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BREFS ET AUTRES
fantaisies speculatives
1 octobre 2023

LOIN MAINTENANT

LOIN MAINTENANT

1.
« Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur,
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur »
(Rimbaud, « Le bateau ivre »)

« Libre ». Est-on jamais libre ?
J'ai appris, en cours de philosophie des lycées, comme tous les petits Français, que nous étions tous quasi entièrement conditionnés par notre milieu, l'hérédité, les structures sociales.
J'ai aussi appris que nous sommes presque tous entièrement libres au moment où des choix moraux se posent à nous de façon aiguë. Résister à Hitler, c'était faire librement le choix de la Résistance au nazisme. Collaborer avec Hitler (comme l'ont fait Pétain et Laval), c'était faire librement le choix de la traîtrise et de la saloperie.
Il en est de même pour Poutine. S'opposer, c'est résister. Ne pas s'opposer, c'est collaborer.
C'est aussi simple que ça.
C'est simple comme la liberté.
Je vais manger des rillettes et boire un verre de bière légère.

Sur France Inter ce dimanche, dans l'émission de Charline Vanhoenacker il y a une belle chronique sur le poème « La grasse matinée », de Jacques Prévert.
« La grasse matinée », de Jacques Prévert, est un des poèmes les plus intenses de la langue française.
La chronique le rappelle et lui rend hommage.
Je sais qu'il ne manque pas de petits profs de collège et de lycée, cuistres et bavards, qui méprisent Jacques Prévert. Des cons.

2.
« Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ; »
(Rimbaud, « Le bateau ivre »)

Je me demande pourquoi des « lunules électriques » ?
Je ne me le demande pas.
La virtuosité des vers de Rimbaud me suffit.
Je lis Rimbaud comme j'écoute Pink Floyd.
Pour l'esthétique.
J'ai passé l'âge de m'enthousiasmer pour les exégèses.

Pourquoi Rimbaud a-t-il écrit « planche folle » ?
Est-ce de l'auto-ironie ?
Je ne sais pas si Rimbaud, au moment où il a composé « Le bateau ivre », avait conscience de son homosexualité.
Je ne sais pas et je m'en fiche.

Demain, cours.
Les élèves des lycées professionnels s'en fichent bien de Rimbaud.
Ils ont raison.
Ils ont autre chose à penser.
Avec la crise qui s'aiguise, ils ont même de plus en plus de choses à penser.
Je pressens des malaises.
Je pressens des rebellions.
Je pressens des troubles.
Il y a trop de problèmes en France.
Il y a trop de problèmes partout.
Je pressens que quelque chose de grave va arriver.
Si ce n'est la troisième guerre mondiale, ça y ressemblera beaucoup.

Je vais reprendre des rillettes et un peu de bière légère.

3.
« Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Behemots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilité bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets ! »
(Rimbaud, « Le bateau ivre »)

Je ne sais pas ce que sont les « Behemots ».
Paraît que ce sont des bêtes « prodigieuses » (parlent-elles latin ? Causent-elles chinois?) mentionnées par la Bible, nous dit une note.
Pour « Maelstroms », j'ai « gouffres marins » (édition Poésie/Gallimard, notes de Louis Forestier).
La Toile dit : « tourbillon d'eau ».
Le mot est d'origine néerlandaise (de « malen » : broyer et « strom » : courant).
Je ne parle pas néerlandais.
Je n'apprendrai jamais le néerlandais.
Je n'irai jamais aux Pays-Bas.
Je suis une poutre en allemand et une quiche en angliche.
Je ne vais jamais en Allemagne.
Je ne vais jamais en Angleterre.
J'aime bien le vers « Fileur éternel des immobilités bleues ».
J'aime bien écrire le vers « Fileur éternel des immobilités bleues ».
J'aime bien me dire le vers « Fileur éternel des immobilités bleues ».
J'imagine un dieu fileur, un roi peut-être, bleu de Prusse, de nuit, d'encre bleue.
Le genre de choses que je dessinais quand je me prenais pour un dessinateur.
J'ai laissé passer ce petit talent.
J'ai tout laisser filer.
J'ai manqué ma vie.
Elle a passé sous mes yeux.
Elle est loin maintenant.
Je reste planté ; la route est déserte.

Patrice Houzeau
Malo, le 1er octobre 2023.

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11 septembre 2023

EN LICE LA FARCE PIS TOUTE POURRITE

EN LICE LA FARCE PIS TOUTE POURRITE

1.
« Pouvons-nous étouffer le vieux, le long Remords,
                  Qui vit, s'agite et se tortille,
Et se nourrit de nous comme le ver des morts,
                  Comme du chêne la chenille ?
Pouvons-nous étouffer l'implacable Remords ?
(Baudelaire, « L'irréparable »)

Pour étouffer ce « vieux » et « long Remords », le mieux, c'est de :
- Essayer de ne plus y penser en multipliant les occupations ?
- Le noyer dans la picole ?
- Apprendre des poèmes par cœur ?
- Se plonger dans la prière et s'agiter la transcendance ?
- Collectionner petits mickeys et albums des Pieds Nickelés ?
- Se distraire en rédigeant un mémoire sur la sotte réforme Blanquer ?
- Devenir maître des marionnettes dans un manga ?
- L'envoyer se faire cuire un œuf dans l'Absolu ?
- Se dire qu'on a encore de la chance, qu'on aurait pu finir par être aussi boursouflé, pompeux et incompétent qu'un député, voire un ministre, voire un ministre de l'Education nationale du type à pondre de sottes réformes apprenantes ?

