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BREFS ET AUTRES
10 avril 2023

EVERY MOTORIST MUST HAVE TOOLS HANDY

EVERY MOTORIST MUST HAVE TOOLS HANDY

1.
« Les yeux gris de Louise demeurèrent stupides et ne cillèrent pas. « Qu'est-ce que c'est, si ce n'est pas un crocodile ?
- Une créature qui n’existe plus. »
(Tracy Chevalier traduit par Anouk Neuhoff, « Prodigieuses créatures » [la narratrice])

Le mot « créature » rime avec « peinture ». C'est que la peinture sert à peindre des créatures. Aucune n’existe mais certaines ont un référent dans le réel.

La vache réelle est la référente de la vache peinte qui, elle, n’existe pas en tant que vache.

Certains disent que la peinture révèle l'être des créatures. Je ne suis pas d'accord avec cette façon de regarder les vaches. Je pense que la peinture révèle surtout l'être de la peinture, et le talent éventuel du peintre.

2.
Je me demande s'il existe des fantômes de châteaux de cartes. Des spectres de joueurs malchanceux peut-être. Pour ce qui est des châteaux en Espagne, il doit s'agir d'esprits rêveurs, ou d'ectoplasmes désillusionnés.

3.
Étant d'un caractère porté à la mélancolie, vous ne serez pas étonnée, Élodie, que mes films préférés, et de loin, soient des comédies. Cela va des Marx Brothers à Pascal Thomas et Patrice Leconte, en passant par Mel Brooks et l'art de la parodie à l'américaine façon Leslie Nielsen.

Le mieux, c'est quand ces comédies sont à la fois drôles et poétiques, comme savaient en faire Jacques Tati et Jerry Lewis.

Bref, contrairement à ce que peuvent dire des critiques grincheux et parfois de mauvaise foi, je pense que l'acteur Louis de Funès a fait plus de bien à ses contemporains que bien des films dits « sérieux », « profonds », « engagés » et toutes ces sortes de choses.

4.
« J'ai lu aujourd'hui près de deux pages
du livre d'un poète mystique,
et j'ai ri comme qui a beaucoup pleuré. »
(Fernando Pessoa traduit par Armand Guibert, « Le Gardeur de troupeaux »)

Le mot « mystique » vient du latin « mysticus » qui signifie « relatif aux mystères » dont regorgent les religions. Le mot « mystique » rime avec moustique. Qu'un moustique fût mystique, voilà qui m'époustouflerait. On peut, bien sûr, faire rimer « mystique » avec « élastique », surtout si l'on considère que certains religieux font parfois preuve d'une morale singulièrement élastique.

Ceci dit, il doit bien arriver qu'un mystique soit enquiquiné pis piqué par un moustique...

5.
« Every motorist must have tools handy in case of a breakdown. »

J'affectionne les exemples de grammaire. Ceci dit, je ne sais pas trop quoi en faire, n'allant jamais ni en Angleterre, ni en Allemagne, ni nulle part où il me serait impossible de me réveiller dans mon lit puis d'écouter du jazz en feuilletant quelques-uns des livres accumulés. Je considère grammairiens et lexicographes comme autant de collectionneurs d’exemples et en ce sens, ils me sont précieux.

« Chaque automobiliste doit avoir des outils à portée de main en cas de panne » ; cela est sans doute très juste mais ne m'est pas d'un grand secours si je veux composer une tragédie en vers intitulée « Iphigénie ». Outre que je me suis demandé si « in case of breakdown » n'était pas plus usité et que le grand Racine m'a devancé en 1674 (je n'étais même pas né, quel manque de fair-play !), il est très difficile de faire rentrer le mot « automobiliste » dans un alexandrin évoquant la noble figure d'une princesse grecque de l'Antiquité. Peut-être quelque chose dans les prédictions de Calchas, du genre :

« Vous armez contre Troie une puissance vaine, »
[C'est de Racine], mais les dieux en sortant
De leurs desseins m'ont laissé une liste.
Il y est inscrit que chaque automobiliste
Doit avoir des outils à portée de main en
Cas de panne. Ce sont les dieux, on ne comprend
Pas toujours tout... Pour ce qui est de votre peine
A démarrer vaisseaux et guerriers, y a bin
Kekchoz, mais ça va pas vous plaire, je le crains.

Patrice Houzeau
Malo, le 10 avril 2023.

 

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10 avril 2023

LE MOT ANGLAIS SPLEEN SIGNIFIE RATE

LE MOT ANGLAIS SPLEEN SIGNIFIE RATE

1.
« MÉNON : J'avais déjà ouï dire, Socrate, avant que de converser avec toi, que tu ne faisais autre chose que de t'embarrasser toi-même, et embarrasser les autres... »
(Platon traduit par Victor Cousin, « Ménon »)

De sorte que Socrate étant mortel et s'embarrassant soi-même, et les autres étant, eux aussi mortels, Socrate embarrasse aussi les autres. Quant au chat, à la voix active, il mange la souris.

2.
Pour changer de tête plusieurs fois par jour, il faut avoir au moins une tête ; car si vous n'avez pas de tête, vous passez votre temps à chercher où vous avez bien pu les mettre, toutes vos têtes. Bien sûr, vous vous entêtez, et ça devient vite un véritable casse-tête.

Moi, par exemple, je n'ai pas beaucoup de têtes de rechange (ce qui fait que je fais souvent une même et monotone tête de circonstances). Par contre, je sais parfaitement où j'ai rangé toutes les mains tendues que j'ai tranchées.

3.
« Spleen » en anglais signifie « rate ». La « mélancolie » ou « bile noire » passait pour la sécrétion de la rate, selon la théorie hippocratique des humeurs. »
(Analyse des « Fleurs du mal », par Georges Bonneville, Hatier, coll. « Profil d'une œuvre »).

