort n'a aucun droit sur nous. Nature, vie et mort ne sont que des faits régis non par les lois, mais par les principes de la physique.

3. Parce que l'humain est un animal social, il est fatalement dangereux et nécessairement solidaire.

4. « Maintenant, pour aller au fond, cette idée de « fin en soi » soulève la même objection que celle du « devoir absolu » : une même pensée cachée, bien plus inconsciente, se trouve sous l'une et l'autre : c'est la pensée théologique. »
(Schopenhauer traduit par Auguste Burdeau, « Le Fondement de la morale »)
Le dieu caché dans l'en-soi. On ne s'étonnera pas après de la dimension chrétienne de gauche du pédagogisme : bienveillance, universalisme des valeurs, enseignement d'on ne sait quelle « morale citoyenne », mise en place d'une propagande multiculturaliste, déni du droit à l'indifférence.

5. Il n'y a pas très loin entre reconnaître l'autre comme une fin en soi et « tendre l'autre joue » : c'est ainsi qu'on finit crucifié. L'autre n'est jamais une fin en soi, il n'est qu'un horizon des possibles relatifs, une suite de faits dont je suis, quoi qu'il m'en coûte, seul juge.

6. Nous vivons en ponces pilates et raisonnons comme des disciples du crucifié : en période de crise, nous nous émerveillons de chaque acte de solidarité comme d'une preuve de la capacité de l'humain à se dépasser et nous refusons de prendre en compte l'inconséquence universelle et le surnombre.

7. Je me demande si la devise cachée de l'éducation nationale ne serait pas des fois « Heureux les affligés, car ils seront consolés » par des pédagogues bienveillants et des diplômes sans valeur.

8. Serons-nous bientôt obligés de quitter le monde de nos libertés individuelles pour rentrer dans un monde régi par les experts, les politiques et les communiquants ? Il ne nous resterait plus alors qu'à devenir les citoyens consentants d'une technocratie d'autant plus dangereuse qu'elle se prétend bienveillante.

9. Qui peut penser sérieusement qu'un gouvernement de gauche renonçât longtemps aux ventes d'armes, au tourisme de masse, à l'industrie du luxe, aux petits arrangements avec les nécessaires paradis fiscaux ?

10. S'imaginer que l'accès de tous à une culture conforme aux principes de l'humanisme le plus en vue rendrait nos concitoyens meilleurs qu'ils le sont, est aussi naïf que de s'imaginer que le monde est divisé en deux camps : celui des gens éduqués et donc forcément bienveillants et celui des soi-disant « incultes » et qui fatalitas ! ne pourraient donc que se comporter comme des brutes.

11. Qu'il est naïf celui qui s'imagine que le migrant parce qu'il est ingénieur ou avocat n'aurait pas jadis collaboré avec une entreprise terroriste.

Patrice Houzeau
Les Confins, le 27 avril 2020.

 

 

 

 

 

 

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