2.
« Le Diable a tout éteint aux carreaux de l'Auberge ! »
(Baudelaire, « L'irréparable »)

Si le Diable a tout éteint aux carreaux de l'Auberge, c'est :
- que le Diable ne se plaît que dans les ténèbres, sinon il ferait du show-biz, ou de la politique.
- Par souci d'économie.
- que l'Auberge s'appelait « L'Espérance », et ça l'énervait fort, ça, le cornu colérique, c'est pour ça.

3.
Pensez-vous que cette vie qu'on vit :
- N'a pas de sens ?
- Peut être très agréable, question de chance ?
- Est stupide et violente ?
- Est stupide, violente et injuste ?
- Est stupide, violente, injuste et pue du ?
- Risible et cruelle comme un dictateur russe ?
- Vouée à l'échec ?
- Ne s'use que si l'on s'en sert ?
- Qu'il faut bien l'agiter avant de s'en servir ?
- Qu'on en a qu'une, alors faut faire attention, défois qu'il y en aurait, des zôtres et des gens là, des petits chefs et cheffesses qui voudraient vous la pourrir,pis vous la bouffer, avec toutes leurs dents là ?
- Est une mauvaise blague, toute pourrite farce, du Céline même pas écrit, du Kafka même pas pensé ?
- Est trop courte pour se poser des questions à la France Inter genre « ce matin, nous allons nous demander si » (je t'en ficherai moi des « nous allons nous demander si », passe-nous un bon vieux rock n' roll plutôt, eh banane à blablas !)

4.
« C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent ! »
(Baudelaire, « Au lecteur »)

Que vous inspire cette exclamation baudelairienne ?
- Que le Diable ne se contente pas d'éteindre les carreaux des auberges, mais itou qu'il nous prend pour des marionnettes ?
- Que le Diable fait de la politique ?
- Que le Diable est au gouvernement ?
- Que lorsqu'on soupe à la table du Diable, il faut se munir d'une très longue louche ?
- Que le Diable est l'autre nom du Maître des marionnettes humaines ?
- Que le monde est un spectacle diabolique ?
- Qu'il ne faut dès lors pas s'étonner, si, comme l'écrit Baudelaire :
« Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent. »
Qu'on s'en rend même pas compte qu'on est foutus.

5.
« Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices, »
(Baudelaire, « Au lecteur »)

Ces accumulations de noms d'féroces et d'adjectifs lovecraftiens ont-elles pour but de :
- Fasciner le lecteur ?
- Se faire gondoler le lecteur ?
- Chatouiller, grattouiller, mâchouiller, patouiller, époustoufler le lecteur ?
- Tenter de rendre compte de l'effet produit par certaines pièces de hard rock très grondant façon Black Sabbath, Led Zeppelin, Iron Maiden, ACDC ?
- Ecœurer le lecteur, lequel d'habitude ne lit pas ce genre de sottises, lui préférant les pronostics des courses de dadas ?
- Ne servir à rien d'autre qu'à faire son intéressant en alignant des noms de bestioles désagréables ?
- Apprendre au lecteur curieux, par une note de bas de page que ne manquera pas de placer l'universitaire consciencieux, que le mot « lice » désigne une « chienne reproductrice, femelle du chien de chasse », même que le latin populaire « lycisca » désignait « une chienne engendrée par l'accouplement d'un loup et d'une chienne » ?
- Servir de prélude à l’avènement des autres dieux du monde qu'on voit pas mais dont H.P. Lovecraft contera plus tard les intrusions et autres jaillissements monstrueux, glapissants, hurlants, grognants, rampants ?
- Ça c'est sûr que si tu glisses dessus, tu te casses une guibolle, si c'est pas les deux.

Patrice Houzeau
Malo, le 11 septembre 2023.

24 août 2023

A FORCE DE CONSOMMER ON FINIT PAR S'FAIRE BOUFFER

A FORCE DE CONSOMMER ON FINIT PAR S'FAIRE BOUFFER

1.
Dans son ouvrage « La Société de consommation », Jean Baudrillard affirme que « La 'Révolution du Bien-Être' est l'héritière, l’exécutrice testamentaire de la Révolution Bourgeoise ou simplement de toute révolution qui érige en principe ... » :
- le « Mais qu'est-ce t'as, doudou, dis donc » carlossiste, (et dans ce cas, que signifie 'carlossiste' ») ?
- le « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » jean-yannesque (et dans ce cas, y a qu'à zouquer) ?
- que Dieu reconnaîtra les autres ?
- « l'égalité des hommes, sans pouvoir (ou sans vouloir) la réaliser » ?

2.
Dans « La Société de consommation », Jean Baudrillard écrit que « le savoir et la culture ne sont, pour ceux qui n'en ont pas la clef, c'est-à-dire le code qui en permet l'usage légitime, rationnel et efficace, ... :
- qu'un moyen d'accéder à un poste correctement payé dans la fonction publique mais va falloir bosser dis, pour les passer, les concours, que donc il en faut du savoir là, et d'la culture aussi hein ?
- que l'occasion de pouvoir se la jouer, draguer minettes, minets, mignons, mignonnes, pis ramener sa fraise dans un syndicat étudiant et, qui sait, devenir député LFI, passque sur un malentendu, ça peut marcher hein ?
- qu'une perte de temps, cause que les gens ils ont plus besoin d'un plombier que d'un sociologue ?
- qu'une autre réponse est possible, mais je ne vais pas vous la donner, zavez qu'à faire comme moi, jeter de temps à autre un coup d’œil dans les livres à Baudrillard, histoire de pouvoir dire que vous savez d'quoi ça cause ?