Le « spleen », souvent, moi, je ne sais pas quoi en faire. Si je le mets en bouteille, le spleen se met à me taquiner. Quand il boit, le spleen commence toujours par se moquer de moi, gentiment, puis très vite, il me harcèle, jusqu'à ce que je le libère, et une fois la bouteille ouverte...

Le spleen ne s'abandonne pas dans la rue, comme un vulgaire député, il vous suit comme une ombre. Je pense même qu'il est notre ombre. C'est pour ça que je coupe de plus en plus souvent France Info et toutes les idioties de ce monde.

4.
« Il peut leur arriver d'aller sur la plage et de regarder les falaises d'un air renfrogné comme s'ils contemplaient une exposition de tableaux à mourir d'ennui. »
(Tracey Chevalier traduit par Anouk Neuhoff, « Prodigieuses créatures »)

Je me demande si être assidu aux différentes expositions et salons qui animent nos provinces et excitent les peintres du dimanche est un moyen si sûr que cela de se suicider.

C'est sans doute pour cela que certains « renfrognés » préfèrent aller sur la plage et « regarder les falaises ». On ne sait jamais, il pourrait y avoir quelque animation fatale.

5.
« Paraissez ; et bientôt sans attendre mes coups,
Ces flots tumultueux s'ouvriront devant vous. »
(Racine, « Iphigénie », V,2 [Achille à Iphigénie])

Donc, si je comprends bien, pour Achille, il suffit de frapper la mer pour qu'elle s'ouvre. Biblique.

6.
J'ai longtemps cru que le dalaï lama était une espèce protégée de camélidé herbivore et sentencieux.

Patrice Houzeau
Malo, le 10 avril 2023.

3 avril 2023

LE VERRE EST VIDE PLAIGNONS-NOUS !

LE VERRE EST VIDE PLAIGNONS-NOUS !

1.
« un océan d'erreurs » qu'il dit le Faust à Goethe... on bredouille, barbote, grenouille, psychote... Ça va jamais tout droit... serait trop facile... faut du tintouin, du stress, qu'on « use de ce qu'on ne sait point », à tâtons, à faut voir... et « ce qu'on sait », souvent, on ne sait quoi en faire. L'avait bien vu, Goethe.

2.
L'humain est le moins rationnel des animaux, lesquels n'ont pas plus de raison que ça.

3.
« le corps n'a point d'ailes », qu'il dit le Faust à Goethe, l'est trop lourd le corps « pour accompagner le vol rapide de l'esprit. » Qu'on s'la traînasse défois la carcasse... Pourtant pas fainéant, l'humain... admirez l'ouvrage ! … Des siècles que ça lui aura pris pour le préparer, son grand massacre définitif.

4.
« les gouffres enflammés »... c'est la mer qu'il évoque, le Faust à Goethe... la mer, la porteuse d'horizons, qu'on les zieute défois mélancolique et les mains dans les poches, qu'on s'dit qu'on ira jamais dans ces lointains là-bas... et puis on y ferait quoi... si c'est pour y voir des aussi paumés...

5.
« Cependant le Dieu commence enfin à s'éclipser », qu'il dit le Faust à Goethe... A mon humble avis, depuis qu'on l'a inventé, il n'arrête pas de s'éclipser, le Dieu... surtout quand il entend les conneries que débitent ceux qui parlent en son nom.

6.
« mais on est si méchant dans notre endroit », qu'elle dit, Marthe dans le Faust de Goethe et Nerval... c'est qu'y en a des qui surveillent... qui blablatent et délatent... blattes et cafards... Au 21ème siècle, la téloche montre l’exemple... faut abattre çui-là, celle-là, casse-pipe dans la nation... tribunal audiovisuel... se font du pognon en balançant... têtes de cons péremptoires...

7.
La plupart des gens ne sont ni de gauche, ni de droite, ils sont de leur gueule, et ce n'est pas si facile.

8.
« Je vois avec effroi venir cela de loin », qu'il dit le Méphistophélès en alexandrin et traduit par Nerval... On le voit tous venir de loin, le « cela » des apocalypses modernes... de moins en moins loin... de plus en plus que ça va nous péter à la tronche.

9.
« Ma mère est là, assise sur la pierre », dit Marguerite... Coup de froid dans la phrase... « Le froid me saisit à la nuque ! »... ajoute Marguerite. Nous vivons avec nos morts et avons l'air de vivants... Le réel, défois, c'est comme un évier, il se vide.

10.
« Cette fantasmagorie est cependant ton ouvrage », dit Méphistophélès à Faust dans le « Second Faust »... C'est qu'ça ouvrage sec, dans la fantasmagorie... faut les persuader, les gens, qu'elle vont revenir les Trente Glorieuses, la sainte Croissance, le divin Plein Emploi, la miraculeuse Réindustrialisation... Faut qu'ils y croient, à la salutaire Résilience, à l'immaculée Start-up Nation... Sinon, i vont s'décourager, les gens... pire peut-être, hein.

11.
Tout compte fait, on doit au Covid et à la sale guerre de Poutine en Ukraine de nous avoir ouverts les yeux sur l'incurie de nos dirigeants.

12.
Quand mon verre est plein, je me moque de Dieu. Quand il est vide, je n'y crois plus.

13.
3 avril 2023. Entendu sur France Inter un humoriste (un chroniqueur on dit maintenant) dire : « Imaginons que je détourne 25 euros, - je suis nul en magouilles, sinon, vous pensez bien, je serais au gouvernement. » Ah c'est pas moi qui le dit hein.

Vous me direz, mais non, c'est juste un bon mot... un « bon mot », un « trait »... certes, dans les années 70, c'était juste un trait d'esprit... en pleine crise des institutions, ce bon mot, beaucoup y croient, et la Macronie de passer pour un club de magouilleurs potentiels.

Ce qu'elle est aussi, je n'en doute pas un instant.

14.
Ah certes, comme dit le « bourgeois » du Faust de Goethe, « rien de mieux, les dimanches et fêtes, que de parler de guerres et de combats, pendant que, bien loin, dans la Turquie, les peuples s'assomment entre eux. » Et pourtant, si on n'en parle pas de la sale guerre de Poutine en Ukraine, on finirait par la relativiser. Parler des guerres, c'est évoquer l'essentiel de la condition humaine : la lutte, la lutte pour la vie enjolivée par la sottise des humanismes et universalismes divers.

15.
La démocratie et la liberté de la presse permettent de dénoncer les scandales politiques. Du coup, écœurés, les gens ne votent plus. Et voilà la démocratie menacée par les rapacités extrémistes.

16.
Certes, nous devons à Voltaire, à Rousseau, à Montesquieu notre liberté d’expression. Ce qui nous différencie, c'est que ces géants croyaient en l'humanité. Nous, depuis les grands massacres hitlériens, staliniens, africains, nous n'y croyons plus.

17.
Chus bête moi, pis pas bien riche... La langue qu'on m'cause, j'la pige de moins en moins... j'me dédale dedans, j'm'y heurte-caboche... J'me troudukilise... j'me vieille-le-clown... pas plus méchant qu'autre zig, j'me paume quand même dans vos gueuleries et bois d'langue.

18.
Chais pas qui dans Playboy. Schiappa qu'elle s'appelle... L'est pas au gouvernement elle ? M'en fous, fait s'qu'elle veut. Playboy, j'l'achète pas. Pour quoi faire ? Faire vivre l'écrivaille ? Y en a d'trop. Quicétykicritique ? Borne, paraît, pisse-vinaigre.

19.
Qu'on s'radicalise dis, L'Europa-droite toute. 3 avril 2023, Sanna Marin, premier ministre de Finlande, battue aux législatives par la droite d'là-bas (m'en fous d'ailleurs de ces nordiques, moi j'aime que le tango qui fait chialer)... France Inter soupire ; ma pomme rit jaune...

Après, la Finlande devient le 4 avril 2023 membre de l'OTAN. Poutine et Lavrov doivent débander sec dis. Si tant est que ces saucissons bandassent encore.

20.
Tirs de mortiers d'artifice (cékoidonc?) dans un lycée de Mantes-la-Jolie (terre de contrastes)... C'est l'effet Meirieu. Ah non, quand même, Houzeau, vous exagérez ! J’exagère que couic, zavez vu l'bordel que c'est devenu l'éducnat pédagogo-bienveillante-résiliente-apprenante à la France ! Et encore, Meirieu, c'est que dalle, un bafouilleur en histoire, un scribouilleur à rentes, mais ça sinistre-le-clown sec du côté de ceux qui l'ont pris au sérieux, le merveilleux d'France Inter quand France Inter déconne au lieu de nous passer du Pink Floyd.

21.
« Je suis comme vous, mon cher voisin ; qu'on se fende la tête ailleurs, et que tout aille au diable ; pourvu que chez moi rien ne soit dérangé. »
(Goethe traduit par Nerval, « Faust », [troisième bourgeois]).

Le réel, il s'ordonne, il se range, il se ménage... c'est pour être heureux en famille, c'est pas pour se laisser troubler par des gens qui ont le mauvais goût de se faire massacrer par leurs voisins, lesquels ont leur siège à l'ONU et parlent un russe tout à fait compréhensible pour un fantôme de la Waffen-SS.

22.
J'entends parler ici et là d'Olivier Faure. Kicéty ? - Personne. Ah oui, il me semblait bien.

23.
Donc i paraît que la tactique de Tik-tok, c'est le micmac.

24.
Tiens, i paraît qu'il y a du rififi au « Canard enchaîné ». Une histoire d'emploi fictif que le coin-coin voudrait étouffer dans l’œuf on dit. Je sais rien de l'affaire. Donc, on la boucle. De toute façon, le Canard, je peux pas me le payer. Et quand bien même je le pourrais, je m'en tape, du Canard. C'est pas eux qui mettent du beurre sur mon pain.

25.
Le PS, il est mort. Le LR, agonisant. Macron règne. Mélenchon gueule. Marine Le Pen attend son heure. En français, on appelle cela « être dans la merde ».

26.
Un peu du Philippe Sollers de « Légende » (bon livre), j'annote : « En 1945 » (euh oui), les Éditions Gallimard (prestige donc) publient, dans leur collection « Tradition » (ah), un livre d'une grande importance (vous m'en direz tant... important pour qui?) de l'ésotériste René Guénon (ésotériste, quoi qu'c'est ?), « Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps ». Son propos est très clair (ce n'est donc pas un ésotériste hermétique, tant mieux, parce que je comprends rien à René Char, mais c'est beau quand même, René Char) : un cycle va finir, et le monde moderne tout entier (quel monde moderne ? L'Occident ou le monde dans sa pitoyable universalité) va se dissoudre comme une illusion. » (Je sais ce que c'est, j'en mets tous les matins dans mon café). Suit une citation de Guénon, dans le genre ampoulé que je préfère regarder un film des Monty Python.

Patrice Houzeau
Malo, le 3 avril 2023.

29 mars 2023

L'HISTOIRE AVEC UNE GRANDE VACHE ET AUTRES APPROXIMATIONS

L'HISTOIRE AVEC UNE GRANDE VACHE ET AUTRES APPROXIMATIONS

1.
Et c'est là, au milieu des étagères couvertes de livres, qu'apercevant la campagne autour de moi, je constatai que murs, portes, fenêtres et toit avaient disparu, ne laissant que mes livres et leur fantôme.

2.
Carnaval de Dunkerque. La bière coule. La mort vient. La bière coule parce que la mort vient. La mort, aussi inéluctable qu'un verre qui vient de se vider. « Ça sent la bière, de Londres à Berlin », chantait Brel. Chantait.

3.
Une faute de frappe m'a fait copier ainsi cette citation attribuée à Albert Einstein :
« Le progrès technique est comme une vache qu'on aurait mise entre les mains d'un psychopathe. »
J'en frémis encore.