3.
Jean Baudrillard dans « La Société de consommation », écrit : « Nous traquons, sous un gigantesque appareil de production, les signes de la pauvreté et de la rareté », cela pourrait-il signifier que :
- nos sociétés libérales sont riches mais y en a d'la misère, savez ?
- nos sociétés libérales sont riches parce que nous, nous sommes pauvres ?
- nos sociétés libérales sont riches, mais ça ne durera pas, la grande crise du capitalisme mondialiste précédant le Grand Soir des Peuples précédant le petit matin ardent où on grillera tous comme des saucisses ?
Il vaut mieux faire envie que pitié ?
- Daria porte une veste verte, une jupe plissée noire, des lunettes énormes et sur le monde un regard désabusé d'adolescente de dessin animé américain ?

4.
Ecrivant sur le 'Pop Art', Jean Baudrillard écrit que « le Pop veut être l'art du banal […] : mais qu'est-ce que le banal, sinon une catégorie métaphysique, version moderne de la catégorie du sublime ? » Cela voudrait-il dire que :
- Le Pop Art est tellement banal lui-même qu'en fait on s'en fiche, qu'on préfère les bandes dessinées, les romans policiers et les disques de rock ?
- Le Pop Art est plein de charme défois, même qu'il a influencé la mode de la fin des années 60, et c'était bien joli qu'on voit ça dans l'émission « DIM DAM DOM » qui fut diffusée entre 1965 et 1971 ?
- que « la réussite du Pop » est de nous montrer l'objet contemporain non plus comme un simple outil mais comme un « signe » ? (Ne me demandez pas de quoi, j'en sais rien et m'en tamponne).

5.
« L'idéologie d'une société qui prend continuellement soin de vous culmine dans l'idéologie d'une société qui vous soigne, et très précisément comme malade virtuel. »
(Jean Baudrillard, « La Société de consommation », folio essais n°35, p.265)
Cette phrase peut-elle s'appliquer :
- à la gestion de la crise du covid-19 (confinement, pass sanitaire, ...) par le président Macron et ses gens ?
- à l'idéologie du « care » et plus généralement, à la médicalisation des comportements ?
- aux abus du politique qui considère que la société est malade et que son devoir est de la soigner par un contrôle social toujours plus grand ?

Patrice Houzeau
Malo, le 24 août 2023.

9 août 2023

DIE NIEMAND SPAART

DIE NIEMAND SPAART

Notes sur le film « Un soir, un train », de André Delvaux (1968).

« Un soir, un train », de André Delvaux (1968) commence par une chanson et un paysage enneigé qui défile parce que la caméra est dans le train qui roule le long des champs et des toits enneigés.
Il est question « d'entretenir la tombe, pour la Toussaint », dit une vieille dame à Mathias, interprété par Yves Montand.
Il y a un temps suspendu. Il vient après la question « - Vous n'avez pas encore d'enfants », posée par la vieille dame à Mathias (la réponse est « non »). Un temps suspendu. De vieilles personnes, des gens âgés. Qu'attendent-ils ?

Mathias enseigne à l'université. La linguistique. Son cours est interrompu. Grève des étudiants flamands. Allusion probable à « l'affaire de Louvain » (1967-1968) et aux manifestations des étudiants nationalistes flamands hostiles à la présence d'étudiants et d'enseignants francophones au sein d'une université située en territoire néerlandophone.
Dans le couloir, Mathias aide une étudiante à traduire du néerlandais au français un texte sur la mort.
« La mort qui n'épargne personne », nous la retrouvons ensuite, cette phrase sur une scène de théâtre. On y joue une pièce de la Renaissance « Elckerlijk ». La Mort s'adresse à Elckerlijk.
Mathias y rejoint Anne (interprétée par Anouk Aimée). Il est question du statut de la Mort : un personnage, la mort ? Un « écran entre le soi et le moi », comme le jargonne Mathias ? Ça, pour moi, c'est du pipeau ; du reste, Mathias y croit-il lui-même ?
Reste l'essentiel, la phrase dite par le comédien jouant la Mort qui me rappelle Nosferatu quand même un peu, ou la mort vue par Michel de Ghelderode, ou James Ensor : « Ik ben de dood die niemand spaart. »

Un pull mauve, un gilet noir, une chemise blanche, des huîtres, du vin blanc ; une musique de limonaire, de piano mécanique sur le point de se déglinguer, de fausser compagnie, un air à la défaire, la fête, un couple, une maison bourgeoise, des bougies, « A l'ange » (c'est le toast porté par Anne).
Mathias est un matérialiste, un homme du libre-arbitre, il mange ses huîtres et n'écoute pas Anne qui lui dit : « Tu n'y crois pas hein toi ».
On dit que « Un soir, un train » est un film sur l'incommunicabilité. J'en sais rien. Anne et Mathias ont-ils réellement des difficultés à communiquer ? Des mots, tout ça, des mots. Ceci dit, je suis mal placé pour répondre à cette question, car j'aime à grincer et à ironiser comme si c'était important, et j'entretiens d'assez bonnes relations avec la farine, les œufs, et le fromage râpé.
Après qu'ça cause qu'on est libre, et « intelligent, et lucide », mais bon là aussi ce sont des mots. La liberté, il y a des philosophies pour ça. Dans la vie courante, on est surtout libre de se faire avoir si on ne fait pas attention.

Dans le film, il ne fait pas beau, on voit ça quand ils sont dans le bus en ville. On dirait qu'il pleut. Après, le bus file dans la campagne qu'a l'air brumeuse. On entend des coups de feu. Des chasseurs. Forcé qu'on pense à des troubles qui pourraient éclater, un jour ou l'autre, entre nationalistes des deux camps.
Bon. Dispute. C'est que la française Anne a peur de se retrouver seule dans une province où elle n'est pas forcément bien vue, sans amis, sans enfants (la belle affaire!).
Cimetière. La mort encore.
Le vivant ne retrouve pas ses morts.