4.
Comme il avait eu l'intention d'enlever sa panoplie, il chercha un coin discret pour se changer lorsqu'il tomba dans une foule d'inconvénients qui le regardaient avec des yeux à ne pas regarder en face.

5.
Je crois que la chaleur lui est montée à la cafetière. Il bout ; il fume ; il va se verser jusqu'au ras-le-bol, déborder, se déverser et répandre partout la tache noire de ses humeurs.

6.
Sisyphe apprit ce qu'était l'optimisme le jour où un technocrate décida de lui verser un salaire et rebaptisa sa malédiction du nom prometteur de « travail ».

7.
« Le réel, c'est quand on se cogne » attribue-t-on à Lacan. L'étant n'est pas en soi la preuve du réel. C'est la douleur qui rend évident le fait qu'il y a quelque chose et non rien.

8.
L'humain est le seul animal à se croire humain. Prétention, évidemment.

9.
Le réel manque à l'humain. En manque donc, l'humain se met en quête de réel. Pour débusquer et s'approprier le réel, l'humain utilise la raison. C'est, dit-on, cette raison qui fait de l'humain un animal singulier. C'est aussi par la raison que l'humain comprend qu'il est en manque d'humanité.

10.
Si mon jeu d'échecs était un orchestre, je me demande si les fous joueraient de la guitare, les tours du tambour, les chevaux du clairon, la Reine du piano, le Roi du discours et les pions de la flûte.

12.
Si mes amours perdues étaient des chansons, je me demande combien en ai-je oubliées.

13.
Ah tiens, j'écoute l'album « American Pie » de Don McLean. Ça date de 1971, ce bijou, et ça n'a pas pris une ride.

« So, bye-bye, Miss American Pie
Drove my chevy to the levee, but the levee was dry
And them good ol' boys were drinking whiskey and rye
Singin', « This'll be the day that I die
This'll be the day that I die ».
(Don McLean, « American Pie »)

Bon, ma pomme ne conduira jamais de Chevrolet, mais pour le whisky, j'aurai encore quelques occasions, si le vent ne m'avale ni le diable ne m'emporte avant que se pointe le jour du grand bye-bye.

Patrice Houzeau
Malo, le 29 mars 2023.

14 mars 2023

TROIS PETITES FANTAISIES AU SCARABEE

TROIS PETITES FANTAISIES AU SCARABEE

1.
« What ho ! what ho ! This fellow is dancing mad ! He hath been bitten by the Tarantula. (All in the Wrong.) »
(Edgar Poe, « The Gold Bug »)

« Oh ! Oh ! qu'est-ce que cela ? Ce garçon a une folie dans les jambes ! Il a été mordu par la tarentule. (Tout de travers.) »
(Poe traduit par Baudelaire, « Le scarabée d'or »)

Baudelaire a traduit « This fellow is dancing mad » par « ce garçon a une folie dans les jambes ». En général, c'est en tête que l'on a une folie. Mais la folie est partout chez elle, je suppose. Après tout, n'est-elle pas la condition de la raison ? Et là, je me dis que j'écris un sophisme, mais ça ne fait rien parce qu'au fond, personne ne peut prendre ceci au sérieux. C'est d'ailleurs ce que me dit quotidiennement mon dromadaire, lequel a une bosse tandis que la cerise a un noyau et la fraise non.

Quant à savoir si le « bug » est un « scarabée », j'avoue que comme je l'ai entendu dire par une punaise qui discutait avec un scarabée : « All bugs are insects, but not all insects are bugs. » La tarentule, quant à elle, est bien une araignée, laquelle a donné son nom à la tarentelle, danse rituelle qui n'a rien d'amusant.

2.
« Well ! » I said, after contemplating it for some minutes, « this is a strange scarabaeus, I must confess : new to me: never saw anything like it before – unless it was a skull, or a death's head – which it more nearly resembles than anything else that has come under my observation. »
(Edgar Poe, « The Gold Bug »)

« - Oui ! - dis-je, après l'avoir contemplé quelques minutes, - c'est là un étrange scarabée, je le confesse ; il est nouveau pour moi ; je n'ai jamais rien vu d'approchant, à moins que ce ne soit un crâne ou une tête de mort, à quoi il ressemble plus qu'aucune autre chose qu'il m'ait jamais été donné d’examiner. »
(Poe traduit par Baudelaire, « Le scarabée d'or » [le narrateur])

Je lis sur Internet cet exemple : « If you don't confess, your conscience will torture you. » La conscience, comprenez la conscience morale défois qu'elle nous torture, chagrine. On la paye de mots, quand on a des mots, et ça c'est si l'avaleur de mots ne nous les a pas chopés. Sinon, on mange trop de biscottes. Les craquements des biscottes beurrées avec de la confiture couvrent un temps les leçons de la conscience.

3.
« I presume you will call the bug scarabeus caput hominis, or something of that kind – there are many titles in the Natural Histories. »
(Edgar Poe, « The Gold Bug »)

« Je présume que vous nommerez votre insecte scarabeus caput hominis, ou quelque chose d'approchant : - il y a dans les livres d'histoire naturelle beaucoup d'appellations de ce genre. »
(Poe traduit par Baudelaire, [le narrateur])

Le narrateur présume que Legrand, (c'est un personnage du « Scarabée d'or », d'Edgar Poe) va nommer ce scarabée non pas « Alea jacta est » ni « Cogito, ergo sum », ni « Sum quod eris », mais « Scarabeus caput hominis » (ne ressemble-t-il pas à un « crâne » ou à une « tête de mort »? - et s'il avait ressemblé à une saucisse ? Comment cétyke?) et si Poe avait écrit « I presume you will call the bug No Future », cela aurait donné lieu à bien des commentaires.

Patrice Houzeau
Malo, le 14 mars 2023.