Le train. Des gens. Mathias est rejoint par Anne, c'est une surprise. Une tentative. Un retour. Un couple, ça s'arrange.
Il est question de Rotherhite, un quartier présenté par un ami de Mathias comme étant l'un « des plus sinistres de Londres ». Il est question aussi de Harry Dickson et donc de Jean Ray (autre grand fantastique belge).
Il y a ce que l'on devrait transmettre et que l'on ne transmet pas. L'humain est un passeur lunatique.
Il y a du silence. Le film est pourtant plein de bruits (celui du train, de sirènes diverses, de cris d'enfants, et cela dès le début, à tel point que l'on a du mal parfois à saisir certaines répliques).
Incommunicabilité ? Bah oui. Du coup, dodo et cauchemar. Sonneries, rouge, flammes (celles de l'enfer?).

Debout les morts. Le train roule. Anne a disparu. Un professeur de linguistique. Un historien des religions à la retraite. Un étudiant. Ils sont trois à être descendus du train arrêté ils ne savent où, pis qui repart, les laissant là dans le on ne sait où.
Ils se dirigent vers un village. On entend de l'orgue comme dans les films d'épouvante, tandis qu'ils traversent une grande étendue humide, vaseuse, désolée. Terre gaste (« espace inhabité qui ne vaut rien pour la culture » dit Internet).
On est à la moitié du film. La nuit tombe. Une lumière au loin.
« On croit toujours qu'on peut tout arranger », dit l'historien des religions.
Après, défois, on n'arrange que ce qui nous arrange, les autres n'ont qu'à s'arranger. Que voulez-vous, ça ne nous arrange pas toujours d'être dérangé. Il y a du jazz. Après, bien sûr, il n'y a personne à vot' enterrement. On s'en moque puisqu'on est dans la lettre de licenciement définitif.
Il y a des réflexions sur la mort, le destin, la prédestination, le pourquoi de l'arrêt du train, tout ça. On dirait, ce film, la transposition d'un cours de philo.

Sont dans la nuit, trouvent un village.
Une autre sonnerie. Une projection de cinéma. Des humains dans le ciel. Du vol libre. Cela fait écho à ce que citait Anne dans la première partie du film sur « les plaines du ciel, là où nous devons tous nous retrouver. »
On ne parle ni flamand, ni français dans ce village, mais une langue qui n'a pas du tout l'air d'être romane. Le linguiste ne la comprend pas, en tout cas.
Un hôtel. Du jazz. On ne peut pas téléphoner. Personne ne comprend personne. Les trois hommes sont attablés et servis. Le vin est bon. Le repas copieux.
Parfois, on la reconnaît. Moïra (la destinée).
L'historien des religions la reconnaît ; étrangement, le linguiste ne la reconnaît pas. Ce qu'il reconnaît, c'est la fascination, et cela soudain le panique, le met en colère, le révolte.
Dans les dix dernières minutes du film, l'étudiant fait le pari qu'il « va tout savoir », élucider l'énigme. Dissiper le surréalisme du machin. Après le jazz et la musique d'ambiance, la danse, la danse étrange. Intense. Barbare. Etrangère. Fascinante la jeune fille, une serveuse de l'hôtel, elle s'appelle Moïra, comme dans une nuit rhénane d'Apollinaire. Fascinante, la musique genre le « High Horses » du groupe The Residents : limonaire, percussions, un drôle de souffle. Tout le monde danse. Tout un tas de gens soudain. L'étudiant est fasciné par la jeune fille. C'est qu'il croit à la prédestination, en Moïra, au « tout est écrit, je ne cours donc aucun risque », a-t-il dit dans la nuit. Sifflement d'un train. Tout le monde file, précipitamment.

L'énigme est élucidée. Je ne vous en dis rien. Il faut voir ce film : « Un soir, un train », de André Delvaux.

Patrice Houzeau
Malo, le 9 août 2023.

4 août 2023

ET DES LORS QUI EST DÉDÉ ?

ET DES LORS QUI EST DÉDÉ ?

1.
Dans une vidéo mise en ligne en 2017 et disponible sur You Tube, Aurélien Barrau et Patrick Peter abordent la question : « L'univers est-il fini ou infini ? ». Ce que Patrick Peter reformule immédiatement en « L'univers a-t-il des limites ? ». Autrement dit, tout ne serait pas possible. Ce qui implique la question : comment définir la frontière entre le possible et l'impossible ?

2.
Aurélien Barrau évoque ensuite « la première lumière de l'univers ». Je me poutre la comprenette que serait-ce le moment où Dieu a ouvert l’œil ? Cela implique-t-il que le dieu de notre histoire aurait un âge : celui de notre univers (13,7 milliards d'années) ?

3.
Évocation du paradoxe d'Olbers (appelé aussi « paradoxe de la nuit noire ») décrit en 1823 par l'astronome allemand Heinrich Olbers. Si l'univers était statique, infini et infiniment ancien (soit un ordre immuable et divin), il serait brillant (cause qu'il est constellé et phénoménal) alors qu'il est noir, l'univers, noir et inconnu, une route qui s'allongerait indéfiniment entre des lampadaires de plus en plus distants les uns des autres.
L'infini s'oppose-t-il au « vers l'infini » ? l'automobile est-elle vouée à s'écraser contre le platane ?

4.
Le « fond diffus cosmologique ». Aurélien Barrau le qualifie de « lumière relique du Big Bang ».
Au moment de l'émission de son rayonnement, au FDC, l'univers était « petit, dense et chaud ». La dilatation l'a dilué et refroidi (je pense à une pâte qui se refroidirait au fur et à mesure qu'elle s'étale). Le FDC présente « d'infimes variations de température et d'intensité selon la direction observée » nous anisotrope Wikipédia.

5.
« On dit souvent que la cosmologie moderne, c'est le lien entre l'infiniment petit et l'infiniment grand. »
(Patrick Peter).
J'entends parler de « théorie des cordes » et de « gravité quantique à boucles » : c'est quoi donc que ces points, ces distances, ces espaces infinitésimaux ? J'y pige rien.