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13 mars 2023

COMME ME LE FAIT REMARQUER MON RHINOCEROS

COMME ME LE FAIT REMARQUER MON RHINOCEROS

1.
« Il n'était pas voûté, mais cassé, son échine
Faisant avec sa jambe un parfait angle droit ».
(Baudelaire, « Les sept vieillards »)

On ne pouvait donc s'en servir comme cheval de labour ni comme figure locale. Comme épouvantail à la rigueur. Ou alors pour un mélodrame cinématographique propre à récolter des palmes à Cannes.

2.
« Seulement, cet autrement doit être de telle sorte qu'il rencontre le Même que médite le texte expliqué. »
(Heidegger traduit par Wolfgang Brokmeier, « Chemins qui ne mènent nulle part »)

Pas facile de faire se rencontrer le « Même » et « l'autrement ». Le même renvoie, par définition, à ce que dit l'auteur, et l'autrement se perd dans les méditations que le commentaire induit. Croirait-on les voir coïncider (Eurêka!) qu'il se pourrait que l'auteur surgisse du tombeau de ses exégèses pour nous contester, nous jeter des os de poulet, nous flanquer une tarte à la crème en pleine face, bref, nous engueuler.

3.
« Mon berceau s'adossait à la bibliothèque », dit le narrateur baudelairien. Parents inconscients ! Si les livres lui étaient dégringolés dessus, le petit Charles aurait été assommé et peut-être même étouffé par toute une philosophie.

4.
« Parce que Nietzsche éprouve l'être de l'étant comme volonté de puissance, sa pensée doit aller à la rencontre des valeurs. »
(Heidegger traduit par Wolfgang Brokmeier, « Chemins qui ne mènent nulle part »)

Généralement, dès que l'on cause « volonté », et a fortiori « volonté de puissance », la question des valeurs se pose. Le vouloir impliquant une action, et la volonté un acte, si minime soit l'action, elle suppose une adhésion à une valeur.

En ce sens, tout est politique, comme dit l'autre, ce qui signifie en réalité que rien n'est politique, la politique n'étant qu'une usurpation des valeurs. Aussi une confiscation, une mystification, au mieux un utilitarisme.

Le droit de vote est perçu d'abord comme une exigence morale, un devoir du citoyen mais il est aussi un utilitarisme. Quelqu'un me dit un jour qu'il votait souvent pour l'alternance : « L'opposition, pour arriver au pouvoir, fait quelques promesses. Si elle gagne, elle en tient quand même quelques-unes, c'est toujours ça de gagné. »

5.
« Ne suis-je pas un faux accord
Dans la divine symphonie,
Grâce à la vorace Ironie
Qui me secoue et qui me mord ? »
(Baudelaire, « L'héautontimorouménos »)

Un « faux accord dans la divine symphonie » ? Outre que je dois être sourd, parce que la musique divine, je ne l'entends guère, il est vrai qu'il y a un manque flagrant d'accordeurs d'âmes. Le Service Après Naissance laisse à désirer.

Quant à la « vorace Ironie » qui « secoue » et qui « mord », voilà une araignée bien redoutable. Mon cher Baudelaire, à force de hanter des lieux à même pas en parler, vous avez fini par attraper des étants honteux, l'Ironie n'étant sans doute pas le pire.

6.
« Frères qui trouvez beau tout ce qui vient de loin ! »
(Baudelaire, « le voyage »)

Ah non, pas forcément, moi, voyez, le rhinocéros qui boit mon whisky et fume mes cigares, il a beau venir de loin, je ne le trouve pas spécialement beau, ah non.

7.
« Exaspéré comme un ivrogne qui voit double,
Je rentrai, je fermai ma porte, épouvanté,
Malade et morfondu, l'esprit fiévreux et trouble,
Blessé par le mystère et l'absurdité ! »
(Baudelaire, « Les sept vieillards »)

Ça, c'est ce qui arrive quand on se mêle de politique. L'abus d'administration produit le même effet.

8.
« C'est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre »
(Baudelaire, « La mort des pauvres »)

La Mort, en voilà un drôle d'étant. Un étant qui s'absente, se fait néant pour laisser toute la place à l'être, lequel est masqué par l'oubli, et nous prenons l'oubli pour l'être des morts, alors que les morts, et surtout parce que leur anonymat est effrayant, se rappellent sans cesse à nous par le fait qu'ils furent ce que nous sommes.

Note : c'est surtout pour l'orgueil de nos consciences réflexives que l'anonymat des morts est effrayant. Les animaux n'ont pas ce genre de spleen.

9.
« Mon chat sur le carreau cherchant une litière
Agite sans repos son corps maigre et galeux ».
(Baudelaire, « Pluviôse, irrité... »)

Moi, voyez, ça je ne connais pas. Mon rhinocéros n'est ni maigre ni galeux, et, vidant consciencieusement mon frigo, squattant mon lit ainsi que ma salle de bain, il ne peut mal de se retrouver aussi pitoyable que le chat du poème à Baudelaire. Par contre, je suis agité, moi défois, et je ne dors pas assez. D'ailleurs, mon rhinocéros me le fait souvent remarquer.
Quant à mon balai-brosse, il ne fait aucun commentaire, et ne m'encombre en rien.

Patrice Houzeau
Malo, le 13 mars 2023.

11 mars 2023

LE STEAK-FRITES AUSSI MAIS PAS PARTOUT

LE STEAK-FRITES AUSSI MAIS PAS PARTOUT

1.
Tout le monde à quelque chose à cacher, et d'abord lui-même.

2.
Comme elle voulait remporter le concours de compositions florales, Miss Trublion apprit le latin. Elle ne remporta jamais le concours mais sa quiche aux épinards fit sensation.

3.
Le cinéma a eu beaucoup d'importance dans la constitution des imaginaires modernes. Le steak-frites aussi, mais pas partout. Quant à l'emmenthal, il a des trous. Le gruyère n'a pas de trous. Ma mémoire, si.

4.
Le jury a à se prononcer : L'accusé, avec son squelette dans le placard, a-t-il aussi une araignée au plafond ?

5.
Il aurait pu vous tuer. Heureusement, il a été arrêté par la souris perspicace. Moi, voyez, je n'ai à ma disposition qu'un chat d'appartement. Il ne fume pas la pipe ; il ne joue pas de violon, comment voulez-vous qu'il résolve une énigme ?

6.
Si Wolfgang-Amadeus avait été un clavecin, nul doute qu'il se serait composé du Mozart.

7.
La Russie est pleine de fantômes qui arment et jettent les vivants dans les enfers d'une guerre en Ukraine.

8.
C'est en faisant massacrer des milliers d'hommes que Poutine lutte contre le dépeuplement de son pays.

9.
Il ne suffit pas d'avoir le quotient intellectuel d'une mouche pour savoir voler.

10.
Si les murs avaient des oreilles, à entendre tant de conneries, les bras leur en tomberaient.

11.
Poutine est un homme qui s'est envahi lui-même.

12.
On ne donne sa langue à la pluie que si elle miaule. Et encore.

13.
A force de se fier aux apparences, les bananes, qui semblent des chiens, les chiens qui semblent des loups, les loups qui semblent des hommes, finissent par vous dévorer tout cru.

14.
On dit de Zemmour qu'il est d’extrême-droite. C'est très exagéré. Il est surtout d’extrême-sottise.

15.
Je n'ai pas connu Napoléon, étant mort bien avant qu'il soit né.

16.
Avec les marées noires, les oiseaux ne se cachent plus pour mourir.

17.
L'histoire de la moumoute fantôme a pris un tour résolument gore depuis qu'elle s'est mise à dévorer les cerveaux.

18.
Ce n'est pas avec un cœur mélancolique que l'on rétablit le courant.

19.
Ce n'est pas seulement avec des œufs, de la farine, du lait et des épinards que l'on concocte une quiche fatale. Il y faut aussi l'élément secret, la touche du Chef.

Note : Il y a, oui, un clin d’œil à M.C. Beaton.

20.
Je ne sais pas ce qui est arrivé car si j'avais été là, ce serait arrivé quand même. (Pensée apocryphe de la boîte à coucous de Donald Trump).

21.
Je ne sais pas si les fantômes dorment car ce n'est pas en feignant de dormir que l'on fait de beaux rêves, même si cela peut vous éviter hantises et récurrences.

Patrice Houzeau
Malo, le 11 mars 2023.

7 mars 2023

GARE, GARS MÊLE ET AUTRES PELLES

GARE, GARS MÊLE ET AUTRES PELLES

1.
Gare ! gars, mêle-toi à la foule, rends-toi invisible, si tu veux échapper à l'homme en noir !

2.
J'aime beaucoup le Lucky Luke de Morris et Goscinny. L'humour absurde, on en trouve pas mal d’exemples dans les albums de la série. Ainsi, dans « Jesse James », Jolly Jumper jouant aux échecs avec « l'homme qui tire plus vite que son ombre ». Etonnement d'un témoin et double remarque du Juge de Nothing Gulch : « il joue un peu lentement mais là n'est pas la question... » ; deux planches plus tard : « C'est incroyable qu'un cheval aussi lent aux échecs soit aussi rapide à la course. »

Dans « Jesse James », Jolly Jumper fume trop et il n'aime pas ça et fait le difficile quant au choix de ses fers. Il y a aussi un bandit, Jesse James, qui se prend pour Robin des Bois, mais confond partage des richesses (mal acquises) et confiscation (à main armée). Il forme un trio de grand chemin avec un cousin débile et un frangin qui fait des peseudo-citations de Shakespeare à tout bout de champ et de branche lorsque les bandits sont perchés.

Tout ça bien rythmé en cases dont certaines sont sans bord (l'album date de 1968, la bande dessinée commençait à expérimenter), personnages à trognes et pifs improbables, couleurs franches qui vous mettent souvent un groupe de bonshommes en bleu, en gris, en vert pâle quand ils ont peur.

3.
Vu « Aline », de Valérie Lemercier. Sympathique, comme le personnage central, Aline Dieu qui évoque la chanteuse Céline Dion, que l'on aime à croire aussi sympathique, franche et naturelle que son double de fiction. A voir aussi pour les répliques de maman Dieu, pleines de verve.

4.
Ai fini de lire « La Chèvre d'or », de Paul Arène (1889). Roman rapide (200 pages, chapitres très courts), style clair et concis, basé sur le mythe de la « chèvre d'or », mythe lié, si j'en crois Wikipédia, à l'occupation sarrasine de certaines parties de la Provence entre 730 et 973.

Je ne sais pas si ce roman est disponible en librairie. Si ce n'est pas le cas, « La Chèvre d'or » mériterait d'être réédité. Il fourmille de détails sur la Provence du 19ème siècle et charme par le conte, un brin naïf, le goût de l'énigme et de la chasse au trésor.

5. 
Alors comme ça, l'archiduchesse qui avait coutume de faire sécher à l’air sec ses chaussettes jusqu'à ce qu'elles fussent, ses chaussettes, sèches, sèches, archisèches, on l'a retrouvée, l’archiduchesse, desséchée, cadavérée cependant qu'au mur et au bout d'une ficelle se balançait quelque sardonique hareng saur.

6. 
Hector, t’as tort d’être tant porté sur la tortore car trop de tortore tue et tu dois donc, Hector, stopper tartares, tartines, gratin de pâtes, patates sautées, choucroutes et pâtés en croûte si dans l’trou tu veux pas chuter.

7. 
J'aime le son de batterie de Nick Mason dans « Cymbaline » (c'est de Pink Floyd) Je n'aime pas le son désagréable de Poutine (sale !) JaimeLeSonDlaBatterieDansLesDisquesDePinkFloyd JeNaimepasLaTêteALavrov MacabreTheClown macabre.