6.
Aurélien Barrau évoque la « nature inconnue » de « l'essentiel de la masse de l'univers », dont l’expansion s’accélérerait (ce qui, même pour une poutre comme ma pomme, semble en effet singulier) : quel est le moteur de cette accélération ? Y aurait-il eu un contrecoup du Big Bang, une «réplique » comme pour les tremblements de terre ? Le Big Bang comme un tremblement du je ne sais quoi et du presque tout ?

7.
Ce que la théorie prédit est-il toujours compréhensible ? La vocation de l'humain serait-elle, en fin de compte, de ne pas comprendre ?

8.
Si la question de l'après Big Bang est légitime, celle de l'avant Big Bang a-t-elle un sens ? Autrement dit, il y a-t-il des lois avant l'apparition des lois ?

9.
L'espace-temps ne pourrait avoir que trois formes possibles. J'entends Aurélien Barrau dire que « dans deux de ces trois cas, l'espace est strictement infini. »
Bêtement, je me demande pourquoi le plat serait voué à l'infini et le courbe au fini, mais je fus fort mauvais élève.

10.
« On peut prouver que l'univers est fini, on ne peut pas prouver qu'il est infini. »
(Patrick Peter).
L'infini serait-il improbable ?
Peut-on « expérimenter » l'univers ? L'univers est-il falsifiable ? Dieu est-il sérieux ? Ou joue-t-il avec des dés dont les valeurs sont sans cesse changeantes et aléatoires ? (et dès lors, qui est Dédé?)

Patrice Houzeau
Malo, le 4 août 2023.

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4 août 2023

L'INFINI EST-IL UN OPTIMISME ?

L'INFINI EST-IL UN OPTIMISME ?

1.
« Science avec patience,
Le supplice est sûr. »
(Rimbaud, « L'éternité »)

« Patience dans l'azur ! »
(Valéry, « Palme »)

Et donc : « Patience dans l'azur / Le supplice est sûr ».

2.
A : « - L'infini est une flèche.
B : L'infini n'est pas une flèche.
A : Oui, on peut aussi le dire ainsi. »

Note : le mot « infini » remplace ici le mot « être » du witz original.

3.
Peut-on définir l'infini comme ce qui est toujours plus infini (ou moins fini) que lui-même? Le verbe définir me pose ici problème, mais je ne sais pas pourquoi.
L'infini est-il un « toujours plus » ? Une expansion « à l'infini » ? Une suite de 9 derrière le 0 et sa virgule , suite qui est aussi 1 ? Le réel est-il toujours plus que lui-même ?

4.
L'infini est-il l'ensemble de tout ce qui est (les étants autant que les existants?). Autrement dit, l'infini est-il en grande partie le fruit de notre imagination ?

5.
Si je décide d’exclure de ma définition de l'infini l'ensemble des étants dont l’existence n'est pas prouvée ou indémontrable, est-ce vraiment l'infini que je définis ou seulement le champ des connaissances humaines ? Autrement dit, l'infini ne serait-il jamais qu'une encyclopédie à laquelle l'humain ajoute toujours plus d'informations ?
Qu'une vie d'humain ne permette pas de tout savoir prouve seulement notre incompétence, et non pas l’existence d'un savoir infini à expliciter.
Exclure d'une définition de l'infini l'ensemble de ce qui n'est pas prouvé ou indémontrable ne revient-il pas à fermer la porte et à rester enfermé dans la demeure des certitudes, et si jamais ces certitudes s'écroulaient, que resterait-il de ma maison ?

6.
Je suis un piètre joueur d'échecs parce que je ne connais pas assez les tactiques qu'un bon joueur emploie pour pouvoir remporter la partie. Si je connaissais ces règles, serais-je un meilleur joueur ? Intuitivement, pédagogiquement, on serait tenté de répondre par l'affirmative. J'ai plutôt l'impression que ce n'est absolument pas prouvé et qu'il y a autant de chances que je sois un meilleur joueur que de risques que je ne sois pas un meilleur joueur. D'autres paramètres entrent en jeu, qui tiennent sans doute à ce que nous appelons généralement l'inconscient et donc les déterminismes.
L'ultra-pédagogisme envisagera dès lors de changer les conditions des déterminismes (« changer la société pour changer l'école ») afin que la connaissance ne soit pas parasitée. Dès lors, le projet pédagogique devient politique, singulièrement politique, voire intrusif, voire non-démocratique, et repose sur l'idée qu'il y aurait des conditions sociales et sociétales qui permettraient presque à coup sûr que le bon élève devienne un bon étudiant qui lui-même deviendrait un professionnel efficace et un humain formidable. Mais les changements jugés nécessaires à ces évolutions reposant eux-mêmes sur des déterminismes et des mécanismes inconscients, on voit bien que le serpent se mord la queue, d'où la tentation de faire de la pédagogie une science, c'est-à-dire de tenter de faire abstraction des déterminismes et de poser sottement qu'améliorer la forme de la transmission en permettant une meilleure acquisition du contenu pourrait suffire à la réussite du projet pédagogique réel : « changer la société ».

7.
Extrapolons : est-ce que parce que les humains comprennent de mieux en mieux l'univers dans lequel ils s'agitent qu'ils seront meilleurs et réussiront à régler les problèmes de telle sorte que l'humanité sera, quelque jour, lointain, heureuse, rationnelle et pacifiée ? Les humanistes diront que oui. Je pense au contraire que ce n'est absolument pas prouvé. Que l'humain soit toujours plus savant, c'est une évidence ; qu'il soit plus sage, l'honnêteté nous oblige à reconnaître que non.
Certains diront que l'humain ne peut être plus sage tant que le problème de la rareté naturelle ne sera pas résolu, et que c'est donc une question politique.
D'autres diront que c'est dans le transhumanisme que l'humain trouvera son salut.
Mais il se pourrait aussi que la suffisance des biens et l'amélioration des capacités individuelles (« l'humanité augmentée », revue et corrigée) ne soient que de simples améliorations techniques qui n'empêcheraient en rien ni les conflits ni les bêtises, non pas que telle soit notre nature, mais parce que telle est notre diversité. Disons qu'un monde heureux qui, à condition que le Ciel ne nous tombe pas sur la tête, adviendrait fatalement, comme le résultat logique de nos progrès scientifiques et politiques, n'est absolument pas prouvé.

Patrice Houzeau
Malo, le 4 août 2023.

11 juin 2023

VIRER SPIRALE

VIRER SPIRALE

1.
« J'ai fait la magique étude
Du Bonheur, que nul n'élude. »
(Rimbaud, « Ô saisons, ô châteaux »)

Si le narrateur a fait « la magique étude », on peut supposer qu'il est magicien.
S'il est magicien, est-il capable de transformer une citrouille en carrosse, le plomb en or, et l'or en temps ?
S'il peut transformer l'or en temps, le narrateur serait-il passant les époques comme le passe-muraille passe les murailles pour aller
faire des farces ?
Le narrateur est-il parmi nous, et si oui, alors depuis combien de temps est-il mort ?

2.
« Ayant posé soigneusement sur la table du salon son bâton noueux, sa pipe et son antique sac de tapisserie, Choulette salua Mme Martin qui lisait à la fenêtre. »
(Anatole France, « Le Lys rouge », chapitre XIX)

Si le narrateur pose sur la table du salon son bâton noueux et que le salon soudain se met à siffler façon pour qui sont ces serpents qui sifflent, peut-on en déduire que je suis à une représentation d'Andromaque et que je me réveille au dernier acte ?

Est-on bien sûr que les pièces de Racine ont été composées par Racine et non par un voyageur de l'espace, qui aurait pris les traits et la perruque à Racine, pour délivrer des messages en alexandrins aux cellules dormantes de body snatchers, leur ordonnant de hâter la modernisation de la société française, afin qu'un jour Emmanuel Macron (président de la République de la première partie du  XXIème siècle, du temps où les puissances de l'Est n'ayant pas encore envahi l'ensemble de l'Europe, les occidentaux croyaient encore en la démocratie et la liberté) afin qu'un jour donc, le président Macron puisse dire que c'est son projet.

3.
« Un visage un peu crispé doté d’une moustache et d’yeux noirs, surmonté d’un chapeau à larges bords. »
(Claude Izner, « Mystère rue des Saints-Pères », chapitre VI)

Si la « moustache », dont le « visage un peu crispé » est doté, se met à s’allonger démesurément jusqu’à se recourber aux extrémités et virer spirale, pourrait-elle servir à hypnotiser quelque suspect ?
Si le suspect est réellement hypnotisé par les moustaches à spirales du détective, est-ce que parce que le toit s’est envolé que le détective garde le « chapeau à larges bords » qui le « surmonte » ?
Si le détective à moustaches à spirales se met à miauler, est-ce parce que ce chat porte un chapeau ?
Serait-ce alors que les bipèdes que nous sommes soyons constamment sous l’influence hypnotique de créatures venues d’ailleurs, surmontées de chapeaux à larges bords, et qui nous font croire qu’elles ne sont que des chats, alors qu’elles sont nos maîtres et manipulateurs ?

4.
« Le mode de la « selffulfilling prophecy », c’est le mode tautologique. La réalité n’est plus que le modèle qui se parle à lui-même. »
(Jean Baudrillard, « la Société de consommation », folio essais n°35, p.198)

Si la « selffufilling prophecy » est un mode tautologique est-ce que, lorsqu’on ouvre ce mode tautologique, en sort une ribambelle de technocrates interconnectés accompagnant une litanie de présidents de la république, et peut-on dire alors que le mode tautologique est un mode politique ?
Si la « selffufulling prophecy » est un mode politique, dans quelle mesure l’homme, la femme, le cirage (si le cirage sait parler, bien sûr) ne font que confirmer ce qu’ils sont, ce que nous savons ce qu’ils sont, même qu’ils nous prennent pour des jambons ?
Est-ce parce que les hommes politiques nous prennent pour des jambons que j’ai si souvent envie de manger des frites ?

Patrice Houzeau
Malo, le 10 juin 2023.

5 juin 2023

CE QUI EST EN SOI N'EXISTE PAS ET AUTRES CHOSES

CE QUI EST EN SOI N'EXISTE PAS ET AUTRES CHOSES

1.
Il y a un poème d'Alberto Caeiro (c'est-à-dire Fernando Pessoa) traduit par Armand Guibert (Poésie/Gallimard n°214, p.146) qui évoque le « présent » et la volonté de ne pas s'y tenir. C'est qu'il y aurait une distinction entre « les choses qui existent » et le « temps qui les mesure ». Cependant, je note que l'intemporalité des objets est une apparence : nous les collectionnons parce qu'ils se raréfient ; tel objet aperçu dans une brocante évoque des souvenirs ; nous reviennent parfois en mémoire des objets inusités aujourd'hui qui faisaient le quotidien de nos jeunesses. Ah le moulin à café !

Le narrateur spéculatif note aussi que « le présent » est une « chose relative au passé et à l'avenir ». Un zéro relatif au positif et au négatif. Donc, pas de présence sans compte du temps. Dès lors, qu'est-ce que la « seule réalité », les « choses sans présent », l'en-soi ?