8. 
Paraît que Roger Waters a des tendances pro-russes et surtout anti-américaines. Bah on ne demande pas à Roger Waters s'il a des compétences en géopolitique, ni s'il pige que s'il est bien friqué, c'est grâce au vilain libéralisme, on lui demande de composer de bonnes chansons.

9.
Très tapant le soleil trop trempée la limace
TropTrempéeLaLimace Ah la malice dis et puis
Alice chuta chuta chuta S'artrouva Alice as'
Kip dans les étrangetés d'la logique et puis
As'kip paraît qu'i va neiger qu'ça va chuter
D'la neige Aujourd'hui grève & demain neige.

10.
SouventSouventSouventCoinCoin SouventSouvent
TchiiipTchiiipSouventSouvent TirrreliSouvent
SouventCroaCroa SouventCoinCoinCroaCroa j'me
Promène & j'entends des zoziaux dans m'tête.

11.
Ce n'est pas parce qu'il neige des bigoudis qu'il y a des têtes dessous. (proverbe merlan)

Patrice Houzeau
Malo, le 7 mars 2023.

6 mars 2023

CORNICHON SE TRADUISANT PAR GHERKIN

CORNICHON SE TRADUISANT PAR GHERKIN

1.
« par exemple, - l'âme, à ce qu'ils croyaient, - je cite les termes d'un subtil et intelligent Parisien, - ne demeure qu'une seule fois dans un corps sensible. Ainsi, un cheval, un chien, un homme même, ne sont que la ressemblance illusoire de ces êtres. »
(Edgar Poe adapté par Baudelaire, « Metzengerstein »)

Les choses se ressemblent-elles ? La banane est-elle la banane telle que je la vois ou un étant qui se transforme x fois par seconde ? Le réel est-il une série grouillante et infinie de métamorphoses dont l’œil ne percevrait qu'une infime partie ? C'est-y pas qu'nous grouillons ?

2.
« The rich although faded tapestry hangings which swung gloomily upon the walls, represented the shadowy and majestic forms of a thousand illustrious ancestors. »
(Edgar Poe, « Metzengerstein »)

« La tenture de tapisserie, riche, quoique fanée, qui pendait mélancoliquement aux murs, représentait les figures fantastiques et majestueuses de mille ancêtres illustres. »
(Edgar Poe traduit par Baudelaire)

Je lis que « shadowy and majestic » est traduit par « fantastiques et majestueuses » puisqu'il s'agit de « figures ».

S'il avait été question de dés à coudre, Baudelaire aurait écrit « fantastiques et majestueux ».

Ceci dit, il est rare que l'on ait pour ancêtres des dés à coudre. Remarquez que la tapisserie aurait pu représenter les « figures fantastiques et majestueuses de mille ancêtres illustres » avec dés à coudre. Ce qui aurait été curieux, aussi curieux que la rencontre du spectre d'un cornet acoustique avec la peintre Leonora Carrington.

3.
« The longer he gazed the more absorbing became the spell – the more impossible dit it appear that he could ever withdraw his glance from the fascination of that tapestry. » 
(Edgar Poe, « Metzengerstein »)

« Plus il contemplait, plus absorbant devenait le charme, - plus il lui paraissait impossible d'arracher son regard à la fascination de cette tapisserie. »
(Edgar Poe traduit par Baudelaire)

Baudelaire traduit « withdraw his glance from the fascination of that tapestry » par « arracher son regard à la fascination de cette tapisserie », ce qui se justifie puisqu'il n'est, dans cette phrase, pas question de dé à coudre (thimble) ni de chameau (camel).

Si l'on « arrache son regard à la fascination d'une tapisserie » ou de tout autre chose (d'un jardin, d'un jambon-beurre, d'un jamais, toujours, je-ne-sais-quoi, jambe, jarretière, jolie jeune fille...), la fascination en est-elle aveuglée et se met-elle à errer, hagarde et échevelée, de par le monde en quête d'un autre regard à fasciner ?

4.
« I-n-d-e-e-d- ! » ejaculated the Baron, as if slowly and deliberatly impressed with the truth of some exciting idea. »
(Edgar Poe, « Metzengerstein »)

« - En... vé... ri... té... ! - exclama le baron, comme impressionné lentement et graduellement par quelque évidence mystérieuse. »
(Edgar Poe traduit par Baudelaire)

Je lis sur internet que le Cambridge Dictionary donne au verbe anglais « ejaculate » le sens aussi de « to shout or say something suddenly » ce qui ne vous interdit pas de prendre le café avec du sucre, ni de le boire en contemplant la course des nuages en forme de chevaux. Je dis ça parce qu'il est question, dans le « Metzengerstein » d'Edgar Poe, d'un « cheval », d'un cheval fantastique. S'il s'était agi d'un bocal, vous auriez contemplé des nuages en forme de bocaux ; d'un cardinal, des cardinaux ; d'un vitrail, des vitraux ; d'une bataille, des bateaux mais je dis pour faire rire dans les vals et les vaux.

5.
« In the glare of noon – at the dead hour of night – in sickness or in health – in calm or in tempest – the young Metzengerstein seemed rivetted to the saddle of that colossal horse,... »
(Edgar Poe, « Metzengerstein »)

« Dans l'éblouissement du midi, - aux heures profondes de la nuit, - malade ou bien portant, - dans le calme ou dans la tempête, le jeune Metzengerstein semblait cloué à la selle du cheval colossal... ».
(Edgar Poe traduit par Baudelaire)

Je lis que l'adjectif anglais « colossal » se traduit par le français « colossal ». Etant une colossale poutre dans la langue des Beatles et des Doors (et ça m'amuse que Scarabées et Portes parlassent la même langue), ça me rassure un peu de le savoir, même si c'est peu, si peu.

J'ai appris récemment que l’expression « mettre quelqu'un sur un piédestal » se traduit en anglais par « put someone on a pedestal » et que, voyez, « cornichon » se traduit par « gherkin », même qu'il est souvent « pickled », « preserved in vinegar ». Ah oui.