Le narrateur commence par répondre par des propositions négatives : il s'agit de ne pas « séparer » les choses « d'elles-mêmes », et donc ne pas les traiter de « présentes ». Notons que le traducteur a évité le terme « étants » qui, en sa qualité de participe présent substantivé, inscrirait l'objet dans une perception du temps. C'est que les « choses » sans « présent » qu'évoque ici la spéculation ont plus à voir avec l'être qu'avec l'étant.

Mais dès lors, peut-on considérer ces choses sans présent comme des « réalités » ? Le narrateur semble en douter, jusqu'à écrire : « je ne devrais les traiter de rien du tout. » Ce qui revient à la question du nom de l'être ? Qu'est-ce que cet être qui échappe au présent, qui transcende sa présence, son être au monde (l'ensemble des choses relatives au présent, et donc au passé et à l'avenir) et dont nous pressentons qu'il est dans chaque chose ?

Si on ne peut le nommer, pourrait-on, en voyant les choses telles qu'elles sont « hors du temps, hors de l'espace », le percevoir, cet être, « simplement » le voir ?

C'est alors que le réel se décomposerait sous nos yeux, que l'objet vu, réellement vu en-soi serait « départi », en dehors du « visible » ordinaire (et donc dans l'invisible extraordinaire). Cela me semble relever de la fascination ; quand bien-même celle-ci se présente sous la forme d'une révélation, d'une épiphanie, d'un eurêka, d'une transe, d'une extase. Ce dévoilement serait une apparition et le spectateur frappé de stupeur, foudroyé par cette vérité : ce qui est en soi n’existe pas.

Citation :
« les voir hors du temps, hors de l'espace,
les voir avec la faculté de tout départir, fors le visible.
Telle est la science de voir – qui n'en est pas une. »
(Fernando Pessoa, « Le Gardeur de troupeaux et les autres poèmes d'Alberto Caeiro »)

2.
« L'affaire était entendue », affirma-t-il. Mais cela ne nous apprend rien sur le nombre d'oreilles disponibles ce jour-là. Ni s'ils avaient mangé des bananes.

3.
Napoléon était tellement lui-même que s'il avait été un autre, ça se serait su.

4.
Au fond, quand on se met le doigt dans l’œil, que l'on porte des gants ou pas, cela ne change rien à la taille des œufs.

5.
J'ai beau manger des pâtes, mes progrès en italien sont quasi nuls. Je vais essayer avec le risotto.

6.
Des fois, je préfère me taire. Je ne voudrais pas affoler le reste de mes cheveux. C'est des coups à devenir chauve.

7.
J'ai remarqué que ce n'est pas en entassant des ânes dans un amphithéâtre que l'on finit par gagner le Grand Prix d'Amérique.

8.
On ne fait pas d'omelette sans casser les pieds de quelqu'un, surtout si on le saoule en lui racontant sa vie, ses p'tites misères, tout ça.

9.
Avoir du jambon ne console pas de n'avoir plus de tabac.

10.
Croyez-vous que si Cléopâtre avait eu le nez plus long, Léonard de Vinci aurait peint la Joconde ?

11.
Mais non, ce n'est pas parce que cherchez des clics que vous prendrez des claques. Par contre, si vous prenez une sauce, c'est compté comme supplément.

12.
Je préfère rire de tout avant que le premier ministre ne nous sorte un 49.3 qui ne fera plus rire personne.

13.
Comme elle est partie à cheval, moi, forcément, avec mon pédalo, j'avais l'air d'un (eh oui).

Patrice Houzeau
Malo, le 5 juin 2023.

22 mai 2023

LISANT DU PHILIP K DICK ECOUTANT LES WHITE STRIPS

LISANT DU PHILIP K DICK ECOUTANT LES WHITE STRIPS

1.
… à parler des soucoupes volantes... un bon bout de temps à parler des soucoupes volantes, comme si ça m'intéressait alors que je la reluquais la jolie avec son joli et ses jolis hein et que je me disais aussi que ce que j'entendais, le rock des White Stripes, il était vraiment excellent, le rock de Jack et Meg White.

2.
Me demande pourquoi Philip K. Dick a flanqué soudain à sa phrase « des larves de serpents » qui « se tordaient toujours », quelque chose avait dû m'échapper tandis que la guitare de Jack White saturait bien blues et que la fille, la fille quelle fille

3.
quand vous l'aurez, vous n'aurez rien... comme ça qu'on finit... (bien content je contemplais... avec que dalle... sac d'os ne possède rien... la pochette de « De Stijl » des White Stripes)... rien dans le trou... dans les poches, les trous... aux chaussettes aussi.

4.
peut-être mais ce n'était pas certain... la jolie causait encore soucoupes volantes... (je contemple la pochette aux rectangles... les OVNIS, une manifestation d'un univers parallèle, crois-tu... blancs et rouges à la Mondrian de la pochette de « De Stijl »)... pas certain.

pas certain, mon cul, qu'elle dit, qu'elle avait bien... faut bien qu'ils viennent de quelque part... d'un univers parallèle, je te dis, qu'ils viennent, tu peux me croire (elle se reversa à boire)... dans ma tête sautillaient un petit Jack et une petite Meg sur le bon vieux rythme du rock n' roll...

5.
Est-ce bien sérieux à 59 balais de lire des romans de Philip K. Dick et d'écouter du rock n' roll ? qu'ils me firent alors les poissons à gros yeux tournants autour de moi dans la pièce d'où Machine s'était barrée avec ses soucoupes volantes.

Surtout que pendant que je dévore mon Philip K. Dick et me gave de ritournelles électriques, mes collègues du lycée général passent, j'en suis sûr, leurs soirées à méditer les plus belles pages de Proust en comparant différentes interprétations du concerto pour piano n°2 de Rachmaninov.