Patrice Houzeau
Malo, le 6 mars 2023.   

4 mars 2023

PENDANT QUE SE BALANCE LE GRAND HARENG-SAUR DE L'HISTOIRE

PENDANT QUE SE BALANCE LE GRAND HARENG-SAUR DE L'HISTOIRE

1.
La nuit ne rit pas. D'ailleurs, je ne vois pas la nuit avoir des envies de rigolade.
Je ris parfois. C'est qu'il y a des films comiques.
Je ne regarde jamais de films comiques en mangeant des crêpes. On ne sait jamais, des fois qu'elles se mettraient à se tordre et à s'esclaffer.

2.
Passe un rhinocéros. J'boirais bien une bière.
Ces deux propositions constituent un ensemble de douze syllabes. Je pourrais en faire un vers dans un poème qui parlerait de rhinocéros et de bière. Je n'en ai pas envie ; je contemple mon chien qui ronge son os.

3.
3 mars 2023. Une vidéo tournant sur twitter montrant Lavrov expliquant que la Russie essayait d'arrêter en Ukraine une guerre qui aurait été déclenchée contre elle et provoquant ainsi les rires du public de New Delhi, prouve indéniablement que Sergueï Lavrov est le plus grand clown de la scène diplomatique internationale. Avec sa tête à faire pleuvoir et le pince-sans-rire de sa distinction de cireur de bottes poutiniennes, cet homme sait faire rire, quand il ne fait pas pleurer.

4.
« - Raison de plus pour qu'on croie que tu fais le tapin, s'esclama Gabriel épouvanté. Surtout avec tes bloudjinnzes. Y a des amateurs.
- Y a des amateurs de tout, dit Fédor Balanovitch en homme qui connaît la vie. »
(Raymond Queneau, « Zazie dans le métro »)

D'une manière générale, la vie est pleine d'amateurs. Certes, ils exercent, - pas tous – une profession, mais ils n'en restent pas moins dans la plupart des domaines des amateurs. Il y a des peintres, des musiciens, des politiques amateurs. Ils ont parfois un certain talent. Mais ce talent disparaît avec eux, et parfois, c'est dommage, mais c'est sans doute qu'ils avaient autre chose à faire. Restent quelques temps le tableau de l'oncle Arthur (une vue avec vaches d'un bout du coin de là-bas) et quelques vieilles coupures de presse. Par contre, je reprendrais bien de la tarte au riz.

5.
Le crétin professionnel ne se distingue du crétin amateur que par son pouvoir de nuisance. Et encore, certains crétins amateurs ont dépassé le stade du professionnel pour très vite accéder au stade de virtuose, de Grand Maître en crétinerie.

6.
Je ne sais pas si c'est vrai mais, selon un article du Point, du jeudi 2 février 2023 (p.24) : « Si un virus de grippe aviaire déclenche une épidémie dans un élevage de visons en Espagne, la propagation à l'homme est à craindre. » Qu'en pensez-t'ils-nous-vous-tu ?

Le mot « virus » signifie en latin « poison, toxine ». C'est donc un poison invisible. Il semble qu'il y ait débat sur la nature des virus : organismes vivants ou pas ? C'est que le réel grouille. Nous grouillons. Sous nos pieds, les rats grouillent. Les tueurs grouillent en Ukraine, en Afrique, dans l'enfer des faits divers. Le grouillement aura la peau de l'humain, aussi sûrement que Poutine a les valets les mieux payés du monde : ils ont pour nom : Lavrov, Choïgou, Guerassimov, Peskov, Medvedev, ecterov.

7.
« Ainsi dans la forêt où mon esprit s’exile
Un vieux Souvenir sonne à plein souffle du cor ! »
(Baudelaire, « Le cygne », v.49-50).

« Dans » est une préposition qui signale que quelque chose peut servir de contenant. « Mais qu'est-ce que tu as dans la tête ? », « Mais tu n'as rien dans le crâne, ma parole ! »  sont des phrases qui, employant la préposition « dans », nous renvoient à ce creux qui nous définit et où nous fourrons tout ce dont on dit parfois : « Je me demande où il va chercher tout ça. »

8.
Le complotisme fonctionne sur l'idée que s'il n'y a rien à voir là où on s'attendrait à voir quelque chose, c'est que ce quelque chose est caché, occulté, dissimulé. On s'attendait à voir une soucoupe volante (puisque quelqu'un de « bien informé » l'aurait déclaré), et ce n'est qu'un prototype de ballon espion, c'est donc que l'on nous cache que les aliens sont sans doute déjà parmi nous. J'ai toujours pensé que les bananes étaient hantées par des esprits pervers. Je n'en ai jamais trouvés, mais je remarque que l'on ne nous dit pas tout sur les bananes, ni sur les politiques perchés.

9.
« Le Point » du 2 février 2023, p.44 :
« Ce mont pelé qui domine la ville kurde syrienne de Kobané est abandonné au vent glacial et aux chiens errants. »
(Guillaume Perrier)

Le verbe « errer » vient du bas-latin « iterare » qui signifiait « voyager ». Il y a des chats, des chiens, des gens, des peuples, des esprits errants. Jadis, il y eut même des chevaliers errants. Les chapeaux errants sont plus rares, ou alors c'est qu'il y a quelqu'un dessous. Si vous croisez un manteau errant sans personne dedans, vous venez de croiser l'homme invisible.

10.
Si Cicéron, cependant que César césarisait et que se balance le grand hareng-saur de l'Histoire, n'avait point tant cicéronné, Cicéron n'aurait jamais été Cicéron, mais comme, cependant que César césarisait et que se balance le grand hareng-saur de l'Histoire, Cicéron cicéronnait, Cicéron est devenu Cicéron, mais pas Poincaré.

Patrice Houzeau
Malo, le 4 mars 2023.

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