Ça, c'est pour ceux qui ne sont pas mariés. Sinon, font comme tout le monde, regardent un truc ou l'autre à la télé en attendant que ça se passe.

6.
Retenir la page 166 du volume, il y a une citation à faire... Sinon, le personnage du roman de Philip K. Dick s'appelle Jason Taverner, et personne ne le reconnaît plus alors qu'il était si célèbre où ça ? Histoire d'univers parallèle, tu penses ?

Toutes les parallèles finissent-elles par se rejoindre en un point, genre point aleph ou je ne sais quoi... la matière comme une infinité de lignes finissant par se rejoindre en un point... une infinité de lignes s'étant déjà résolues en un point qui lie l'infini des univers... une infinité de lignes sans début ni fin ni centre s'étant déjà résolues, se résolvant, et filant vers leur résolution comme si ce point était sans exister.

Le chat de Schrödinger joue-t-il avec les univers comme avec une pelote qui se défait à l'infini ?

7.
Il y a une réponse page 172 une réponse page 172 page 172 page 172 se répétait-elle, sortant de l'immeuble dans laquelle elle l'avait laissé avec le disque des White Stripes et ses spéculations fumeuses jusqu'à ce que, surgi de l'ombre près du guéridon à abat-jour, le couteau.

8.
Il y a dans le disque « Elephant » des White Stripes un morceau où la guitare, elle barrit on dirait que je sais pas c'est peut-être ça qui... ou alors c'est dans un des textes mais comme je poutre en angliche (je l'ai déjà dit ça), même que j'écoute du rock anglo-saxon pour ne pas être gêné – surtout quand je lis - par toutes les sottises qu'elles peuvent dire les chansons quand elles sont chantées en français (y a pas plus démagogique qu'une chanson de la chanson française dite « à texte ») alors je sais pas, mais y a comme un barrissement de bestiau dans un des morceaux de l’excellent « Elephant » des White Stripes, l'album où il y a la chanson que j'aime bien là « Well It's True That We Love One Another » même qu'après zont l'air bien contents Jack et Meg White, même que Meg elle dit « Let's celebrate »

Patrice Houzeau
Malo, le 22 mai 2023.

9 février 2023

SANS DOUTE PEUT-ON DOUTER DE TOUT SAUF DU DOUTE

SANS DOUTE PEUT-ON DOUTER DE TOUT SAUF DU DOUTE

1.
On peut, comme Wittgenstein, poser la condition « si je ne le sais que par moi-même », et se demander si ce que je sais « par-moi-même » correspond à ce que sait autrui. Suis-je bien sûr que ce que je nomme « liberté », « hasard », « dieu », « choucroute » correspond à ce à quoi se réfère autrui quand il parle de liberté, de hasard, de dieu ou de la choucroute ?

Pour la choucroute, il y a certainement consensus.

On me dira que c'est le but de la philosophie que de donner une définition objective aux concepts de « liberté », de « hasard », de « dieu » et même de « choucroute ».

Eh bien, apparemment, on ne lit pas vraiment les philosophes.

Ou alors, on les lit, mais on ne les comprend pas. Ou on feint de ne pas les comprendre.

Citation :
"Si je ne le sais que par moi-même, je ne sais que ce que moi-même je nomme ainsi, non pas ce que nommerait ainsi un autre." 
(Wittgenstein traduit par Pierre Klossowski, « Investigations philosophiques », 347).

2.
On peut, comme Wittgenstein, se demander ce que signifie le « pourrait ». Sans certaines règles grammaticales, certains faits ne pourraient être exprimés. Cela revient à dire que certains fait existent en dehors du langage, ou sont à l’extrême limite de ce que le langage peut exprimer. Comment décrire le sentiment de l'imminence de sa propre mort ? Comment décrire le parfum d'une rose de manière à le rendre « vivant », vraisemblable à celui qui n'a jamais approché une rose ? Qu'exprime-t-on, la douleur ou les signes de la douleur ? Le réel est plein de ces inaccessibles sémantiques, aussi réels qu'une planète découverte par calcul mais qui reste invisible.

Citation :
« Si quelqu'un dit : « Si notre langage n'avait pas cette règle grammaticale, il ne pourrait pas exprimer ces faits » - que l'on se demande ce que signifie ici le « pourrait ».
(Wittgenstein traduit par Pierre Klossowski, « Investigations philosophiques », 497).

3.
Le réel est arbitraire (« le monde est injuste ») parce que les règles grammaticales sont arbitraires mène à la proposition : créons un langage purement logique (celui des machines) pour aboutir à un monde qui serait fatalement juste puisque logique. Alors, nous quitterions l'humanité pour le règne des robots, des efficacités justement rétribuées, des bonheurs justement mérités, des sacrifices logiquement nécessaires.

4.
Sans doute peut-on douter de tout, sauf du doute. La logique est-elle la science du doute ? Le réel ne peut-il être réel que parce qu'il est douteux ?

5.
On peut, comme Wittgenstein, se demander comment l'autre « sait ce qu'il veut dire ». Ce que j'entends, ce sont les signes de ce qu'il veut dire, les symptômes d'un vouloir-dire. Ce qu'il veut dire réellement, le sait-il lui-même ? Devrait-il le savoir ? Il ne veut pas dire, il signifie.

Citation :
« Comment doit-il savoir ce qu'il veut dire, il n'a guère que ses signes. » (Wittgenstein traduit par Klossowski, « Investigations philosophiques », 504).

6.
Le langage mime le réel à la façon des trois singes, dont l'un se bouche les oreilles, l'autre se bouche les yeux, et le dernier se tait. Nous ne pouvons tout dire du réel car nous résistons à la tentation de pousser la logique jusqu’aux limites de l'absurde.

Patrice Houzeau
Malo, le 9 février 2023.

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